PROGRAMME D'ACTIVITE DE LA COMMISSION PRESIDEE PAR GASTON THORN
par Altiero Spinelli
SOMMAIRE: Le Parlement examine le rapport de la Commission sur les activités de la Communauté en 1980 et le programme d'activité pour 1981 de la nouvelle Commission présidée par Gaston Thorn. In "Discours au Parlement européen 1976-1986", éditeur Pier Virgilio Dastoli. (PE, le 12 février 1981)
Monsieur le Président, le Président Thorn nous a indiqué dans son discours que la Commission qu'il préside ne transmettra plus au Conseil - comme cela s'est trop souvent produit dans le passé - des propositions de compromis édulcorées en fonction des exigences des expert nationaux, et qu'à l'avenir elle formulera seulement des propositions qui tiendront compte uniquement des intérêts de la Communauté. J'imagine que c'est là une critique adressée aussi à la Commission précédente.
Mais, Monsieur le Président Thorn, vous êtes depuis trop longtemps dans la vie politique pour ne par savoir que très souvent il est difficile de faire suivre les discours par des faits, s'il n'existe pas un minimum de force politique derrière ces discours. Vous et moi savons très bien à quelles énormes pressions, nationales et sectorielles, la Commission est soumise lorsqu'elle prépare les documents, lorsqu'elle doit les faire avancer et les défendre. La Commission a donc besoin d'un allié puissant, le plus puissant possible. La Commission ne peut avoir qu'un allié: le Parlement, si elle veut l'avoir. Eh bien, nous nous attendions - à tout le moins, c'est moi qui m'y attendais - que vous, en venant parler ici, ne traiteriez pas seulement de la nécessité de collaborer et de la nécessité de paix, en enrichissant même le vocabulaire communautaire de la nouvelle expression »trilogue ; mais nous nous attendions à ce que vous nous disiez: »le Président Jenkins avait promis ici que la Commission, au cours de la pha
se de préparation de ces propositions, aurait discuté avec le Parlement de ces propositions et ne les aurait présentées au Conseil qu'après avoir abouti à un accord avec le Parlement. C'est-à-dire avant tout accord inter-institutionnel, avant toute réforme des institutions, la Commission s'était engagée à insérer le Parlement dans le processus de formation législative.
Malheureusement, cette promesse n'a pas été tenue. Nous aurions voulu qu'après cette déclaration, vous disiez: »eh bien, nous ferons ce que la Commission Jenkins avait promis . Au contraire, l'engagement a disparu, il n'y a plus rien qui nous fasse espérer un tel comportement: le commissaire Andriessen nous tiendra informés de ce que fera la Commission.
Je pense, Monsieur le Président Thorn, que de cette façon vous affaiblissez énormément la position de la Commission et que vous ne réussirez pas à maintenir l'indépendance que vous voudriez malgré tout préserver, d'après ce qu'il me semble. Vos déclarations sont des déclarations dans lesquelles on dit que cette Communauté ne peut pas être une Communauté ne peut pas être une Communauté à 1 %, mais doit avoir des possibilités de développement. Immédiatement après cette belle affirmation on déclare: »Ceci étant dit , pour l'instant nous nous contenterons de demeurer dans ce cadre. Cela fait trois ans que, d'année en année, la tension entre le Parlement et le Conseil est allée en s'accroissant du fait que le budget ne réussit pas à être un budget susceptible de satisfaire la Communauté, et vous n'êtes pas en mesure de tracer une perspective allant au-delà des limites actuelles. Avez-vous l'intention, oui ou non, de présenter rapidement un projet indiquant la possibilité pour la Communauté, si elle en a besoin, d
e disposer aussi d'autres ressources? Le présenterez-vous, oui ou non, avec des mesures, des propositions en matière agricole, garantissant que ces nouvelles ressources ne seront pas englouties par le soutien des prix, mais seront utilisées pour de nouvelles politiques? Si vous aviez dit que dans les prochains mois quelque chose nous aurait été présenté, vous auriez dit, pour cette année, les choses essentielles: tout le reste aurait pu se développer ensuite un peu à la fois. Mais rien n'a été dit de tout cela.
On parle du tiers-monde, de l'importance de l'aide aux pays en voie de développement: nous voudrions savoir si nous voulons nous engager, après toutes les discussions que nous avons faites, à avoir une masse financière plus grande, plus sérieuse plus importante que celle dont nous avons disposé jusqu'à présent. Elle servira aussi pour la reprise de nos économies, car nos économies auront de plus nombreuses possibilités si la demande de la part de ces pays augmente. Ou bien continuerons-nous, de la manière cachectique que nous avons utilisée jusqu'à présent, à compter les centimes que nous pouvons utiliser? Mais in n'y a pas un mot pour préciser les choses dans ce sans.
On pourrait continuer, on pourrait indiquer aussi d'autres points, mais je vous dis seulement, Monsieur le Président, que si la Commission continue dans son attitude consistant à faire que les grands objectifs soient bien formulés, bien définis, bien exposés, alors que manquent les indications de la première mise en pratique alors elle faillira à son devoir.
J'ai toujours été convaincu de l'exactitude d'une pensée de Monnet qui disait que lorsqu'était en jeu tout grand projet, la chose sur laquelle il se concentrait et qui pour lui était fondamentale, c'était de savoir quelle était la première démarche à faire et dans quelle direction. Dans votre rapport, Monsieur le Président Thorn, il n'y a aucune grande indication sur les premières démarches à effectuer dans n'importe quelle direction. C'est pourquoi il me semble que nous avons lieu d'être déçus par cette présentation.