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Orofino Veronica - 27 aprile 1998
NOIR ET BLANC / par Pierre Georges

le monde / 25 / avril

LA PRESSE BELGE n'a plus assez d'adjectif pour le dire. Et d'adjectifs qui commencent tous par un "i", le "i" d'indignation. "Inconcevable." " Incroyable." "Inoui." "Irresponsable." "Inimaginable." "Insensé." "Impossible."

De la honte, ce matin, d'etre belge. De cette onte, de cette umiliation d'etre citoyen d'un Etat où l'ennemi public numéro un, l'homme présumé le plus dangereux et donc le plus surveillé du pays, se fait la belle, échappe à ses gendarmes.

Faison, ici, l'économie des mauvaises et rituelles plaisanterie sur cette forme inusitée de l'histoire belge, l'évasion belge. Le fait meme qu'un Marc Dutroux ait pu s'évader comme un petit malfrat sans envergure gardé sans vigilance, pour etre heureusement repris très vite,est bien plus qu'une humiliation. Plus qu'une incroyable bavure ou que la preuve, par l'absurde, du présumé laxisme des authorités belges Il ne fait pas qu'alimenter cette culture du complot engendrée par les multiples ratages de l'enquete sur les agissements d'un criminel hors du commun. Il consacre un traumatisme bien contemporain, une rupture profonde entre les citoyens et l'Etat. Et pas simplement belge.

Ce sentiment de netre pas protégé, et d'abord pas de ses démons, ce vécu où le ridicule le dispute au soupçon et à la colère est la marque d'une époque prodigieusement divisée en deux mondes: le monde en blanc, en marche blanche des citoyens, des victimes, des mal protégés, mal gouvernés, mal administrés, mal défendus. Et le monde en noir des autorités, des gouvernants, des responsables irresponsables, des désordres de l'ordre. Le monde comme en noir et blanc du populisme et des démocraties menacées par leurs propres manquements.

Marc Dutroux n'est pas qu'un assassin ou un tortionnaire de jeune filles. L'ampleur prise par cette affaire, l'émotion légitime suscitée par l'horreur des crimes en ont fait un symbole idéal de ce permanent bras de fer entre gouvernés et gouvernantes, de cet état de défiance plutot que de confiance entre le uns et les autres. C'est un symbole bien plus qu'un homme qui s'est évadé provisoirement. Et on ne laisse pas s'évader les symboles.

Sauf à consacrer la défaite de l'Etat et à risquer de tranformer l'interpellation civique en révolte, la marche blanche en marche brune.

Le symbole Dutroux, plus encore que l'assassin Dutroux, signe et creuse cette rupture. L'enquete , ou peut-etre une autre commission d'enquete parlementaire, permettra d'établir les responsabilités, les manquements, les négligences d'Etat dans la garde d'un prisonnier pour ainsi dire national. Elle dira la décomposition administrative, les dysfonctionnements judiciaries et policiers qui ont autorisé ce rebondissement superflu. Mais, d'une certaine manière, cet avatar paroxystique et ridicule, d'un ridicule qui peut tuer la démocratie, est trés contemporain. De la honte d'etre belge comme de la fureur d'etre citoyen ailleurs.

Encore faut-il souligner que, dans le cas précis, le gouvernement a payé le prix de sa responsabilité. La démission immédiate de deux ministres, ceux de la justice et de l'intérieur, pour une évasion insensée, n'est pas un fait si courant qu'il n'y ait pas là, le tumulte calmé, matière à une paradoxale fierté belge.

 
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