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Partito Radicale Centro Radicale - 24 maggio 1997
Chine/Turkestan oriental

QUAND LA CHINA ECRASA LA REVOLTE DES OUIGHOURS DU XINJIANG

Selon des témoins rencontrés au Kazakhstan, le soulèvement de février 1997 aurait fait plusieurs centaines de victimes. Cette population de musulmans sunnites, soumise au pouvoir de Pékin depuis 1949, fait l'objet de brimades systématiques.

par Jean-Baptiste Naudet

Le Monde, vendredi 23 mai 1997

Les Ouïghours, un peuple musulman vivant dans la province chinoise du Xinjiang, se sont révoltés, en février, contre les autorités de Pékin. Selon des témoignages recueillis auprès de réfugiés ouïghours au Kazakhstan, la répression de ce soulèvement a fait plusieurs centaines de victimes. Le bilan officiel ne faisait état que de dix morts. Les émeutes ont éclaté à Yining, non loin de la frontière avec le Kazakhstan. En outre, trois hommes ont été condamnés à mort et exécutés publiquement, le 24 avril en Chine, pour leur rôle dans le soulèvement. Vingt-sept autres ont été condamnés à de lourdes peines de prison. Après le procès, des troubles ont de nouveau éclaté, faisant de nouvelles victimes à Urumqi, la capitale du Xinjiang. Pékin a longtemps attribué l'»agitation séparatiste ouïghour à des éléments isolés. Le président du Xinjiang, Ablait Abdureschit, a cependant admis, dimanche 11 mai, pour la première fois, l'existence au Xinjiang d'un »Parti d'Allah , militant pour l'indépendance.

Quand il s'est réveillé, ce matin glacial du 6 février 1997, Azat avait déjà de la colère dans son coeur. Mais ce jeune homme de vingt-cinq ans ne pensait pas que le sang allait couler ce jour-là dans sa ville natale de Koundja, aussi connue sous le nom chinois de Yining. Comme tous ses compatriotes, les Ouïghours de la »région autonome ouïghours du Xinjiang , »la nouvelle frontière de la Chine, Azat supportait de plus en plus difficilement les colons chinois, chaque jour plus nombreux. Les Hans, qui ne représentaient que 4 % de la population de la région dans les années 50, seraient aujourd'hui 37%. Azat était en colère, car il ne s'habituait pas à devenir peu à peu un étranger dans son propre pays. Au Xinjiang, le régime de Pékin ne donne pas de travail aux Ouïghours. Il interdit à ces musulmans sunnites d'avoir plus de deux enfants. Il les frappe régulièrement de nouveaux impôts, puis confisque leurs terres lorsqu'ils ne peuvent plus payer. Quand il ne les arrête pas ou ne les exécute pas pour »séparatis

me . C'est lorsqu'il a appris ce qui s'était passé la veille qu'Azat s'est vraiment mis en colère. »Quand nous avons entendu que trente à quarante Ouïghours avaient été arrêtés et torturés par la police chinoise, nous sommes sortis dans la rue , raconte Azat, en jetant des regards inquiets derrière lui. Azat est juste de passage à Alma-Ata, la capitale du Kazakhstan, frontalier du Xinjiang. Et il craint que les commerçants chinois ne le voient parler à des étrangers, qu'il ne doive payer cher pour ce témoignage quand il rentrera au Xinjiang. Azat doit faire vite. Alors, c'est l'un de ses amis de Koundja, réfugié au Kazakhstan après avoir été interrogé à plusieurs reprises par la police chinoise pour avoir suivi l'école coranique, qui raconte comment les troubles de Koundja ont commencé. »C'était la fête du ramadan, ex-plique ce jeune commerçant moustachu. Le 5 février, à la nuit tombée, selon la tradition, un groupe de jeunes Ouïghours s'est réuni dans une maison pour rompre le jeûne. Mais, depuis l'an derni

er, précise-t-il, les autorités chinoises ont interdit aux Ouïghours de se réunir. Tous ces jeunes ont été arrêtés par la police , poursuit-il. »La seconde cause de la révolte, explique le jeune moustachu, fut l'arrestation sanglante d'un jeune homme, Aberezak Kari. jeune leader musulman, Aberezak avait été condamné, il y a un an, à deux années de prison. Mais, à l'occasion du ramadan, son père avait réussi à le »racheter à la police chinoise, contre 6 000 yuans (environ 3 700 francs) une année de prison. Le 5 février, Aberezak venait d'être libéré; il était chez lui avec son père et ses frères quand quatre policiers chinois sont arrivés pour l'arrêter de nouveau.

