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Conferenza Tibet
Partito Radicale Paolo - 17 aprile 1997
Tibet/indifférence de l'occident

SILENCE, AU TIBET, ON REEDUQUE!

par Jean-Claude Buhrer et Claude B. Levenson

Le Monde, jeudi 17 avril 1997

Au Tibet, la chasse aux photographies du dalaï-lama bat son plein et les »équipes de rééducation , présentes jusque dans les sanctuaires les plus reculés, raniment le souvenir des pires moments de la Révolution culturelle. Depuis qu'a été lancée l'offensive de propagande contre le dalaï-lama, en visite en France du 17 au 30 avril, pour, selon l'expression consacrée, »couper la tête du serpent séparatiste , on ne badine pas avec les ordres sur le toit du monde. Et, dans les regards des Tibétains, une crainte nouvelle a remplacé la traditionnelle curiosité pétillante à l'égard de l'étranger de passage. Engagée l'an dernier, dans le sillage du différend ayant éclaté autour de la succession du 10, panchen-lama, la »lutte à la vie, à la mort contre le dalaï et sa clique ne faiblit pas. Non seulement portraits et photographies du chef spirituel exilé ont disparu des lieux publics et de culte, ramassés par des policiers et soldats en mission, mais les cadres vides laissés bien en évidence, et dont personne n'était

vraiment dupe, ont été d'autorité ornés de l'effigie de Gyaltsen Norbu, l'enfant imposé par les autorités de Pékin et que, les Tibétains appellent le »panchen chinois . Les hostilités sont ouvertes, dirigées d'abord contre le clergé - dernier carré farouchement rebelle à la mainmise autoritaire du régime communiste. Pour bien mettre les points sur les »i , à la mi-septembre, le secrétaire du Parti communiste de la région dite autonome tenait à préciser, dans le Tibet Daily, que »l'essence de cette lutte n'est ni de nature religieuse, ni liée à l'autonomie. il s'agit de la protection de intégrité de notre Pays . Les faits sur place ne font que souligner cette détermination: en deux ans d'intervalle, depuis notre dernier séjour à Lhassa, la sinisation s'est accélérée et ressemble de plus en plus à une marche forcée, à une course contre la montre. Sans parler du dépérissement de la langue en raison de l'extension de la télévision et d'une scolarisation généralisée... en chinois. Les enseignes chinoises ne se

comptent plus dans les rues de la cité sacrée, devenues méconnaissables, où s'alignent échoppes de bric et de broc, bars, karaoké, gargotes et bordels surmontés d'idéogrammes clinquants. Les ultimes demeures patriciennes, nichées dans le lacis de ruelles des quartiers tibétains, disparaissent sous les coups des bulldozers. Au carrefour des grandes artères bordées d'anonymes bâtiments neufs aux baies vitrées bleues, se dressent des monuments dorés, d'un kitch digne du réalisme socialiste version chinoise. Au point que les pèlerins, cette année visiblement moins nombreux que de coutume, errent désemparés dans une ville qu'ils ne reconnaissent plus, à la recherche des traces de leur propre identité en voie de disparition. Tout au long d'un périple de plus de 2 000 kilomètres dans la vallée du Kongpo, à l'est de Lhassa, avant des haltes dans les principales agglomérations du Tibet central, l'impression d'une camisole de force jetée sur l'ensemble du territoire n'a fait que se renforcer. Le schéma classique de

la colonisation est patent: invasion militaire, occupation de l'espace par une population allogène, négation des droits fondamentaux des autochtones, il suffit de regarder pour prendre la mesure de l'anéantissement programmé d'un peuple et de sa culture. Les séances de »rééducation dans les monastères en témoignent: à l'en-semble de la communauté monastique, des commissaires politiques nouvelle mouture enseignent la loi chinoise et l'histoire tibétaine version chinoise. Et gare à quiconque refuse de comprendre! Au terme de ces interminables sessions, il est requis de signer une déclaration en cinq points abjurant notamment le dalaï-lama comme chef spirituel, reconnaissant la validité de la nomination du panchen choisi par Pékin et admettant que le Tibet »appartient à la Chine. Vu à Drepung, l'une des trois grandes universités monastiques proches de Lhassa, par une matinée automnale ennuagée et lourde d'une tension palpable: dans le dédale des venelles, des pèlerins, motte de beurre de yack à la main, déa

