Proposition de résolution
sur l'arrestation de militants des droits de l'homme en Mauritanie
déposée par Pierre Pradier, Jean-François Hory et Olivier Dupuis
au nom du groupe ARE
selon l'article 47 du réglement
Le Parlement Européen
A- Rappelant qu'à l'occasion du passage du rallye Paris-Dakar en Mauritanie, une équipe de journalistes a réalisé un reportage télévisé dénoncant la persistance de la pratique de l'esclavage dans ce pays,
B- Considérant qu'à la suite de la diffusion le 15 janvier dernier de ce reportage sur une chaine française de télévision relayée en Mauritanie par Canal France International, trois militants mauritaniens anti-esclavagistes ont été arrêtés et sont aujourd'hui accusés de "création et appartenance à association non autorisée" et "propagation de fausses nouvelles à l'étranger à des fins politiques inavouables",
C- Rappelant que les deux organisations dont font partie les personnes arrêtées, SOS Esclavage et l'Association Mauritanienne des Droits de l'homme" ne sont pas agrées par les autorités mauritaniennes mais qu'elles jouissent du statut d'observateurs auprès de la Commission Africaine des Droits de l'homme et des Peuples de l'Organisation de l'Unité Africaine,
D- Notant que seul le Président de l'ONG SOS Esclavage, M. Boubacar Messaoud, est apparu dans ce reportage,
E- Rappelant que les militants arrêtés, M. Boubacar Messaoud, Président de l'ONG SOS Esclavage, l'avocat Me Brahim Ould Ebetti et du Président de l'Association Mauritanienne des Droits de l'Homme (AMDH), M. Cheikh Saad Bouh Camara, ont été déférés devant le tribunal de Nouakchott le 8 février et que le Procureur Général a requis contre eux une peine de trois ans de prison ferme,
F- Rappelant que les autorités mauritaniennes ont également engagé des poursuites contre un militant de l'ONG SOS Esclavage installé en France, M. Abdel Nasser Ould Yassa, à qui elles reprochent d'avoir "porté atteinte à l'image du pays" dans une interview accordée à Radio-France et à "La voix de l'Amérique",
G- Rappelant que trois femmes ayant témoigné dans le documentaire sont activement recherchées par les services de sécurité,
H- Rappelant que lors de l'une des manifestations de soutien à ces militants des droits de l'homme, le jeudi 5 février dernier, que les autorités mauritaniennes avaient interdite, plusieurs autres personnes ont été arrêtées dont la vice Présidente de l'AMDH, Me Fatimata M'Baye et des militants d'autres organisations de défense des droits de l'homme,
I- Considérant que l'esclavage a été officiellement aboli par une ordonnance de 1983, et que les autorités mauritaniennes affirment qu'il n'y a plus d'esclaves en Mauritanie,
J- Rappelant que ces arrestations interviennent alors qu'au niveau national, le climat est très tendu avec les médias, puisque le journal hebdomadaire "Mauritanie Nouvelles" a a été interdit pendant les trois mois qui ont précédé l'élection présidentielle du 12 décembre dernier et que le tribunal de Nouakchott vient de prolonger son interdiction pour une période équivalente et relevant que l'autre hebdomadaire "Calame" a été censuré deux fois depuis le début de l'année 1998,
K- Estimant que l'habillage judiciaire cache mal le caractère politique de la répression,
1. Condamne l'arrestation de militants d'organisations de défense des droits de l'homme et demande leur libération immédiate et inconditionnelle,
2. Invite la Commission et les Etats membres à faire pression sur le gouvernement mauritanien pour qu'il accède à cette demande de libérer les personnes
3. Rappelle au gouvernement mauritanien que le respect des droits fondamentaux de la personne est une des conditions essentielles de l'application de la convention de Lomé à laquelle la Mauritanie est partie,
4. Soutient le travail des organisations qui luttent pour que soit définitivement mis fin à la pratique de l'esclavage,
5. Charge son président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux co-présidents de l'Assemblée Paritaire ainsi qu'au gouvernement de Mauritanie.