PROPOSITTON D'OCTROI DU PRIX SAKHAROV 1996
PRIX A LA LIBERTE DE PENSEE
DR LEONEL MOREJON ALMAGRO, DU "CONCILIO CUBANO"
1. Le "Concilio Cubano"
2. Leonel Morejon Almagro
3. Prix Sakharov
1. LE "CONCILIO CUBANO"
CONCILIO CUBANO est une coalition composée d'environ 140 groupements non-officiels, constituée le 10 octobre 1995. Ces groupements sont de nature très variée: avocats, économistes, femmes, pacifistes, écologistes, défenseurs des droits de l'homme, journalistes, syndicalistes et jeunes.
Plusieurs dissidents du régime font partie du "Consilio Cubano", comme Oswaldo Payà Sardinas (Movimiento Cristiano de Liberacion), Elizardo Sanchez Santa Cruz ("Comité Cubano de Derechos Humanos y Reconciliacion Nacional") et Gustavo Arco Bergnes ("Comité Cubano pro Derechos Humanos").
Chaque groupement conserve son identité. Le "Concilio Cubano" garantit le pluralisme démocratique et a comme but une stratégie commune de défense des droits de l'homme et d'actions non-violentes, visant à obtenir un degré plus élevé de participation des citoyens, le respect de la Constitution et des lois cubaines.
En décembre 1995, "Concilio Cubano" demanda l'autorisation officielle pour l'organisation d'une conférence du 24 au 29 février 1996, sollicitant la médiation des Nations Unies et du Cardinal Jaime Ortega. Aucune réponse ne fut donnée par les autorités.
Depuis fin 1995, les personnes les plus actives faisant partie de ces organisations non-officielles ont subi des intimidations fréquentes, ont perdu leur poste de travail et ont vécu des situations très difficiles allant jusqu'à l'emprisonnement. En outre, les autorités cubaines ont procédé à des "infiltrations" tendant à diviser les membres du "Concilio Cubano".
Bien que les autorités cubaines n'aient pas interdit formellement ces groupements, elles n'ont jamais permis une reconnaissance quelconque de leur existence. Entre le 15 et le 24 février 1996 et malgré les intentions pacifiques et pacifistes des membres du "Concilio Cubano" qui avaient décidé de reporter la conférence, les autorités ont pris des mesures contre la coalition en accusant individuellement plusieurs membres emblématiques à La Havane et dans d'autres villes du pays. Ces événements ont eu lieu le même mois que la destruction de deux avions de Hermanos al Rescate sous les tirs des MIGs le 24 février 1996 (date prévue pour le début de la conférence).
Les accusations portaient sur des délits tels que l'"association illicite", "propagande ennemie", "danger social" et, le cas échéant, terrorisme et/ou traffic de drogues, notamment pour les personnes qui continuaient leurs activités en faveur de la reconnaissance officielle du "Concilio".
La plupart des membres du "Concilio Cubano" emprisonnés ont été relâchés plusieurs heures ou jours après leur détention, à l'exception de quatre personnes (dont Leonel Morejon Almagro).
Amnesty International a élaboré un document intitulé "Cuba: offensive du Gouvernement contre la dissidence" (AI-AMR 25/14/96/s) publié en avril 1996, considérant ces dissidents détenus comme des prisonniers politiques pour des raisons de conscience.
2. BIOGRAPHIE DU DR LEONEL MOREJON ALMAGRO, DELEGUE NATIONAL DU "CONCILIO CUBANO"
Le Dr. Leonel Morejon Almagro, avocat de 35 ans, a fondé le Mouvement Ecologiste et Pacifiste NATURPAZ. En octobre 1995, il a été nommé délégué national du "Concilio Cubano". Depuis le 15 février 1995, le Dr. Morejon est emprisonné suite à la répression du "Concilio Cubano" par les autorités cubaines. En 1991, le Dr. Morajon avait été emprisonné suite à une manifestation organisée par NATURPAZ devant le bureau de l'UNESCO à la Havane pour protester contre l'invasion du Koweit par l'Irak.
En décembre 1986, il avait présenté la documentation nécessaire, conformément à la législation cubaine, afin d'inscrire son organisation (NATURPAZ) au registre correspondant. En dépit des 3.000 signatures jointes en appui de cette iniatitive, le Ministère de la Justice de Cuba avait refusé l'inscription sous prétexte qu'une organisation ayant les mêmes fins existait déjà.
Ce qui est paradoxal, c'est que le Dr. Morejon Almagro ait reçu la réponse (négative) officielle dix ans après la demande et au moment où il se configurait comme l'un des plus importants dirigeants du "Concilio Cubano".
Le 14 novembre 1995, un mois après la constitution du "Concilio Cubano", il fut emprisonné pendant 12 heures, accusé d'être le responsable de plusieurs menaces d'alerte à la bombe contre les dépendances du Gouvernement, ainsi que d'association illicite.
Le 10 février 1995, le lendemain d'une visite du commissaire Marin à la Havane, la Dr. Morejon fut élu délégué national du "Concilio Cubano" avec quatre vice-délégués (Mercedes Paradas Antunez, Héctor Patacio Ruiz, Lazaro Gonzalez Valdés et Reinaldo Cosano Alén).
Le 15 février 1996, le Département de la Sécurité de l'Etat effectue une opération policière contre les membres de "Concilio Cubano". Depuis ce jour, le Dr. Morejon Almagro se trouve en prison et les autorités ont empêché les diplomates à La Havane d'avoir des contacts avec lui, considérant ceux-ci comme des ingérences dans les affaires intérieure du pays.
Leonel Morejon Almagro fut condamné quelques jours après à six mois de prison ferme. Accusé, entre autres, de "résistance à l'autorité", il commença une grève de la faim après sa détention. Suite à un appel de sa sentence, il fut condamné à 15 mois d'emprisonnement. Il a été transféré de la prison "Villa Maristas" à la prison de "Valle Grande", où il se trouve à ce jour.
Leonel Morejon Almagro, déclaré prisonnier de conscience par Amnisty International, représente une nouvelle génération de cubains qui s'oppose au totalitarisme et qui aspire, par des moyens pacifiques, à la démocratie et au respect des droits de l'homme.
3. PRIX SAKHAROV
D'après Amnesty International, il existe plus ou moins 600 prisonniers de conscience à Cuba qui ont essayé d'exercer, de façon pacifique, leurs droits à la liberté d'expression, d'association, de réunion et de circulation. Ils ont été accusés de délits graves contre la sécurité de l'Etat, comme terrorisme, sabotage et piraterie. Amnesty International estime que les procès judiciares n'ont pas eu les garanties minimales relatives aux droits de défense et que plusieurs détenus ont reçu des mauvais traitements, voire des tortures.
Compte tenu de son caractère pacifiste, représentatif et démocratique, le "Concilio Cubano" mérite l'octroi du Prix Sakharov en tant que collectivité.
Si le Prix doit être octroyé à une personne physique, considérant que le Dr. Leonel Morejon Almagro, en tant que délégué national du "Concilio Cubano", représente une majorité de la de la dissidence de Cuba, il mérite ce Prix, au nom du "Concilio Cubano", pour sa lutte en défense des droits de l'homme.