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Spinelli Altiero - 3 luglio 1978
Procédure budgétaire pour 1979: le projet de la Commission

PROCEDURE BUDGETAIRE POUR 1979: LE PROJET DE LA COMMISSION

par Altiero Spinelli

SOMMAIRE: Avec ce débat à l'assemblée, Le Parlement européen engage la procédure parlementaire du budget pour 1979, dernier budget débattu et voté par le Parlement avant les élections directes.

Comme on peut en déduire de l'intervention Spinelli, les caractéristiques du conflit interinstitutionnel pour le budget 1978 ressurgissent dans cette procédure et dans certains cas

(comme celui du Fond régional) avec plus d'acuité que l'année précédente. In "Discours au Parlement européen 1976-1986", éditeur Pier Virgilio Dastoli. (PE, 3 juillet 1978)

Monsieur le Président, le budget de l'année dernière a été finalement adopté par la majorité du Parlement à l'exception de mon groupe qui a été le seul à exprimer un vote défavorable. Pensant au débat qui a précédé cette adoption, à certains des votes qui ont été exprimés et à ce qui a été dit à cette occasion, je vous avouerai que je m'attendais à ce que la Commission, en rédigeant le projet préliminaire de budget pour l'exercice 1979, tienne compte de ce qui était arrivé l'année dernière. En présentant ce budget, la Commission apporte au contraire la preuve, non pas qu'elle est peu ambitieuse mais qu'elle n'a pas d'idées: la Communauté se replie sur elle-même, l'image qu'elle en donne est celle d'une Communauté circonspecte et disposée à ne laisser augmenter les dépenses que s'il s'agit de protéger ou de défendre une situation particulière. Il n'y a pas une large ouverture sur l'avenir, ni en ce qui concerne les Etats en soi, ni en ce qui concerne la Communauté en tant que telle, ni en ce qui concerne le r

este du monde.

Je me limiterai à prouver l'exactitude de ce jugement négatif par une série de remarques ponctuelles puisque, en ce moment, n'ayant reçu le texte que depuis peu, il n'est pas possible de procéder autrement.

Pour ce qui est des recettes, il n'est pas suffisant, Monsieur le commissaire, d'annoncer que les augmentations sont inférieures aux précédentes, sans expliquer pourquoi il en est ainsi. Il ne suffit pas d'affirmer qu'à l'heure actuelle, tous les Etats doivent faire des économies. Nous nous attendions à ce que vous nous brossiez une large »fresque des activités dans le domaine des finances publiques pour l'ensemble de la Communauté: nous nous attendions à une analyse des efforts en cours et du contexte général dans lequel s'insèrent les dépenses publiques de la Communauté. Nous ne trouvons pas une telle analyse; on se limite au contraire, à répéter que nous devons être économes, apportant par là la prevue de l'absence de toute politique en matière de recettes, même si nous nous vantons d'avoir des ressources propres. J'espère, Monsieur le commissaire, que nous aurons bientôt les idées les plus claires au sujet des nouvelles ressources qui proviendront du taux de 1 % de la TVA parce que, si nous tenons compt

e de la lenteur de la procédure législative communautaire, il n'y a vraiment pas de temps à perdre. Nous devons dès à présent disposer d'indications au sujet des nouveaux impôts communautaires parce que nous sommes déjà arrivés, avec ce budget, à 0,75% de l'assiette imposable.

J'en viens à la partie dépenses: au sujet de la politique sociale, vous nous avez dit qu'un progrès important a été enregistré. Et c'est vrai: le montant a augmenté de beaucoup, même si, tout compte fait, la politique sociale de la Communauté, telle qu'elle s'est développée, intègre en partie, si l'on veut, les politiques nationales. On peut cependant prétendre que, si elle n'existait pas, les Etats, seul, d'une manière ou d'une autre, s'en tireraient tout aussi bien. Il est certain toutefois que sur un point, en matière de politique sociale, et plus particulièrement dans la situation que nous connaissant à l'heure actuelle une intervention communautaire s'impose: je pense ici aux actions entreprises pour faire face aux conséquences de la reconversion industrielle et pour remettre en marche notre économie gravement ébranlée. Eh bien, à côté de ces actions à entreprendre vous avez inscrit un p.m., prouvant par là que vous n'avez aucune idée quant à la manière d'intervenir pour faire face aux conséquences de l

a reconversion.

Concernant la politique régionale, il a été dit que le Conseil européen avait des idées à ce sujet: mais le seul engagement valable est celui que nous, nous avons pris au cours de la première année. Vous avez affirmé, avec raison, qu'il n'est pas possible d'inscrire des dépenses si des engagements d'une ampleur correspondante n'existent pas. Cependant, par la suite, au lieu d'augmenter les engagements, la Commission réduit les dépenses prévues pour la politique régionale. Je note avec plaisir que vous avez finalement inscrit un crédit hors quota, qui permettra à la Commission de se prévaloir d'un instrument un peu plus efficace pour construire la politique régionale et de ne pas voir son rôle limité à la répartition des crédits enre les différents Etats, en fonction des pressions que ces derniers ont exercées.

Dans ce cas également, je dois malheureusement constater que vous avez seulement inscrit un p.m., sans même établir un minimum à partir duquel commencer. Y inscrire un p.m. signifie qu'au cours de l'année on n'y inscrira rien, puisque nous devrons procéder à des virements en puisant dans autre poste du Fonds régional, ce qui est impossible car il n'y aura absolument rien à virer.