L'ARMEE ETAIT EN POSITION

Son père s'est emporté. Un policier chinois a abattu le vieil homme. »Alors Aberezak et ses frères ont commencé à se battre avec les policiers chinois. Lui a été tué, mais ses frères ont tué deux des policiers. Les deux autres Chinois se sont enfuis , poursuit le jeune commerçant ouïghour. Puis les frères Kari se sont vengés: »Ils sont allés chez des Chinois à côté. Ils ont tué une famille de quatre personnes. La police chinoise est revenue en force: deux camions pleins de soldats. Les deux frères ont été tués. »Après ces deux incidents, conclut le commerçant ouïghour, les manifestations ont commencé. Azat le reconnait volontiers : il ne fut pas un chef de la révolte. »Après avoir entendu ce qui s'est passé, beaucoup de jeunes sont sortis dans la rue. J'étais dans le groupe, peut-être un millier de personnes, qui manifestait devant le commissariat de police de Koundja , raconte Azat. »Dans la ville, précise-t-il, il y avait d'autres groupes, des milliers de personnes, surtout des jeunes, peut-être dix mill

e au total. Quand les jeunes Ouïghours sont arrivés devant le commissariat, la police et l'armée chinoises étaient déjà en position. Et en armes. »Nous, nous avions une banderole où il était écrit: " Allah est grand et Mohamed est son prophète. " On criait: " Libérez nos camarades ! " Au début, précise Azat, je n'avais pas peur. DISPARITIONS »D'abord, poursuit Azat, les Chinois ont utilisé les canons à eau. J'étais trempé. En ce mois de février, il faisait entre moins 20 et moins 30 degrés dans cette partie de l'Asie centrale. Azat et ses amis se sont déshabillés pour ne pas geler sur place. A Alma-Ata, des témoins indirects des événements assurent que la police chinoise a, elle-même, dévêtu des manifestants, les a aspergés d'eau, et que beaucoup sont morts de froid. Ensuite, »les Chinois ont utilisé des gaz lacrymogènes , raconte le jeune homme. Devant l'obstination des Ouïghours, les forces chinoises ont ouvert le feu. »En l'air , précise Azat. Pourtant, accident ou bavure, une femme a été tuée par ball

es. »J'ai vu son corps, raconte Azat. Elle avait une quarantaine d'années. La police chinoise a chargé. et arrêté des manifestants après les avoir bat-tus. Malgré la peur qui s'emparait de lui, Azat a continué à manifester jusqu'au soir. »On criait: " Nous ne voulons pas être dominés par les Chinois ! " Beaucoup sont morts, tués par balles, en essayant d'échapper à l'arrestation. »J'ai vu douze cadavres, tous des Ouïghours, dont un ami. il courait. lis ont tiré. Ils l'ont tué , dit Azat, qui pense que les émeutes ont fait au total près de »trois cents morts. Personne ne sait exactement. Beaucoup de ceux qui ont été arrêtés sont toujours portés disparus. La police chinoise a restitué quelques cadavres. »A condition qu'ils soient enterrés immédiatement , précisent les Ouïghours à Alma-Ata. Certains sont morts sous la torture. L'une d'elle consiste à enfermer les prisonniers dans des cellules avec de l'eau glaciale jusqu'aux genoux, selon des témoignages indirects. D'autres ont été relâchés, souvent aprè

s avoir été torturés. »J'ai moi-même vu des gens libérés qui avaient les mains et les jambes cassés à coups de barre de fer , assure Azat. Plusieurs dizaines ont été condamnés à de longues peines de prison, d'autres à mort. Une dizaine de jeunes Ouïghours de Koundja ont déjà été exécutés, dont trois fin avril. A la nuit tombante, Azat est rentré chez lui. »Mes parents ne voulaient plus que je sorte. Ils sont contre les Chinois, mais ils sont vieux , explique le jeune homme. Et puis, ajoute-t-il, comme »on ne pouvait rien faire contre la police et leurs armes, nous avons essayé d'exécuter des Chinois de notre quartier. En les frappant, car nous n'avons pas d'armes. Moi-même, dit-il, j'ai tabassé des Chinois. Soudain, Azat a honte. Il se justifie : »Ils nous ont obligés. Ils avaient tué nos parents, nos amis. Finalement, il admet: »Nous en avons tué quelques-uns. Après un silence, il ajoute-: »J'en ai tué un. Malgré la peur, les morts, la répression qui s'abat sur les Ouïghours, Azat assure qu'il est déter

miné à poursuivre la lutte de libération du Ouïghouristan. »Je suis prêt à recommencer, dit-il. Nous sommes tous prêts. Toujours.

 
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