DECLARATION DE VOTE D'OLIVIER DUPUIS SUR LE RAPPORT DE M. LEHNE SUR LE BLANCHIMENT DE L'ARGENT
Monsieur le Président, chers collègues,
même si le rapporteur, Monsieur LEHNE, apporte certaines améliorations eu égard à ce premier rapport de la Commission, elles sont loin d'être suffisantes vu l'ampleur du problème.
Contrairement au rapporteur, je considère qu'un rapport "énumératif", "non-chiffré" et de surcroit "tronqué", un rapport qui ne fâche donc personne, ne peut constituer un bon rapport. En effet, il n'y est fait nullement mention de données chiffrées, ni sur les filières classiques, ni sur les nouvelles filières du blanchiment, alors que l'on peut globalement évaluer à 500 milliards d'écus le blanchiment des capitaux.
Plus grave, le rapport donne un blanc seing aux douze Etats membres signataires de la directive. La réalité est pourtant toute autre. Comment expliquer que les banques de Guernesey, dépendance de la couronne britannique, île naguère connue pour son cheptel bovin, soient aujourd'hui assises sur un trésor de 27 milliards de livres sterling ? Comment expliquer de la même façon que le gouvernement des Pays-Bas ait ratifié une convention fiscale, unique en son genre, avec les dépendances des Antilles néerlandaises ? Je ne m'étendrai pas sur la législation fiscale et bancaire du Grand-Duché de Luxembourg. Je m'imagine déjà la ratification "formelle" par l'Autriche de la directive 91/308. Comment expliquer en effet que cet Etat, peuplé de huit millions d'âmes, puisse comptabiliser sur son sol plus de 20 millions de livrets d'épargne anonymes ?
Penser faire preuve de fermeté en ratifiant de telles directives et continuer en même temps à "laver son linge sale en famille", être le gendarme sans jamais apparaître aux yeux de l'opinion publique comme le voleur ... quelle hypocrisie ... Faudra-t-il attendre qu'un de nos chefs d'Etat soit compromis dans de sombres histoires de blanchiment de capitaux liés à un quelconque trafic d'armes ou de drogues, faudra-t-il un "Monsieur Samper" européen, pour ramener à la raison nos gouvernements ?
Commençons par aller à la racine du problème ! Commençons par réglementer et légaliser toutes les drogues, tout de suite !
Dans l'attente mon groupe s'abstiendra.
Je vous remercie Monsieur le Président.
(Strasbourg, le 20 juin 1996)