SUMMAIRE: L'histoire de Basile Guissou, de son pays, de son peuple; la politique du Parti Radical et la vie politique et sociale de Burkina Faso; l'Afrique et la nécessité de dépasser les Etats nationaux; l'election à Premier-secrétaire-adjoint.
(NR - novembre 1988)
Giancarlo Loquenzi: Basile, je n'ai pas vraiment de vraies questions à te poser. J'ai envie seulement d'écouter un peu ton histoire qui a coincidé avec l'histoire de ton pays, de ton peuple et qui maintenant coincide aussi avec l'histoire du Parti Radical. Voilà, qu'est-ce que tu peux nous raconter de toi ?
Basile Guissou: Je ne peux rien dire d'autre que ce que j'ai déjà eu l'occasion de dire au Conseil Fédéral. J'ai connu le Parti Radical en 1984, alors que j'étais des convictions, je ne dirais pas totalement opposées, mais un peu en contradiction avec les principes fondamentaux du parti, la nonviolence, la tolérance, l'antimilitarisme, la lutte pour le droit à la vie, la vie du droit, la lutte pour un Etat de droit en quelque sorte. Et la première fois que j'ai discuté avec Marco Pannella. Je l'ai dit, j'ai passé des nuits sans dormir parce qu'il a bouleversé complètement mes convictions. Je me suis posé des questions, je n'ai pas toujours trouvé des réponses. Mais le peu que j'ai pû trouver comme réponse m'a convaincu que le monde pouvait être abordé, expliqué et compris différement sans pour autant tomber dans l'utopisme ou dans le rève. Et jusqu'à un certain point j'ai fini par accepter, comprendre et adopter même les positions que Marco avait défendues. Bien sûr après plusieurs contacts, plusieurs contac
ts sur différents problèmes de la faim dans le monde, de la désertification, sur la question de l'atmosphère, de l'écologie, et des questions autour desquelles le Parti Radical avait déjà fait beaucoup d'agitation, de propagande, avait pris des positions incomprises parfois en tout cas par moi. Et petit à petit j'ai réussi à m'approprier les principaux thèmes de la ligne politique du Parti Radical et je m'y suis inscrit. J'ai essayé autant que faire ce peut de faire partager ces idées autour de moi, par mes amis, mes frères. Et j'ai vu effectivement que de plus en plus de personnes comprennaient très bien les idéaux du Parti Radical. Et je me suis renforcé dans mes convictions. Qu'est-ce que je peux dire, je suis un chargé de recherches, je suis chercheur de profession. J'ai fait de la sociologie dans mon pays, des recherches en sociologie, principalement dans la compréhension et la connaissance de nos sociétés, la tradition orale. Dans le cadre de mon travail je suis souvent appellé à discuter avec les pays
ans, dans les campagnes, etc. Je vois que leur philosophie de la vie n'est pas différente sinon même qu'elle est identique à ce que défend le Parti Radical. Surtout concernant les questions de droit à la vie, de respect de la personne humaine, des droits de l'homme, du refus de la violence, de l'acceptation de l'autre malgré ses différentes, de l'amour du prochain et aussi de la philosophie gandhienne de la nonviolence qui n'est pas du pacifisme mais qui est une façon d'agir mais dans l'amour du prochain. Ces valeurs là existent chez moi, existent dans la tradition. Dans les études que j'ai fait ressortir ces aspects. Et je pense que fondamentalement je pense que nos sociétés, en Afrique, sont fondées sur des droits traditionnels qui recoupent très bien les valeurs qui sont défendues aujourd'hui par le Parti Radical. Ce qui me renforce, moi, dans ma conviction que les idées radicales ont de l'avenir sur le Continent africain, au sein de l'inteligensia, des intellectuels africains, qui acceptent de s'élever à
une compréhension autre du monde et de son avenir, conformément à des valeurs qui dans notre tradition, dans les traditions de nos sociétés, ont servi pendant des millénaire à souder l'unité de la société, à éviter les affrontements et la violence, à mener la société à vivre en harmonie avec elle-même, à trouver donc des garde-fous, des lois, des principes, des valeurs qui respectent l'homme dans son intégrité morale et physique, qui acceptent la différence de points de vue sans jamais céder à la facilité qui consiste effectivement à vouloir pratiquer la violence, à utiliser la force pour résoudre des contradictions entre les hommes.
Giancarlo Loquenzi: Quand tu as connu le Parti Radical, la politique du Parti Radical, tu avais des responsabilités de gouvernement dans ton pays. Est-ce que cela a changé quelque chose dans ta façon d'agir dans la politique, dans la vie politique et sociale de ton pays ?
