LE PRESIDENT DU CONSEIL AFFAIRES ETRANGERES, M. SOLANA, INSISTE SUR L'ENGAGEMENT MILITAIRE DE L'UNION - LES DEPUTES ADOPTENT UNE DECLARATION EXIGEANT UNE REPONSE AUX ATTAQUES SERBES
(Agence Europe, 27 juillet 1995)
Le Président du Conseil de l'Union, Javier Solana, a fait, le 26 juillet, le point sur l'escalade de ces derniers jours dans le conflit bosniaque, devant les membres de la commission des Affaires étrangères et de la sécurité du Parlement européen, en réunion extraordinaire conjointe avec la délégation pour les relations avec l'Europe du Sud-Est. M. Solana, qui a dénoncé "les actes de barbarie" commis en Bosnie "dont les coupables devront, tôt ou tard, répondre", a affirmé que l'objectif de l'Union reste une solution politico-diplomatique du conflit, avec toute intervention nécessaire sur le terrain ainsi que la poursuite de l'aide humanitaire. Il a toutefois ajouté que l'accord politique (qui doit être soutenu, a-t-il dit, par la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine de la part du président Milosevic) "ne peut pas être obtenu à tout prix, sous la menace, mais doit l'être sur la base de principes de justice". M. Solana a exclu que la Forpronu puisse devenir une "force belligérante", tout en soulignant l'imp
ortance de son redéploiement sur le terrain et d'une plus grande efficacité de ses interventions, sans se cacher qu'il y a "des pays qui ont des intérêts dans les Balkans qui font obstacle à l'usage de la, force". Tout en déclarant que l'Union est contraire à un retrait de la Forpronu, M. Solana a jugé "difficile" à réaliser une augmentation rapide des troupes sur le terrain. Par ailleurs, il a confirmé qu'on privilégie toujours les attaques aériennes et n'a pas exclu un plus grand engagement militaire, à l'avenir, de l'Allemagne et de l'Italie.
Lors du débat, les parlementaires se sont dits en général favorables à un engagement militaire plus important de l'Union dans le conflit, mais M. Solana a fait remarquer les risques "d'avoir des otages et des victimes parmi les forces déployées sur le terrain, ainsi que des victimes parmi les civils engagés dans l'aide humanitaires. Suite à l'intervention du socialiste français Michel Rocard, qui a évoqué le danger d'une crise dans les relations de l'Union avec le monde musulman et la nécessité de justifier devant l'opinion publique les risques qu'entraîne une action militaire plus musclée par "un intérêt géopolitique général", M. Solana a déclaré que "L'Union n'a rien contre une communauté musulmane qui a vécu jusqu'ici en Europe dans un climat de tolérance".
Quant au socialiste espagnol Jose Luis Mendiluce (qui a travaillé pour le Haut Commissariat aux Réfugiés de l'ONU) a affirmé que, dans la négociation d'un règlement pacifique, il ne faudra pas "oublier les principes", et il faudra veiller à éviter "de nouveaux conflits potentiels".
Sur proposition de Marco Pannella (Alliance Radicale, italien), qui a suggéré d'élargir la négociation avec le président serbe Milosevic à des dossiers tels que le Kosovo et la situation des Serbes de Croatie, la commission des Affaires étrangères a enfin approuvé à une large majorité une déclaration de son président,Abel Matutes (PPE, espagnol), demandant notamment "une réponse militaire, avec toute la force nécessaire" à toute attaque venant des Serbes de Bosnie, qu'il s'agisse d'actions de conquête de territoires, d'actions menées contre la population civile ou de "toute autre action ayant pour objectif d'empêcher l'acheminement et la distribution de l'aide humanitaire", et cela "dans toutes parties du territoire de la Bosnie-Herzégovine et des zones protégées".
Réunion du Groupe de contact, propositions du Conseil de l'OTAN à l'ONU.
Par ailleurs, le Groupe de contact sur la Bosnie (Russie, Etats-Unis, France, Allemagne et Royaume-Uni) a eu une nouvelle discussion, ce mercredi à Londres, avec Carl Bildt, Médiateur de l'Union européenne pour l'ex-Yougoslavie, au sujet des perspectives de reconnaissance de la Bosnie par Belgrade. Carl Bildt avait indiqué lors de la réunion élargie du Groupe, vendredi dernier à Londres, que le président Milosevic était prêt à reconnaître la Bosnie en échange d'une levée partielle des sanctions contre la Serbie, mais aucune décision n'avait été prise.
A Bruxelles, dans la nuit de mardi à mercredi, le Conseil de l'OTAN est apparemment parvenu à un accord sur une gamme de ripostes aériennes en Bosnie en cas d'attaques contre Gorazde (qui est explicitement visée par cet accord, qui pourra cependant s'appliquer aussi à Sarajevo, Tuzla et Bihac). L'accord que l'OTAN proposerait à l'ONU impliquerait une modification du système de "double clé" de commandement (ONU et OTAN). Ainsi: - en cas de campagne de raids aériens élargis, la décision de riposter serait prise comme aujourd'hui par l'ONU, au plus haut niveau; - en cas de frappes limitées, elle pourrait être prise par le commandant des Casques bleus pour l'ex-Yougoslavie ou par celui pour la Bosnie, sans besoin de l'aval des autorités civiles locales de l'ONU; - en cas de soutien aérien rapproché aux Casques bleus, le commandant du bataillon ou du secteur concerné pourra décider seul, en informant sa hiérarchie.
A New York, M. Boutros-Ghali a souligné l'importance d'un renforcement de la présence de la Forpronu 'au sol" en Bosnie, afin que puisse se poursuivre l'assistance humanitaire aux réfugiés. Par ailleurs, son porte-parole M. Fawzi a dit que les Nations Unies continueraient à négocier avec "toutes les parties", même après les mandats d'arrêt lancés par le Tribunal international de La Haye contre les leaders serbo-bosniaques Karadzic et Mladic. "Lorsque vous êtes en situation de guerre, vous négociez avec toutes les parties", a-t-il déclaré.
Enfin, le Sénat américain a reporté encore une fois à ce mercredi, son vote sur la levée de l'embargo sur les livraisons d'armes en ex-Yougoslavie.