M. KOTCHARIAN EST EN TETE DE LA PRESIDENTIELLE EN ARMENIE
par Sophie Shihab
Le Monde, 1er avril, 1998
Le candidat nationaliste Robert Kotcharian, ancien président du Haut-Karabakh, dont l'indépendance de fait n'est reconnue par personne, apparaît comme le grand vainqueur, avec un large avance, du deuxième tour de l'élection présidentielle qui s'est déroulée, lundi 30 mars, en Arménie. Après le dépouillement de 27,5% des bulletins, il a recuelli 61,7% des voix, contre 38,2% à son rival, l'ex-chef de l'Arménie soviétique, Karen Demertchian. Au premier tour, M. Kotcharian devançait son rival de 8 points, et aucun des autres candidats n'ont, par la suite, appelé à se désister en faveur de M. Demertchian, même pas le Parti communiste arménien qui avait son propre favori. La victoire de monsieur Kotcharian, quarante trois, est d'autant plus nette que les observateurs étrangers ont constaté des progrès dans la régularité du second tour par rapport au premier. L'OSCE (Organisation pour la securité et la coopération en Europe) avait alors dénoncé des cas d'irrégularité qui auraient pu invalider le scrutin si le score
avait été plus serré, et appelé les autorités (c'est à dire Monsieur Kotcharian lui-même, qui était premier Ministre et assurait l'intérim de la présidence) à y remédier au second tour. L'OSCE n'avait pas encore donné son avis, mardi matin, mais des observateurs du Conseil de l'Europe ont parlé de progrès dans l'organisation et le déroulement du scrutin. M. Kotcharian ne sera donc pas gêné, lors de sa présidence, par des doutes sur sa légitimité comme le fut son prédécesseur, Levon Ter-Petrossian, dont les appels au compromis avec l'Azerbaïdjan, manifestement non populaires chez les Arméniens, ont précipité la chute avant terme. Son successeur et ancien camarade de lutte, M. Kotcharian, avait par contre réfusé le plan proposé par l'OSCE pour commencer à dénouer un conflit qui gêne les projets pétroliers de l'Occident en Transcaucasie. Entre les deux tours, il avait affirmé qu'il était temps de reconnaître l'unité de l'Arménie et du HautKarabakh. Dénoncé par un candidat arrivé troisième au premier tour, Vazg
en Manoukian, pour son autoritarisme. M. Kotcharian devra désormais paraître fidèle à ses engagements nationalistes, sans risquer un plus grand isolement de son pays, qui bénéficie de la plus forte aide par habitant - après Israël- octroyée par les Etats-Unis à un pays étranger.