Basile Guissou: Evidemment. Bien sûr. Inévitablement. Je l'ai dit et je le répète le contact avec les idées du Parti Radical a remis en cause beaucoup de mes convictions passées. Et dans ce sens ma pratique sociale, mon comportement de tous les jours a été affecté. Face à beaucoup de positions que j'avais adoptées dans le passé, bien sûr j'ai été obligé aussi de changer et de me conformer à l'idéal qui était celui du Parti Radical et que je partageais de plus en plus et donc je pense effectivement que ma vie a été transformée, mes relations avec ma société, avec les hommes de mon pays et même ceux qui n'étaient pas de mon pays, ceux que je rencontrais dans le sens d'échanges d'idées ou de travail en commun sur n'importe quel problème, mes positions ont été nettement influencées par mes convictions radicales.
G.L.: Et quelles ont été les réactions des responsables avec lesquels tu travaillais quand tu as changé dans ta façon d'agir.
B.G.: Bon, disons qu'il y a eu deux attitudes. Il y a eu ceux qui n'ont pas pris cela bien. Que j'étais en train de me laisser influencer par un réveur ou bien par des idées absolumment sans consistance, qui n'ont pas fait l'effort de comprendre. Il y a bien sûr eu cette catégorie de personnes qui n'a pris cela au sérieux. Mais je peux dire que la majorité de ceux avec lesquels j'ai eu à travailler, à discuter surtout de mes contacts avec Marco, des discussions que j'ai pû avoir avec lui, la majorité a été très sensible, a cherché à connaître le Parti Radical, a cherché à connaître ses idées et puis son passé, son histoire, les luttes qui ont été menées aussi bien sur le plan national, en Italie, que sur le plan international dans le cas du Parlement européen ou sur les thèmes internationaux, des thèmes qui étaient dans l'actualité de ces dernières années comme la lutte contre la désertification, la famine, la mort des enfants par suite de la crise alimentaire qui frappait le continent africain, sur toutes c
es questions-là, je crois que pour l'essentiel toutes ces idées-là ont été partagées par ceux avec lesquels je travaillais. Même si ils n'ont pas été nombreux à franchir le pas de s'inscrire au Parti Radical, je crois que ce n'est pas une cause perdue, le travail se poursuit, les discussions se poursuivent, les contacts se poursuivent. Il y a des délégations du Parti Radical qui viennent au Burkina Faso qui discutent avec des responsables, qui discutent avec d'autres personnes qui ne sont pas des responsables, des intellectuels ou des travailleurs, donc qui exposent de plus en plus les idéaux du Parti Radical, et je crois très sincèrement que l'Afrique de façon général, je ne parle pas seulement pour le Burkina Faso mais de l'Afrique de façon général il y a un terrain pour les idées radicales et surtout pour les idées transnationales et transpartitiques, je crois effectivement qu'il y a un terrain extrèmement favorable, surtout que la lutte du parti s'inscrit aussi dans le cadre de la lutte pour la défense d
es droits de l'homme, pour le droit à la vie et la vie du droit, donc l'Etat de droit, l'existence et la défense et l'enrichissement de sociétés civiles organisées et démocratiques, autour des valeurs essentielles qui permettent aujourd'hui à la Communauté internationale effectivement d'espérer en monde meilleur, un monde fait de fraternité, de solidarité, d'amour du prochain malgré les différences, de refus absolu de la violence, de l'intolérance, de défense du droit dans tous les sens du terme. Je l'ai dit au Conseil Fédéral, je le répète, je crois qu'au niveau du Parti Radical, la situation difficile qui est apparu clairement aux yeux de chacun, de chaque participant au Conseil Fédéral, cette situation peut trouver une solution. Je suis optimiste et je pense que l'Afrique aura son mot à dire, le Continent africain pourra facilement contribuer à la réalisation de cet idéal transnational. Donc je suis loin d'être pessimiste à la fin de ce Conseil fédéral. Bien au contraire je crois que la dimension des dang
ers, des difficultés, a été clairement exposée à ce Conseil Fédéral. Chaque participant a pû prendre la température des difficultés que nous traversons, a pû réaliser le chemin qu'il reste à parcourir pour pouvoir se transformer intérieurement en un militant de la transnationalité, en un militant du transpartitisme, afin que le parti puisse effectuer cette mutation salutaire, conforme à l'idéal de combat planétaire que le Parti Radical est décidé à entreprendre. Je crois que des succès ont été remporté. Il ne faut pas se faire des illusions là dessus, ce n'est pas vrai que tout est mauvais, il y a eu beaucoup d'acquis, il y a eu beaucoup d'effort, il y a eu beaucoup d'implantations, d'inscriptions nouvelles, de participations beaucoup plus active de la part de plusieurs pays, en Europe comme en Afrique comme ailleurs et je crois que le parti a la force nécessaire pour réaliser le bon qualitatif, le pas qualitatif qui lui permettra donc de se stabiliser sur le plan financier, sur le plan matériel, de se stabi
liser sur le plan des inscriptions, ce qui est très important, de se stabiliser sur le plan de la conviction dans le combat de ses militants pour que effectivement de plus en plus les militants se lancent dans la batailles avec la conviction qu'ils sont dans une voie juste, qu'ils défendent une cause juste et que les idées du Parti Radical n'appartiennent pas uniquement aux militants du parti. Mais bien au contraire que tous les hommes sont sensibles à ce massage et qu'il faut oser aller vers les gens, leur parler et ramener de plus en plus de moisson, dans le sens de nouveaux inscrits, de nouveaux convaincus, et élargir au maximum le champ de notre activité. Ca, de ce point de vue là, je pense qu'il y a un rôle à jouer sur le continent africain et je crois que nous serons en mesure de jouer ce rôle-là.
