RELATIONS CEE - COMECON
par Altiero Spinelli
SOMMAIRE: Le Parlement délibère sur les relations entre la Communauté et les pays de l'Est faisant partie du COMECON, sur la base d'une question orale adressée à la Commission. In "Discours au Parlement européen 1976-1986", éditeur Pier Virgilio Dastoli. (PE, 11 avril 1978)
Monsieur le Président, je crois que nous commettrions une grosse erreur de jugement si nous nous mettions à considérer les économies de l'Union soviétique et des autres pays d'Europe de l'Est comme un bloc agressif cherchant à désagréger nos économies, à en accentuer la crise et à s'emparer de nos affaires. Nous ferions vraiment fausse route!
Parallèlement aux nôtres, l'économie soviétique et celles des pays de l'Europe de l'Est enregistrent aujourd'hui d'énormes difficultés, qui prennent des formes différentes, en raison d'un système économique différent: point de chômage par exemple, mais une faible productivité; l'inflation reste cachée plutôt que de prendre des formes apparentes. Ce sont des économies qui cherchent, elles aussi, à se dégager d'une situation très difficile et qui ses trouvent devant une alternative: retourner à la situation passée de fermeture, de sous-développement des relations économiques avec le reste du monde, ou les développer davantage en augmentant les achats les ventes et leur interdépendance vis-à-vis du reste du globe. Il est très probable que s'ils choisissent cette deuxième vole, la compréhension entre eux et nos pays en sera facilitée, alors que le contraire ne fait aucun doute s'ils se replient sur eux-mêmes. Tout ne dépendra pas de nos relations commerciales, mais l'attitude caractéristique de ces dernières jou
era un rôle essentiel dans les sens que prendra le développement de nos relations. Or notre intérêt, qui implique également les peuples qui nous sont plus proches et qui sont ceux qui désirent le plus établir des relations économiques étroites avec nos pays, nous force à faciliter, même dans les pays du COMECON, une conception plus ouverte de l'économie.
Le collègue qui m'a précédé a certes raison lorsqu'il soutient qu'en accordant les crédits nous devons tenir compte de certaines limites à ne pas dépasser. Cependant il ne faut pas dramatiser ce problème. Il reste encore des marges de collaboration à exploiter: il suffit de voir le type de commerce que nous avons avec eux, de se rendre compte que ces pays sont encore, pour une grande part, des fournisseurs de matières premières et que, à une ou deux exceptions près la RDA et la Tchécoslovaquie - leur développement économique est encore par certains aspect inférieur au nôtre, pour comprendre l'intérêt des possibilités d'une coopération économique.
Il est cependant évident que nous devons faire comprendre à l'ensemble de ces pays, et en particulier à l'Union soviétique, que la Communauté est une réalité avec laquelle il s'agit de trainer: il est inutile de continuer à feindre de ne pas la voir, il est inutile de continuer à ne pas avoir ici de représentation, lorsque la Chine, la République yougoslave et d'autres pays communistes les ont installées! En somme, il appartiendra à la diplomatie de la Commission et du Conseil de faire comprendre que la Communauté est un corps politique qui désire l'intensification des rapports commerciaux et économiques avec les pays de l'Europe de l'Est - il y va non seulement de leur intérêt, mais aussi du nôtre - et qui désire le faire dans le respect des caractéristiques et des politiques fondamentales de la Communauté elle-même.
Certes, nous devrions avoir une politique d'uniformité des règlements: crédits, coopération économique, etc... ; nous devrions déjà avoir décidé que cette coopération économique est une matière communautaire et non nationale nous ne pouvons reprocher aux autres ce que nous n'avons pas encore fait -; cependant, notre attitude générale devant le problème de nos relations avec ces pays devrait être celle d'une certaine confiance et non de l'état d'esprit de l'agneau qui se jette dans la gueule du loup. Il ne sont point des loups - et disons-le aussi - nous ne sommes point des agneaux.