ALAIN JUPPE SUR L'EX-YOUGOSLAVIE EST REJETE A SARAJEVO

(Le Monde, 3-2-1995)

Les Etats-Unis ont montré leur réticence, mercredi 1er février, à l'égard de la proposition française de réunir une conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie (Le Monde du 1er février). Mettant en doute les chances de succès d'un tel sommet, alors qu'une proposition similaire à celle présentée par Alain Juppé avait déjà été faite dans le passé, Washington est cependant convenu de la nécessité d'entreprendre » quelque chose pour faire avancer le processus . Le département d'Etat insiste également, en cas de tenue d'une telle conférence, sur la nécessité d'en fixer clairement les objectifs et de s'en tenir au plan du

» groupe de contact des grandes puissances qui laisserait aux Serbes 49 % du territoire de la Bosnie-Herzégovine, alors qu'ils en occupent actuellement 70 %.

Cette précision reflète les craintes de certains responsables américains de voir, lors d'un tel sommet, les Serbes de Bosnie placés sur le même pied que les Musulmans et les Croates bosniaques. » Le moment n'est pas venu pour une réunion à haut niveau , a estimé un haut responsable du département d'Etat américain, de passage mercredi à Paris.

En tournée aux Etats-Unis, le ministre des affaires étrangères bosniaque, Haris Silajdzic, a, quant à lui, rejeté le » plan Juppé . » Nous n'avons pas besoin d'autres conférences de relations publiques , a déclaré M. Silajdzic, qui tentait de convaincre les Américains de fixer un ultimatum aux Serbes en s'engageant à lever, le 1er mai, l'embargo sur les armes au profit de l'armée bosniaque si, d'ici là, les Serbes n'acceptaient pas le plan de paix.

La nécessité d'une percée diplomatique, évoquée dans le Monde du ler février par Alain Juppé, se fait, pourtant, de plus en plus pressante. En effet, les autorités de Sarajevo ont menacé, mercredi, de briser le cessez-le-feu si l'ONU n'intervenait pas rapidement dans la poche musulmane de Bihac pour faire cesser les attaques serbes, chaque jour plus intenses. Enfin, les Serbes de Croatie ont pour leur part annoncé le » gel du dialogue avec Zagreb si la Croatie ne renonçait pas à son projet de renvoyer les » casques bleus fin mars.

(AFP, Reuter.)