par Milan DRAGOVIC BELGRADE, 8 juin (AFP) - L'incertitude continuait de planer jeudi sur les chances de voir s'accélérer la libération des 145 soldats de l'ONU que les Serbes de Bosnie détiennent encore après la remise la veille à la Serbie de 111 Casques bleus et observateurs militaires de l'ONU.
Le président serbe Slobodan Milosevic s'est fait fort d'obtenir une évacuation rapide via la Serbie de tous les otages restant aux mains des Serbes bosniaques, assure-t-on depuis plusieurs jours de sources proches du pouvoir.
Son émissaire Jovica Stanisic, le chef de la police secrète de Serbie qui conduit l'opération, a affirmé mercredi que ceux-ci seraient relâchés "au cours des prochains jours".
Les dirigeants serbes de Bosnie "se sont montrés disposés à résoudre le problème", a-t-il dit à l'issue d'une nouvelle mission à Pale, fief des Serbes bosniaques près de Sarajevo.
Il reste que l'opération se déroule par à-coups, avec des difficultés évidentes, beaucoup de tiraillements et faux-départs.
L'annonce par l'agence indépendante yougoslave BETA, citant des sources non officielles serbes bosniaques, qu'un nouveau groupe de 40 à 50 Casques bleus pourrait être libéré dansla soirée de mercredi, ne s'est pas réalisée.
Seuls trois autres officiers de la FORPRONU --un Français, un Espagnol et un Brésilien-- ont pu être pris en charge par M. Stanisic, après l'arrivée en Serbie d'un contingent de 108 Casques bleus libérés dans la nuit de mardi à mercredi.
Dès le 2 juin, après la libération fortement médiatisée d'un premier groupe de 121 Casques bleus, M. Stanisic avait souligné le caractère délicat de l'opération.
D'abord parce que les otages sont repartis en petits groupes dispersés sur une vaste étendue de territoire. Ensuite parce que leur regroupement est ralenti par le fait que plusieurs axes routiers sont coupés en raison des hostilités qui se poursuivent sur le terrain. Enfin, l'émissaire de M. Milosevic et l'unité de police spéciale qui l'assiste se heurtent manifestement à des résistances de la part de chefs militaires locaux.
M. Stanisic l'a reconnu à mots couverts. "Notre mission traite avec les organes officiels (serbes bosniaques) et nous ne voulons pas nous ingérer dans leurs affaires intérieures", a-t-il déclaré la semaine dernière en expliquant "l'extrême complexité" de sa tâche.
"Conscients du fait qu'ils se sont mis la corde au cou, les dirigeants de Pale ont donné à entendre qu'ils souhaitaient se débarrrasser des otages afin de s'épargner des représailles (occidentales) qui pourraient intervenir à tout moment", estimait jeudi Ranko Petkovic, un politologue proche du pouvoir, cité par le quotidien Novosti.
Un spécialiste yougoslave des affaires militaires, interrogé par l'AFP, notait pour sa part que "les pressions exercées sur Radovan Karazdic (le numéro-un serbe bosniaque) par la communauté internationale comme par Belgrade sont telles qu'il aurait déjà libéré tous les otages si cela ne dépendait que de lui".
"Mais convaincre Karadzic est une chose, amener à la raison les extrémistes locaux, qui n'ont plus rien à perdre, en est une autre", selon cette source qui a tenu à garder l'anonymat.