G.L.: Une des thèses de base du Parti Radical transnational est de dire qu'à notre siècle l'idée de l'Etat national, c'est quelque chose de dépassé, quelque chose de vieux. Et quand ils disent cela les radicaux pensent aussi au problème du continent africain où les Etats nationaux n'ont pas souvent donné de bons résultats. Es-tu d'accord avec cela ?
B.G.: Je suis parfaitement d'accord. Absolument d'accord. Et ce n'est pas moi qui suis d'accord, ce sont les faits qui montrent cela. C'est depuis 1963 que l'organisation de l'Unité Africaine a été crée et a posé déjà à cette époque la nécessité de dépasser les cadres nationaux. Et en acceptant de ne pas faire de conflits sur les frontières héritées de la colonisation, en acceptant de créer l'organisation de l'Unité africaine, en acceptant de travailler en son sein et de respecter les décisions qui sont prises à ce niveau, même si l'Organisation de l'Unité africaine a connu des problèmes, il y a quand même l'idée de dépasser les frontières nationales, l'idée de comprendre que le développement national, dans un cadre purement national, est totalement dépassée, était une étape peut-être nécessaire pour une prise de conscience de notre appartenance au Continent. Mais aujourd'hui il est certain qu'après vingt cinq ans, l'unanimité se fait au sein de chaque Etat africain que le cadre national ne peut pas permett
re un véritable développement, ne peut pas permettre un véritable épanouissemnt des individus comme de la collectivité. Ce qui se traduit par la création de nombreux organismes sous-régionaux, par de nombreux cadres de concertations entre plusieurs Etats et surtout, ces dernières années, par la volonté de réabiliter, de renforcer, de faire revivre effectivement l'Organisation de l'Unité Africaine qui est effectivement l'organisation dont ce sont dotés les pays africains pour pouvoir dépasser la vision étriquée du nationalisme, pour lancer la dynamique de l'unité continentale. Et je crois que cet effort, cette volonté d'aller de l'avant, de dépasser le cadre national qui est celle du Parti Radical, rencontre parfaitement les soucis qui se sont manifestés depuis 1963 sur le continent africain et les faits, les échecs, les déceptions dans laquelle se sont trouver la majorité des Etats africains de se développer dans le strict cadre national. De ce point de vue je crois que les africains sont très bien placé pou
r comprendre que le cadre national est un cadre totalement dépassé du point de vue de l'histoire, du point de vue aussi de la volonté d'aller de l'avant, de résoudre les questions essentielles de leur vie, à savoir que les ressources qui existent en Afrique, les potentialités qui existent en Afrique ne peuvent pas être mises en valeur dans des cadres nationaux. Ce ne sont que les regroupements, les efforts de mettre en commun ce que l'ont a, notre diversité, qui est en fait notre richesse aussi, que cet effort de mettre en commun, de rationaliser les différents secteurs de la vie économique, sociale, culturelle et politique qui nous permettra de créer des ensembles viables. Je pense que le Traité européen date de 1954 et jusqu'à présent nous encore à la recherche de l'unité européenne qui ne s'est pas encore faite. On espère en
1992, 1993, un pas qualitatif. Donc les pays africains qui ne se sont organisés qu'en 1963, pratiquement dix ans après, sont en droit de se dire que le chemin qui a été parcouru en 25 ans est remarquablement positif dans le sens de maintenir l'idée de la nécessité de dépasser les cadres nationaux. Donc de ce point de vue là je pense comme le Parti Radical le dit que le développement dans le cadre national est un concept complètement dépassé. Les Etats nationaux doivent être nécessairement transcendés pour voir d'abord au niveau continental, comme l'Afrique, l'Europe et de voir au delà de cela voir qu'aujourd'hui de plus en plus l'humanité est une, indivisible, et les moyens de communication, les routes, le téléphone, l'informatique, la télévision, la radio, etc, tout cela a réduit les distances, les séparations, l'ignorance les uns des autres pour nous amener aujourd'hui à nous dire qu'il faut que l'on transforme tous les hommes de la terre en citoyens de la terre. C'est un peu dans cette optique que je pens
e et que je comprends l'effort du Parti Radical à l'heure actuelle de dépasser le cadre strict de l'Italie, le cadre strict de l'Europe pour voir que l'humanité est une et que tous les citoyens du monde ont le droit de défendre des valeurs qui sont des valeurs universelles, qui appartiennent à l'humanité toute entière et aussi de partager le bien-être, parce qu'il y a aussi ce volet. Une fois que vous dites que vous êtes des frères vous avez les mêmes droits et les mêmes devoirs les uns envers les autres. Dans ce cadre il va de soi que des réponses pourront être trouvées aux questions économiques, aux questions sociales, aux questions du racisme, de l'intolérance, de l'exploitation, de la violence. C'est ce que je crois fermement et je pense que le Parti Radical a eu raison, a raison et aura raison de se battre toujours avec le drapeau de la transnationalité.