mbulent d'un sanctuaire à l'autre. Leurs moulins à prière voltigent entre leurs mains expertes et leur cheminement est rythmé par un mantra. Le va-et-vient est incessant sur l'escalier abrupt menant à l'étage. D'ordinaire ouverte sur la cour intérieure, la rampe opposée est masquée par des tissus bariolés étendus commune des draps asséchés. Une marche militaire éclate soudain de ses tambours et trompettes vrillant le calme ambiant de ce lieu de recueillement, explicitement voué, d'après le permis d'exercer affiché au fronton du portail, à la prière et à la réflexion religieuse. Un pan soulevé confirme l'insolite: des civils et des officiers en uniforme vert gesticulent debout à une table, devant un groupe de moines assis par terre, visage fermé. Un poste de télévision crache le fond musical. L'équipe de rééducation est à pied d'oeuvre, à peine dissimulée aux yeux des pèlerins ou des visiteurs. Mais pas question de fixer l'image sur la pellicule : un cerbère veille qui se met à vociférer dès qu'il perçoit l'i

ntrus. A une cinquantaine de kilomètres de Lhassa, le célèbre monastère de Ganden demeure obstinément fermé aux Tibétains comme aux étrangers. Depuis les vifs incidents qui ont opposé à la mi-mai moines et forces de sécurité, un barrage militaire boucle le chemin des pèlerins dans la vallée, à un kilomètre de la grand-route. On ne passe pas, sauf à faire partie d'une équipe officielle de rééducation. Une cinquantaine de récalcitrants seraient toujours sous le verrous, comme une quinzaine d'irréductibles, du Tahihuinpo à Shigats, le sont depuis plus d'une année. Mais la suspicion s'est glissée: à plusieurs reprises, des voix amies nous ont chuchoté d'être sur nos gardes, il y a de faux moines et de faux mendiant infiltrés dans les lieux fréquentés par les étrangers. Et, parmi les moines, la confiance ne règne plus: on se méfie des nouveaux, la délation s'insinue et des indicateurs épauleraient la besogne aveugle des caméras vidéo et des micros installés bien en évidence dans les sanctuaires. Silence dans le

s monastères, on rééduque 1 Silence sur le toit du monde, on sinise! Ainsi, à Bayi, dans une vallée verdoyante à cinq cents kilomètres à l'est de Lhassa, sur la route du Sechouan. Naguère c'était un hameau appelé Panchen en tibétain. Aujourd'hui c'est une ville-garnison de 50 000 habitants, aux avant-postes de l'implantation des colons qui arrivent tous les jours par camions et autobus, pour s'installer au Tibet. Le dalaï-lama a beau réitérer, inlassablement, sa volonté d'entamer un dialogue avec Pékin dans les limites fixées par Deng Xiaoping lui-même, d'où vient que malgré la chaleur de l'accueil qui lui est réservé depuis le prix Nobel, on l'écoute, certes, mais on ne l'entende pas? Au Parlement européen à Strasbourg, devant les parlementaires à Paris, le leader exilé a répété: »Fondamentalement la question du Tibet est de nature politique. C'est une question de domination coloniale qui ne trouvera sa solution que par la négociation. Il y a cependant l'irrésistible attrait qu'exerce le mirage d'un march

é de plus d'un milliard de consommateurs. Que »pèsent à cette aune six millions de Tibétains, une culture anéantie, un peuple phagocyté et abandonné à son sort ? L'éthique semble être une valeur qui n'a plus cours aujourd'hui à la bourse du profil à tout-va, même si le dalaï-lama sourit en disant: »je n'attends de personne de placer le Tibet au-dessus des intérêts de son propre pays

 
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