Radicali.it - sito ufficiale di Radicali Italiani
Notizie Radicali, il giornale telematico di Radicali Italiani
cerca [dal 1999]


i testi dal 1955 al 1998

  RSS
sab 19 lug. 2025
[ cerca in archivio ] ARCHIVIO STORICO RADICALE
Conferenza Partito radicale
Partito Radicale Lapo - 7 gennaio 1999
Parla Cohn Bendit (Libération)
La tête de liste des Verts se défend:

»Etre traité de libéral-libertaire ne me gêne pas,

je le revendique

Par RECUEILLI JUDITH PERRIGNON

ET JEAN-MICHEL THENARD

Le mercredi 6 janvier 1999

[Q] uelle est la vraie pensée de Daniel

La pensée Cohn-Bendit, 53 ans, tête de liste des Verts

Cohn-Bendit aux européennes et, pour l'heure, tête de Turc de

l'ensemble de la classe politique? Réponses de

Décoiffant l'intéressé.

et rassurant

La chasse En ce début d'année, on dirait que Cohn-Bendit est

l'homme à abattre. ça vous plaît?

au Dany est

ouverte Moi je trouve ça parfait. Et comme dans tout bon

»Etre western, il y a un rendez-vous à O.K.-Corral. Je

traité de suis prêt à débattre avec Chevènement, Hue,

libéral-libertaire Pasqua, Séguin, où ils veulent et quand ils

ne me gêne pas, je veulent, pour qu'ils puissent casser du »libéral .

le revendique

Quand les Justement, Robert Hue et Alain Madelin vous

accusent d'être »libéral . Lequel des deux a

vieilles amitiés raison?

se réveillent

Ni l'un ni l'autre. Pour la simple raison qu'ils

ont tous les deux la même définition du

libéralisme, sauf que l'un est pour et l'autre

contre. Mon libéralisme à moi n'a rien à voir avec

l'offensive dérégulative néolibérale qui a dominé

la société française. Mais je suis persuadé que si

on dit non à l'économie planifiée socialiste, on

dit oui à l'économie de marché. Il n'y a rien

entre les deux. A partir du moment où je dis oui à

l'économie de marché, se pose alors le problème de

son adaptation à nos sociétés. Voilà le cadre dans

lequel j'installe ma réflexion politique: un

réformisme écologico-social lié à une tradition

libertaire qui est effectivement non étatique. Les

libertaires ont toujours accepté le marché, c'est

pour ça qu'ils étaient dénoncés comme des

petits-bourgeois par les marxistes. Aujourd'hui,

l'accusation d'être un libéral-libertaire ne me

touche pas. Au contraire, je la revendique.

Il est quand même des domaines où le marché ne

doit pas faire la loi?

Le marché ne doit jamais faire la loi. Il est

organisé et structuré par la loi et l'impôt. Deux

exemples: l'impôt écologique sur la consommation

d'énergie peut permettre de baisser les charges

sociales. Cela soulage les entreprises tout en

réorientant la consommation d'énergie vers les

énergies renouvelables, ce qui réduit les gaz à

effet de serre et donc sert l'environnement.

Deuxièmement, l'erreur sur le chômage, c'est de

croire qu'il peut être absorbé par un simple

retour de croissance. Il n'y a qu'un exemple

néolibéral d'absorption du chômage, ce sont les

Etats-Unis, une société où la protection sociale

est cassée, et où des pans entiers de la

population vivent au revenu minimum ou sans

protection sanitaire. Certes, il y a là-bas

beaucoup plus de mobilité que chez nous, mais

cette mobilité a un coût dans la vie quotidienne

qui ne fait pas partie de la culture européenne.

Aux Etats-Unis, la lutte de classes, symbolisée

historiquement, entre autres, par l'exécution de

Sacco et Vanzetti, n'a pas réussi à imposer un

projet d'économie sociale comparable au nôtre: il

s'agit donc d'un véritable capitalisme libéral. Le

projet européen, quant à lui, est plutôt symbolisé

par une économie de marché sociale régulée par la

lutte sociale et par la cogestion syndicale.

Mais le problème en Europe, c'est que la lutte

sociale ne s'exprime plus que dans le secteur

public. Ne faut-il pas dès lors le préserver comme

un îlot de résistance à partir duquel résister au

libéralisme en marche?

