Contre Taiwan, Pékin montre les dents

Imposant défilé militaire pour les répétitions de la parade du 50e anniversaire du régime communiste.

Par ANNE LOUSSOUARN

Libération, le mercredi 18 août 1999

Les répétitions de la parade militaire prévue pour le 50e anniversaire du régime communiste le 1er octobre prochain ont permis à Pékin de faire montre de sa force lundi soir dans la capitale chinoise, ou l'on n'avait pas entendu le grondement des chars depuis la répression du mouvement pro-démocratique il y a dix ans. Une procession de tanks, de missiles, de camions radars a défilé pendant trois heures sur l'avenue Changan qui traverse la place Tiananmen, créant d'énormes embouteillages dans le centre- ville. Le déploiement de force du 1er octobre est certes prévu depuis longtemps, mais il tombe à point nommé pour appuyer l'intensification des menaces d'intervention militaire contre l'île nationaliste.

Fuites.

La pression psychologique sur l'île que Pékin considère comme une province renégate n'a pas faibli depuis les propos jugés séparatistes du président taïwanais Lee Teng-Hui, le mois dernier. Ces derniers jours, la presse de Hong-kong se fait l'écho des éditoriaux au vitriol de la presse chinoise en publiant des fuites sur l'intensification des préparatifs militaires. Le Quotidien du Peuple, organe du parti, annonçait ainsi que la marine chinoise, en exercice dans le sud de la mer de Chine, ne resterait pas les bras croisés devant toute tentative séparatiste, qui s'achèverait en bain de sang en s'écrasant contre ce mur de fer indestructible, métaphore habituelle de la propagande pour qualifier l'armée chinoise. Quelques jours auparavant, le Global Times étalait en première page la photo montage d'une confrontation entre un Sukhoi 27 de l'armée chinoise et un Mirage 2 000 taïwanais. Dimanche, le Sunday Morning Post de Hong-kong, avançait que les troupes chinoises du territoire avaient été placées en troisième n

iveau d'alerte, signifiant l'annulation des congés pour les troupes et l'état d'alerte permanente pour les navires militaires.

Les analystes hésitent toujours sur la signification des rodomontades martiales de la Chine. Le gouvernement taïwanais accuse en effet Pékin d'utiliser la presse de Hong-kong pour répandre des rumeurs et que rien d'anormal n'a pour l'instant été détecté.

Tâter le terrain.

Les autorités chinoises semblent soigneusement distiller certaines informations - toutes invérifiables - pour contrôler la pression dans le détroit de Formose, tout en tâtant le terrain diplomatique pour évaluer les conséquences diplomatiques d'une action militaire. Plusieurs experts américains ont ainsi confié avoir été questionnés par des officiels et militaires chinois surles réactions possibles de l'administration américaine.

Réchauffement. Les deux pays sont toujours en froid depuis le bombardement de l'ambassade de Chine à Belgrade en mai dernier. Mais pour la première fois depuis plus de deux mois, un bateau de l'armée américaine vient de recevoir le feu vert pour faire escale à Hong-kong le mois prochain, deux navires militaires se voyant en même temps refuser l'accès au port du territoire. Une escale qui aura lieu quelques jours avant le sommet entre Bill Clinton et Jiang Zemin, en marge du sommet de l'Apec (le Forum économique Asie-Pacifique), les 12 et 13 septembre en Nouvelle-Zélande.