Pour la politique industrielle, une forte augmentation est prévue, augmentation dont les effets cependant sont trop dispersés. Il s'agit en outre d'une politique qui s'adresse essentiellement aux industries en déclin, aux industries en crise, et qui n ouvre pas de larges perspectives. Ce n'est pas sans stupeur que ' le constate qu'aucun progrès n'a été accompli pour instaurer une politique commune de l'aéronautique: on a simplement repris le rituel qui veut que l'on fasse figurer ce poste au budget et que l'on fasse croire que nous reconnaissons la nécessité de mettre sur pied une politique de l'avenir pour une industrie de l'avenir.

Quant aux nouveaux instruments financiers, ce qu'on appelle les facilités Ortoli, la Commission a obtenu ce qu'elle désirait: un certain instrument d'intervention. Nous nous demandons cependant si la Commission s'est rendue compte que celui-ci doit servir une politique financière et non simplement fournir des liquidités qui ne feront que s'ajouter à celles qui existcnt déjà dans le monde bancaire.

J'en viens à présent à la politique énergétique. Vous avez parlé d'une très forte augmentation: eh bien, si l'augmentation, par rapport à l'année dernière, est de 169 MUCE, dont 140 pour le charbon communautaire, en réalité, une somme plus importante est prévue pour le charbon communautaire parce qu'il faut ajouter les aides au stockage du charbon - de plus on a inscrit un p.m. c'est-à-dire qu'il sera possible d'octroyer des montants supplémentaires. On peut présenter comme on veut la politique communautaire du charbon, mais il s'agit encore une fois d'un secteur industriel que l'on veut protéger au lieu de penser à des reconversions dans d'autres directions. Nous savons que les prix du charbon communautaire - qu'il soit allemand ou anglais - sont à ce point supérieurs aux prix mondiaux que, si vraiment le charbon représentait une part importante de notre production énergétique, le coût de l'énergie dans la Communauté serait infiniment plus élevé.

Tout compte fait, la politique industrielle, la politique énergétique, la politique régionale, et j'ajouterai la politique à l'égard des pays en voie de développement, prouvent que la Commission ne se rende pas compte que si une perspective de relance existe, celle-ci implique une convergence des efforts industriels et financiers vers, non pas un retour aux mécanismes des années 50 et 60, mais vers le développement des régions en retard dans la Communauté et dans les autres régions en voie de développement du monde. Pourtant, si nous examinons le Fonds pour les pays en voie de développement non associés, que remarquons-nous? 121 MUCE supplémentaires ont été inscrits pour l'aide alimentaire - et donc pour écouler, pour offrir notre blé excédentaire, notre butteroil excédentaire, notre sucre excédentaire - mais 63 millions seulement sont consacrés à l'aide au développement. Nous avons donc instauré dans ce secteur également, une politique qui, au lieu de servir à développer les PVD tout en nous permettant de n

ous développer nous-mêmes, sert uniquement à protéger nos structures, même malsaines.

Quant au FEOGA, je me limiterai à ajouter que le problème n'est pas de dépenser moins, mais de dépenser mieux pour l'agriculture. Après tout ce qu'avaient annoncé la Commission, son président et le commissaire Gundelach, nous constatons en effet, qu'aussi bien en chiffres absolus qu'en pourcentages, les dépenses de la section Garantie ont augmenté. Par contre, les dépenses de la section Orientation, celles qui sont importantes - et nous pensons à la perspective de l'arrivée des nouveaux pays, au »paquet méditerranéen, etc. - ont diminué et en valeur absolue, elles sont passés de 423 MUCE à 394, et en pourcentage elles sont passées de 4,650% à 3,941%. Est-ce là la manière dont la Commission conçoit les problèmes de la Communauté?

Les éléments du budget dont j'ai parlé donnent l'image d'une Commission qui renonce à concevoir, avec une vision d'ensemble, une politique constructive sur le plan économique, et donc budgétaire, l'image d'une Commission qui se limite à boucher les trous au fur et à mesure qu'elle les découvre. C'est trop peu face aux problèmes auxquels nous sommes confrontés!

La dernière remarque que je voudrais faire est que, moi aussi, comme mes collègues, j'approuve l'idée d'inscrire au budget un chapitre concernant les mouvements de capitaux. Ce qui était implicite dans le budget de 1978, devient donc, avec cette inscription, explicite dans le budget de 1979, c'est-à-dire qu'on a pris conscience que ceux-ci doivent figurer au budget de la Communauté. Mais comment peut-on concevoir qu'à ce sujet, ce soit le Conseil qui prenne une décision à l'unanimité sur proposition de la Commission, alors qu'il est clair comme l'eau de roche qu'en dehors des dépenses obligatoires, tout ce qui relève du budget fait l'objet d'une décision selon une certaine proposée? Je me demande de quelle manière la Commission, même en matière budgétaire, pourrait être la gardienne des traités.

Voilà pour les premières remarques. Je voudrais que, non pas tant vous qui avez déjà fait votre travail, mais le Conseil lorsqu'il devra examiner le projet préliminaire de budget, tienne compte de ces critiques, de ce mécontentement, que je ne suis pas seul à avoir exprimés.

 
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