Il est bon que la France défende une certaine idée

du service public, mais aussi qu'elle la confronte

aux évolutions européennes. En France, on dit

service public; au niveau européen, on dit

entreprise d'intérêt général. ça montre exactement

l'évolution. La Bundesbahn (les chemins de fer

allemands, ndlr) a été privatisée. Et elle a

exactement les mêmes problèmes que la SNCF, avec

ses consommateurs, avec ses syndicats, avec

l'Etat. On s'aperçoit que privatisé ou public, le

problème c'est de définir un cahier des charges,

le droit pour tout citoyen d'atteindre n'importe

quel point du territoire à un prix convenable. Et

si le service public n'est pas capable de se

réformer, il se saborde.

Faut-il le privatiser pour le réformer?

Dire les choses comme ça pose un problème

dramatique. Car cela voudrait dire qu'en fin de

compte, il y a tellement de lourdeurs de

fonctionnement que seul le capital privé, parce

qu'il est méchant, parce qu'il veut gagner de

l'argent, arriverait à réformer les grandes

entreprises, en terrorisant les salariés,

c'est-à-dire en leur faisant mal. Il faudrait

alors privatiser l'Education nationale, qui a

besoin d'être profondément réformée. Claude

Allègre, lui, se conduit face aux enseignants

comme les enseignants face aux élèves. Dans toute

la stratégie des réformes des services publics,

c'est le savoir-faire qui manque. Y compris le

savoir-faire des syndicats, qui doivent être une

force de proposition, de gestion. L'enseignement,

la santé, la sécurité, la justice définissent les

prérogatives de l'Etat, ils ne peuvent être

privatisés.

Existe-t-il, pour vous, des »avantages acquis ?

Evidemment. Le mouvement de décembre 1995 a vu

deux logiques s'affronter à ce sujet, une gauche

traditionnelle, derrière le mouvement, et l'autre,

réformiste, qui disait: on ne peut pas continuer

comme ça. C'est dommage qu'on n'ait pas continué

ce débat. Il faut essayer de faire un tableau des

acquis de la lutte de classes, il y a

effectivement un niveau de bien-être qu'il faut

défendre. Et en même temps, il faut admettre qu'il

y a une rigidité de fonctionnement dans les

entreprises publiques qui font que celles-ci

n'arrivent plus à fonctionner. On en revient alors

à la notion de l'équité dans une société. Est-ce

qu'il est raisonnable pour une société d'accepter

la retraite à 55 ans pour les employés de la SNCF

et pas pour ceux des autres entreprises, en

particulier privées?

Vous êtes pour un service minimum en cas de grève

dans le service public?

Il faut une vraie discussion avec les syndicats

là-dessus. Qui dit service public dit

responsabilité publique. Il faut trouver un

équilibre entre la position légitime des salariés

attachés au droit de grève et celle, aussi

légitime, des consommateurs. De prime abord, je

serais pour moins de luttes corporatistes et

sectorielles et pour plus de revendications

fondamentales, donc des luttes plus radicales

comme pour les 32 heures ou la semaine de quatre

jours.

Vous pensez que le Smic est un frein à l'embauche?

Non. Mais puisque les patrons nous disent que c'en

est un, je leur réponds, prenons un risque: si

vous embauchez des jeunes, ou des chômeurs de

longue durée, vous ne les payez que 5 000 F.

L'Etat rajoutera 2 000 F. A condition que

l'entreprise leur fournisse une formation. Même si

l'entreprise ne les garde que quatre ou cinq ans

sans les embaucher de façon définitive, ils auront

eu une intégration sociale par le travail, donc

une nouvelle employabilité qui pourra leur

permettre de trouver un autre job. Je ne résous

pas avec ce système le problème du chômage en

général, mais je résous pendant quatre ans le

problème de gens qui, depuis des années, n'avaient

pas de boulot. L'Etat donnerait une dynamique à

ses jeunes ou à ses chômeurs de longue durée.

C'est mieux que d'avoir le RMI.

Vous êtes pour donner le RMI aux moins de 25 ans?

