LE PARLEMENT S'EST PRONONCE POUR LA REPRESSION DU TRAFIC ET DE LA CONSOMMATION DES DROGUES DE SYNTHESE
13/05/1998 (Agence Europe)
En adoptant le rapport du démocrate-chrétien autrichien Hubert Pirker sur le contrôle des nouvelles drogues de synthèse ("designer drugs"), le Parlement a estimé nécessaire que le détournement de précurseurs de drogues de synthèse ainsi que la fabrication et le commerce de ces substances soient pénalisés et poursuivis dans tous les Etats membres (il juge cependant irréalisable, pour le moment, une harmonisation des dispositions pénales des Etats membres en la matière). Le PE estime que pour conserver leur licence, les exploitants de clubs devraient veiller à ce que l'offre de drogue soit exclue et à ce que leur personnel soit formé à identifier les signes de consommation de drogue. Ils devraient aussi assurer la ventilation des locaux, l'offre gratuite d'eau potable fraîche et prévoir des zones de rafraîchissement dans les locaux. Le Parlement est d'avis que la menace de peines frappant la consommation de drogues de synthèse peut avoir un effet dissuasif sur les consommateurs potentiels. Il estime que les sa
nctions frappant le trafic, la vente et la consommation doivent être proportionnées à la gravité du délit et être applicables. Le Parlement juge indispensable une coopération étroite avec les pays d'Europe centrale et orientale, et il invite les Etats membres à coordonner les actions menées dans le domaine policier avec celles relevant de la santé. Il demande au Conseil d'inviter les Etats membres à recommander aux établissements scolaires de se déclarer, sur une base volontaire, espaces exempts de drogues; il demande à la Commission d'appuyer ces efforts au moyen d'une proposition relative à des mesures d'incitation destinées à aider lesdits établissements à réaliser cet objectif.
Le débat a ravivé le clivage traditionnel entre défenseurs de la répression et anti-prohibitionnistes
Soulignant que 5 millions de jeunes, et près de 10% d'entre eux dans certains pays, consomment des drogues de synthèse dans l'UE, M. Pirker a plaidé pour des mesures exhaustives et de grande ampleur: harmonisation des réglementations sur les précurseurs, amélioration de la coopération pénale, mise en place d'un système d'alerte précoce pour les nouvelles drogues et une politique intensive de prévention, etc.. Tout en regrettant que l'on mette trop l'accent sur la répression et que la prévention reste le parent pauvre de la stratégie choisie, la socialiste néerlandaise Hedy d'Ancona a souscrit aux mesures proposées par le rapporteur. La consommation de drogues de synthèse constitue aujourd'hui, avec la consommation d'alcool, un problème de société majeur, a dit la démocrate-chrétienne Laura De Esteban Martin en insistant pour la promotion de "valeurs et de comportements positifs". Elle a aussi plaidé pour le développement de la recherche sur les précurseurs. Apportant le soutien du groupe UPE au rapporteur,la
gaulliste française Anne-Marie Schaffner a estimé qu'il faut appliquer face aux drogues le même principe de précaution déjà utilisé pour les organismes génétiquement modifiés. Le libéral néerlandais Jan Wiebenga a plaidé pour une politique combinant prévention, lutte et traitement.
"Autant je souscris à l'approche équilibrée de la Commission européenne et à la lutte contre le trafic, autant je ne peux pas soutenir la répression de la consommation préconisée par le rapporteur et dont on sait qu'elle n'a pas effet sur les jeunes", a dit la communiste française Aline Pailler en mettant l'accent sur la souffrance sociale qui entoure la toxicomanie. Reprochant au rapporteur de vouloir "moraliser la société", le vert allemand Daniel Cohn-Bendit a dit: "Les gens que vous voulez protéger, vous ne les atteignez pas parce qu'ils ne veulent pas de cette protection". Insistant sur la facilité de production et de transport des drogues synthétiques, le radical italien Olivier Dupuis a estimé que l'on ne peut pas mettre un policier dans chaque cuisine et dans chaque cave. Plutôt que de lancer une nouvelle guerre à la drogue, perdue d'avance, il a souhaité que l'on imagine un système légal susceptible d'offrir aux Etats un moyen de contrôle. Il a mis en parallèle le parachutisme qui fait un mort pour
80.000 sauts et l'ecstasy qui en fait un pour plus de trois millions de prises.
Au nom de la Commission européenne, Anita Gradin a plaidé pour un renforcement de la coopération entre les Etats membres et une meilleure implication des pays candidats à l'adhésion dans la lutte contre le fléau. Elle a estimé que le système d'information fonctionne bien mais qu'il faut rendre plus efficace l'évaluation scientifique. Après avoir rappelé que deux directives sur les précurseurs sont en préparation, elle a pris position pour une représentation du Parlement au sein de la délégation de l'Union européenne qui participera à la Conférence des Nations Unies en juin prochain.