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Brisbois Marc - 16 luglio 1991
QUELLES INSTITUTIONS POUR L'APRES-COMMUNISME ?

LA COMMUNAUTE A DOUZE DOIT ETRE LE NOYAU DE DEMAIN

(Le Monde, mercredi 10 juillet 1991)

Par Jacques LESOURNE

Les grandes ruptures débouchent toujours sur des périodes de confusion. Il en fut ainsi au lendemain de 1945, à l'occasion des débats sur l'avenir de l'Allemagne, la défense de l'Europe, la décolonisation, le choix entre plan et marché. La diplomatie française n'y fût pas toujours à son avantage et, à l'exception de la démarche historique de Robert Schuman, nombre de ses initiatives d'alors feraient aujourd'hui sourire, si le souvenir ne s'en était perdu.

Un phénomène analogue se reproduit sous nos yeux. L'effondrement du totalitarisme soviétique, la chute du communisme en Europe centrale, l'unification de l'Allemagne, obligent à repenser l'organisation de l'Europe au sein d'un monde dont l'économie se globalise et qui connaît à la fois une interdépendance croissante et des menaces nouvelles. La confusion est à son apogée. Elle triomphe dans les débats sur l'existence et le rôle des institutions européennes: la CEE, l'OTAN, L'AELE, l'UEO, l'EEE, la CSCE, la Confédération, le Conseil de l'Europe. Qui, à part le spécialiste, est aujourd'hui capable de décrypter cette salade de sigles et de noms?

De quelles institutions avons-nous besoin pour l'après-communisme?

L'analyse ne peut partir que de la Communauté, car c'est elle qui tisse entre ses membres la trame la plus dense. Or elle se trouve aujourd'hui confrontée aux trois problèmes de l'approfondissement, de l'extension et de la sécurité.

Il suffit de considérer les grands chantiers de l'approfondissement - le marché intérieur, l'Union économique et monétaire, l'Europe dite politique - pour constater que l'achèvement même imparfait de ces chantiers suffira à faire de la Communauté un être bien différent d'une zone de libre-échange.

A terme, la politique économique sera cogérée par les gouvernements, et les structures productives n'auront de cohérence qu'à l'échelle communautaire. Comment ne pas voir qu'un tel abandon de souveraineté, au demeurant souhaitable, risque de déboucher sur des conflits violents si plusieurs conditions ne sont pas remplies:

- La première est un accroissement des pouvoirs du Parlement européen (sinon gare à la rébellion des citoyens contre les "eurocrates");

- La deuxième est de s'assurer que tout grand pays conserve une influence suffisante au sein de la Communauté pour que les compromis ne soient pas trop souvent contraires aux intérêts nationaux (d'où la nécessité d'une prudence extrême à l'égard d'une extension);

- La troisième est la prise en charge des problèmes de sécurité dans le cadre communautaire, car l'économie et la défense sont trop intimement liées pour être convenablement traitées dans des institutions distinctes. L'Europe deviendrait schizophrène.

Trois groupes de pays sont aujourd'hui candidats à une entrée dans la Communauté: les anciens membres de l'Association européenne de libre échange (AELE), et notamment la Suède et l'Autriche, certains pays d'Europe centrale comme la Pologne, la Tchécoslovaquie et la Hongrie, et enfin la Turquie. Les arguments en faveur d'une extension de la Communauté ne sont pas sans valeur: Vienne et Prague appartiennent à la civilisation européenne tout autant que Londres et Paris; l'admission des Etats d'Europe centrale consoliderait la démocratie dans cette région du monde. Mais ces raisonnements se heurtent à deux objections de taille:

- La machine communautaire, qui assimile tout doucement le Royaume-Uni, ne résisterait pas à l'alourdissement résultant de l'augmentation du nombre des Etats membres;

- La multiplication, au sein de la Communauté, des Etats membres n'appartenant pas à l'OTAN oblige à dissocier sécurité et intégration économique.