Je suis pour que l'Etat donne un revenu aux jeunes

pour leur permettre de faire quelque chose. Si on

donne un RMI à un jeune qui n'a jamais travaillé,

il participe un peu à la consommation mais il n'a

aucune perspective, c'est la limite de la mesure.

Ce que je trouve aberrant dans les emplois-jeunes,

c'est le conditionnement lié à la perspective d'un

emploi définitif, qui exclut du programme a priori

tout le tissu associatif. Au lieu de privilégier

la formation par le travail en collaboration avec

les associations, on préfère tenir à l'écart ces

associations. Travailler cinq ans en emploi-jeune

dans une association vaut sûrement mieux que

poireauter cinq ans au chômage en attendant un

mirage fixe.

Il faut plus de »flexibilité pour favoriser

l'embauche?

Ce qui nous empêche de poser la question de la

flexibilité, c'est la difficulté d'organisation

des forces sociales. S'il pouvait y avoir un

accord entre les forces sociales, la flexibilité

pourrait être une certaine autonomie du choix des

salariés dans l'organisation de leur vie, comme le

préconisent les syndicats italiens. Mais étant

donné la faiblesse syndicale en France, ce mot

évoque tout de suite le terrorisme patronal. Une

flexibilité contrôlée et négociée peut apporter

aussi bien aux salariés qu'aux entreprises.

Vous avez souscrit à des fonds de pension?

Je suis pour le système de retraites par

répartition. Je suis pour un revenu minimum

garanti, que ce soit pour les jeunes ou pour les

retraités. Mais je pense que nous vivons dans une

société malade de l'épargne. Plus les gens

épargnent, moins l'économie fonctionne. En

paraphrasant Alain Lipietz, j'estime que les

familles doivent choisir entre un livret d'épargne

bien rempli ou du travail pour leurs enfants.

Aujourd'hui aux Etats-Unis, les familles

s'endettent pour consommer. L'assurance vie, c'est

quoi? C'est un fonds de pension. C'est 2,5

milliards de francs en France. Qui gère ça?

Comment? Voilà la vraie question: comment avoir

une influence sur le marché pour que cet argent

soit intégré dans le processus économique. En

Allemagne, il y a dans les journaux des publicités

pour un système d'épargne-pension écologique. Si

vous pouvez mettre tant d'épargne par mois, on

vous garantit que cet argent va être investi dans

des projets de proximité. La majorité plurielle en

France doit trouver des solutions pour que cet

argent épargné soit réinvesti pour soutenir ses

projets et relancer l'économie et la consommation

des ménages. Il faut aussi sortir des débats

technocratiques. Je viens de lire que, pour

garantir le système par répartition, il faudrait

faire passer la retraite à 65 ans. Cela ne veut

rien dire. Une personne de 60 ans ne peut pas

travailler de la même manière qu'une de 40 ans. Je

suis d'accord pour travailler jusqu'à 65 ans, si

on commence à travailler à mi-temps à partir de 55

ans. Je prétend qu'un prof à 55 ans ne peut pas

faire un temps plein, c'est intenable pour les

jeunes et pour lui. Les profs pourraient, par

exemple, travailler dix heures par semaines entre

63 et 67 ans. On peut imaginer des choses comme

ça. Une préretraite active de 55 ans à 70 ans,

allant decrescendo.

Pour résumer, votre propos c'est: »Plus de

pragmatisme, moins d'idéologie. ça n'est pas très

différent du »pragmatisme de gauche théorisé par

Jospin.

C'est pour ça que je me reconnais dans la majorité

plurielle. Mais ma notion d'équilibre est

différente de celle de Jospin. Il y a déséquilibre

dans la stratégie du gouvernement concernant

l'urgence. Il prévoit par exemple trop tard un

geste pour les chômeurs avant Noël, ou encore

bloque toute initiative de réductions des risques

pour protéger les toxicomanes. L'audace face à

l'urgence, voilà ce qui manque au gouvernement.

L'urgence, c'est l'émotion. Je crois

qu'aujourd'hui la majorité plurielle néglige

l'urgence et l'émotion, c'est pour ça qu'elle se

trouve parfois déséquilibrée.

---------------------------------------------------

 
Argomenti correlati:
stampa questo documento invia questa pagina per mail