Bruxelles, 27/06/2000 (Agence Europe) - L'échange de vues que la commission constitutionnelle du Parlement européen a eu lundi après-midi avec le Représentant permanent belge Frans van Daele, membre du Groupe préparatoire de la Conférence intergouvernementale sur la réforme institutionnelle de l'UE, a offert l'occasion aux députés d'évoquer entre eux l'idée lancée la semaine dernière par de proches collaborateurs du chancelier Schröder de convoquer dès 2004, après la ratification du Traité de Nice, une nouvelle CIG plus ambitieuse (voir EUROPE d'hier, p.6). L'expérience nous montre qu'"une CIG en emmène une autre, mais maintenant il faut se concentrer sur des résultats suffisamment ambitieux à Nice, pour faire face au défi de l'élargissement la conscience tranquille , a commenté M. van Daele, tout en notant que bien sûr, après Nice les efforts d'intégration européenne se poursuivront . Plusieurs députés, comme le social-démocrate allemand Jo Leinen et le libéral démocrate britannique Andrew Duff, se sont ex
primés dans le même sens, et le président de la commission constitutionnelle, Giorgio Napolitano (Democratici di sinistra), a affirmé: nous ne pouvons pas accepter l'idée qu'une série de positions sont déjà tombées et qu'on pense désormais à une autre CIG pour résoudre des problèmes qu'on pourrait résoudre à Nice , comme celui de l'intégration de la Charte des droits fondamentaux dans le Traité (M.Napolitano a admis que la question est complexe et a cité les réserves exprimées par une personne d'une grande autorité commel'ancien Garde des Sceaux Robert Badinter). L'Annexe du Rapport de la Présidence au sommet sur la Pesd dit au moins que la question d'une éventuelle révision du Traité concernant la Politique de sécurité et de défense reste sur la table, a constaté M. Napolitano. M.van Daele était d'accord là aussi. Et il a ajouté que la question du statut de la Charte n'était pas encore réglée (les Français semblent vouloir reporter la décision à ce sujet; pourquoi disent-ils cela ? , s'est écrié M. Duff);
quant à la politique de défense, il a trouvé un peu curieux qu'un processus d'une telle portée puisse se poursuivre sans écho dans le Traité .
A propos des reliquats d'Amsterdam , Frans van Daele a tenu à rappeler que l'extension de la majorité qualifiée n'était pas en fait un reliquat de la CIG précédente, et qu'elle avait été ajoutée à l'ordre du jour de la CIG actuelle seulement grâce à l'attitude déterminée d'Italie, France et Belgique. Davantage de majorité qualifiée, cela veut dire aussi plus de pouvoir pour la Commission, a-t-il dit aussi. Mais peut-on envisager de nommer à la majorité qualifiée le président de la Commission et le président de la Banque centrale européenne ? A cette question du travailliste britannique Richard Corbett, M.van Daele a reconnu qu'au stade actuel de l'intégration européenne, il voit difficilement comment on pourrait avoir un président de la Commission qui entamerait son mandat en ayant des difficultés avec l'un ou l'autre Etat membre. Quant à la Commission européenne en général, il a rappelé que, au stade actuel, la Belgique est pour le maintien d'un Commissaire par Etat membre, car cette formule permettrait
d'assurer la légitimité de cette institution auprès des opinions publiques.
L'élu de la Liste Bonino (belge élu en Italie) Olivier Dupuis a salué cette position, en estimant qu'une décision d'avoir une Commission européenne avec moins de Commissaires que d'Etats membres, reviendrait à affaiblir la Commission . M.Dupuis s'est inquiété aussi de la place de la Commission européenne dans le deuxième pilier, face au rôle joué par le Haut Représentant pour la Pesc, et M. van Daele lui a répliqué qu'il s'agit là d'un processus: pour nous, le Haut Représentant, c'est un début de centralité de cette politique, alors que la logique des Groupes de contact et autres groupements avait, au cours des dernières années, marqué une sortie du système communautaire . Pour nous, à terme, "tout cela doit confluer, être unifié avec la Commission", a dit le Représentant permanent belge .
M. van Daele a par ailleurs estimé, en ce qui concerne le nombre de députés européens, qu'il faudrait respecter le plafond de 700 députés déjà inscrits dans le Traité, mais qu'on pourrait accepter un dépassement provisoire de ce chiffre après un premier élargissement, tout en sachant qu'il faudra ensuite revenir à 700 membres . La Verte Monica Frassoni (italienne élue en Belgique) a répliqué: une fois qu'on augmente le nombre de membres, on ne pourra pas les réduire ! Et M.van Daele lui a répondu (en italien, après avoir parlé tour à tour en néerlandais, anglais, allemand et français, ce qui a fait dire à M.Napolitano: je regrette qu'il n'y ait pas un député finlandais qui vous interroge, pour voir dans quelle langue vous répondriez...) que le chiffre de 700 n'était pas ultra-sacré , mais que, au-delà du nombre de 700, l'efficacité du Parlement risquerait d'être compromise. En même temps, tout comme Mme Frassoni, M.van Daele a reconnu qu'il faut une représentationsuffisante pour réfléter la diversité de
chaque Etat membre, et il a cité l'exemple de la complexité et de la diversité si caractéristiques de son propre pays.
Quant aux coopérations renforcées, Frans van Daele a souligné que la Belgique, comme les autres pays du Benelux, est favorable à l'assouplissement des verrous actuels du Traité, que ce soit la possibilité de veto ou la masse critique nécessaire pour les déclencher (qui devrait être atteinte avec 8 ou 9 Etats membres). Si la formule est inclusive et avec un rôle important pour la Commission, la coopération renforcée devrait permettre de créer une zone de haute tension , entre un certain nombre de pays qui peuvent montrer le chemin . A M.Duff qui demandait des exemples concrets de domaines dans lesquels on pourrait envisager la coopération renforcée, M.van Daele a répliqué: nous le dirons au moment qui serait le plus propice pour avoir des résultats. Mais il a aussi ajouté: votre question est politiquement légitime, mais on peut aussi répliquer qu'il n'est pas nécessaire de fournir de tels exemples, puisque les coopérations renforcées sont déjà dans le Traité[...].