Aussi la conséquence la plus probable d'une extension massive serait-elle à terme la régression de la Communauté au niveau d'une zone de libre-échange, prospère certes, mais incapable de peser sur les problèmes du monde ou de faire face à la montée de nouvelles menaces extérieurs. Paradoxalement, dans dix ou vingt ans le résultat serait sans doute, pour les actuels candidats à l'accession, plus défavorable que le statu quo, car une Communauté forte est pour eux la meilleur des garanties.

Reste le défi de la sécurité. Les transformations de l'Europe de l'Est, la montée des incertitudes en Afrique et en Asie occidentale l'ont rendu plus diffus, plus multiforme, moins obsédant. Pourtant, il n'y auraient pas de pire erreur que de le sous-estimer. L'avenir de l'Union soviétique constitue un énorme point d'interrogation, la puissance nucléaire de ce pays n'est nullement atteinte, une prolifération des armes de destruction à longue portée paraît hautement probable, des révolutions et des guerres continueront à éclater dans des régions où l'Europe conserve des intérêts vitaux. Dès lors, deux constatations s'imposent: les problèmes de défense ne sont plus à l'échelle d'un seul Etat. Ils doivent être traités au niveau communautaire, la France et le Royaume-Uni conservant toutefois la maîtrise absolue de leur armement nucléaire; les Etats-Unis doivent rester associés à la défense de l'Europe, mais la réduction de leurs forces sur le continent et le rôle accru de la Communauté en matière de sécurité imp

liquent une transformation de l'OTAN.

Dès lors, combien d'institutions sont nécessaires à l'Europe de l'après-communisme? Quatre, et quatre seulement:

- Une Communauté restreinte à douze avec des liens plus intimes entre les membres et un champ d'action englobant les questions de sécurité;

- Une Confédération plus large réunissant la Communauté, l'AELE et les pays d'Europe centrale qui le souhaitent, mais excluant l'URSS (en effet, cette dernière, qu'on le veuille ou non, a un avenir trop incertain et conserve une puissance trop grande pour être admise dans cet ensemble);

- Une "maison commune" européenne, la CSCE, comprenant, en plus des Etats européens, l'URSS d'un coté et les Etats-Unis et le Canada de l'autre;

- Une organisation militaire associant l'Europe et l'Amérique du Nord, c'est-à-dire une OTAN rénovée avec un pilier européen représenté à la fois par la Communauté et ses Etats membres, dont la France.

QUATRE INSTITUTIONS SUFFISENT

Qu'il faille, ici et là, ajouter à cette architecture quelques motifs décoratifs pour apaiser la susceptibilité des uns et des autres est une évidence, mais il est plus facile de raisonner si l'on s'en tient à l'essentiel.

Force est alors de constater que la politique extérieur française, autant qu'on puisse en juger, ne brille pas par la cohérence (ou, du moins, la clarté). Sur trois points fondamentaux, son attitude est ambiguë.

Comment peut-elle militer pour l'approfondissement de la Communauté sans être en faveur d'un accroissement des pouvoirs du Parlement européen?

Comment peut-elle être contre l'extension de la Communauté et ne pas proposer aux candidats à l'entrée dans cette Communauté une Confédération à laquelle l'URSS ne serait pas conviée, cette dernière ne participant qu'à la CSCE, où son influence est contrebalancée par la présence des Etats-Unis et du Canada?

Comment peut-elle souhaiter que la sécurité soit l'un des piliers de la Communauté sans être prête à examiner, dans des conditions à définir, une participation de la France au pôle européen de l'OTAN?

Le moment semble venu de mettre fin à ces obscurités. Sinon, le risque est grand de voir émerger sur les ruines du communisme une Europe aux structures si byzantines que l'intégration économique finira par se dissoudre en une zone de libre échange et que la volonté politique s'épuisera dans les mouvements browniens de nations sans prise réelle sur les événements.

 
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