<< L'ENFANT EST LA VICTIME EMBLEMATIQUE D'AUJOURD'HUI >>

L'auteur d'<< Histoire du viol >> replace l'affaire Dutroux dans l'évolution des mentalités à l'égard de la criminalité sexuelle

le monde / 23 / juin Luc Rosenzweig

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UN UNIVERSITAIRE ATYPIQUE

Georges Vigarello, cinquante-sept ans, est un universitaire atypique. Son intéret pour le corps et son histoire est issu d'une réflexion fondée sur sa pratique de << prof de gym >>, une fonction qu'il exerça pendant quatre ans à sa sortie de l'école normale supérieure d'éducation physique. Reçu à l'agregation de philosophie, il soutient en 1978 une thèse de doctorat d'Etat sur << Le corps redressé >>, qui sera publiée aux Editions Jean-Pierre Delarge. Ses recherches le coinduisent par la suite à explorer l'histoire des mentalités relatives aux pratiques corporelles et sportives: il publiera successivement Le Propre et le Sale, Histoire culturelle du sport, Le Sain et le Malsain, aux Editions du Seuil, comme son dernier ouvrage Histoire du viol, dont l'histoirien Alain Corbin a rendu compte dans << Le Monde des livres >> du 20 février.

Ce livre explore sur les quatre derniers siècles l'évolution des comportements sociaux, politiques et judiciares relatif aux violences sexuelles perpétrées sur des femmes, des hommes ou des enfants. Selon lui : << La violence sexuelle et son jugement sont indissociables d'un univers collectif et de ses changements. Il faut une longue traversée de cet univers, un lent recensement de ses composantes, pour mieux cerner dans le cadre sulfureux de la violence sexuelle la logique qui humilie, celle qui défend, celle qui juge.>>

Georges Vigarello estime par ailleurs qu'aujord'hui << on donne une place définitivement nouvelle au viol d'enfant. La violence sexuelle s'impose ici comme violence première, crime d'autant plus atroce qu'il atteint un idéal de pureté, potentialité d'autant plus absolue que le sens ne vient plus de l'image traditionelle des pères et de l'autorité >>.

Professeur à l'université Paris-V et directeteur d'études à l'Ecole des hautes en sciences sociales (EHESS), Georges Vigarello est également membre du comité de rédaction de la revue Esprit.