G.L.: Quelle a été pour toi la signification d'être élu Premier-secrétaire-adjoint au Conseil Fédéral de Jérusalem ?
B.G.: J'ai été très ému d'abord par la proposition du Premier secrétaire qui en acceptent de revenir sur sa décision de démissioner a, en même temps, proposé au Conseil Fédéral que je puisse intégrer le sécrétariat et travailler avec lui dans le sens de la relance du parti et dans l'effort pour surmonter les difficultés que nous connaissons à l'heure actuelle au sein du parti. J'ai été très ému parce que c'était une preuve de confiance personnelle d'abord, d'amitié, et en même temps, je ne dirais pas un défi, mais comme je l'ai dit le parti se trouve dans une situation difficile et qu'on fasse appel à moi, cela signifie une preuve de confiance dans ma capacité d'apporter
quelque chose et de ce point de vue je ne pouvais donc pas refuser, je ne peux pas rester un spectateur devant une crise qui risque de m'emporter moi aussi parce que je suis moi aussi en tant que membre du parti si le parti a des problèmes j'ai des problèmes moi aussi donc à la recherche des solutions je ne peux pas dire que je ne dois pas apporter ma contribution bien au contraire c'est pour ça que je n'ai pas jugé opportun de m'opposer à cette proposition ou d'émettre des réserves j'ai accepté et je crois très sincèrement que je suis à la disposition
du parti radical je crois au message et à l'idéal du parti et avec le peu d'expérience que j'ai ,le peu de connaissance du millieu de l'afrique que j'ai,je peux apporter au niveau du secrétariat fédéral en tout cas une note spécifique qui renforcera le coté transnational du parti et renforcera la volonté du parti de s'ouvrir toujours d'aventage au reste du monde et de briser définitivement les réticences les habitudes,les anciennes habitudes de penser et d'agir strictement dans un cadre national, en retour c'est une transformation que celà va demander à mon niveau aussi parce qu'il faut que j'apprenne au contact du parti,au contact des responsabilités au sein du parti à dépasser le résonnement national, le résonnement africain pour résonner en militant du parti radical c'est à dire en militant transnational qui parle non pas au nom d'une tribu,d'une nation ou d'un continent mais au nom de l'homme au nom de tous les hommes de la terre quelque soit leurs couleurs, quelque soit leurs races, quelque soit leur op
tions philosophiques ou autres et un parti qui accepte cette mutation qui représente l'avenir de l'humanité il est certain,mais vis à vis de ce choix là, beaucoups d'autres le refuse parce que conscient des difficultés ou parce que ne comprenant pas encore que l'avenir ne peux pas ce construire dans une voie différente
question.
quelle est le type de travail que tu pourras faire dans ton pays par apport au parti radical dans les prochains jours, d'ici au congres ?
B.G Bon je crois que j'appartien à une direction,et la direction va se réunir,vaprocéder à la division des taches et dans le cadre de la partie du travail qui me sera attribuée j'espère avoir les moyens, les capacités, la réserve physique, morale, et intellectuelle nécessaire pour pouvoir accomplir ma part de responsabilité des taches conformément aux décisions qui seront prisent au niveau de la direction , donc je ne peux pas anticiper pour donner des précisions supplémentaires mais il est certain que tout le travail qui me sera confier,je m'efforcerai de l'effectuer avec conscience et dans l'espoir que je contribue ainsi à vaincre la crise du parti radical, et à renforcer le coté transnational que nous cherchons d'ici le congrès à remplir au maximum, parce que l'on parle de vide et de plein c'est vrai que c'est un coter encore à renforcer et d'ici les deux mois à venir qui nous sépare du congrès, je pense très sincèrement que au niveau du secrétariat et que l'ensemble des camarades sont décidés, moi a
vec,à remplir toutes les taches qui nous seront confiées afin que le congrès puisse enregistrer un progrès de la conférence au congrès.