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Spinelli Altiero - 14 febbraio 1984
Projet de Traité de l'Ue

LE PROJET DE TRAITE INSTITUANT L'UNION EUROPEENNE

par Altiero Spinelli

SOMMAIRE: Le Parlement européen conclut avec ce débat et le vote qui suit l'acte le plus important de sa brève histoire d'Assemblée démocratique européenne, menant à son terme l'action lancée par Spinelli le 25 juin 1980 et poursuivie par la fondation du Club du Crocodile, le 9 juillet de cette même année.

Donnant suite à la résolution votée le 14 septembre 1983, la commission institutionnelle a transformé le contenu de la résolution en articles d'un texte de traité. La cohésion juridique du texte a été assurée par un comité de quatre juristes; Francesco Capotorti, Meinhard Hilf, Francis Jacobs et Jean-Paul Jacqué. L'exactitude juridique des termes dans les versions néerlandaise, danoise et grecque a en outre été vérifiée respectivement par Hans Nord (député libéral), Peter Vesterdorf (juriste danois) et Dimitri Evrigenis (juriste grec et parlementaire européen depuis juin 1984).

Le 13 décembre 1983 la commission institutionnelle approuve le projet de traité par 31 voix pour" et 2 "contre". Pour le commentaire juridique du traité, voir: Capotorti, Hilf, Jacobs, Jacqué. Le traité d'Union européenne. Editions de l'Université de Bruxelles. In "Discours au Parlement européen, 1976-1986", éditeur Pier Virgilio Dastoli. (PE, le 14 février 1984)

Monsieur le Président, chers collègues, la commission institutionnelle a parachevé le mandat que cette Assemblée lui avait imparti. J'ai aujourd'hui l'honneur de vous demander, en son nom, d'approuver la résolution qui contient le projet de traité instituant l'Union.

Avant d'entamer mon sujet, permettez-moi d'attirer votre attention sur le fait que, dans l'exposé des motifs, une ligne a été enlevée. Elle rappelait le tout premier texte qui a soulevé la question de la réforme institutionnelle et qui est la proposition de résolution van Aerssen du mois de septembre 1979. La ligne supprimée sera rétablie.

Qu'il me soit permis de faire une remarque préliminaire concernant les amendements sur lesquels vous êtes appelés à vous prononcer. Une première catégorie d'amendements sont des corrections de style que la commission institutionnelle n'a pas eu le temps d'incorporer dans le texte et dont elle demande l'adoption. Une deuxième catégorie est celle des amendements qui soumettent de nouveau à l'Assemblée des solutions de remplacement que la commission avait déjà examinées et refusées. La commission ne peut qu'en demander le rejet parce qu'ils modifient des textes qui sont le fruit de compromis parfois complexes et délicats qu'il n'est pas sage de vouloir bouleverser. Puisque nous devrions tous avoir la conscience que ce projet naît de la convergence nécessaire entre les idées de familles différentes, je prierais assez souvent les auteurs des amendements de bien vouloir les retirer.

Une dernière catégorie concerne des amendements contenant quelques idées ou nuances nouvelles. La commission propose leur adoption ou l'adoption d'un amendement de compromis accepté par elle-même chaque fois qu'il ne change pas la signification globale de l'article. Parmi les amendements, il y en a qui concernent l'article 82 du traité et les paragraphes 2 et 3 de la résolution dont l'acceptation ou le refus a des conséquences sur toute la signification politique du projet. J'en parlerai sous peu.

J'en arrive ainsi au thème central de notre débat qui, étant le quatrième que l'Assemblée consacre à ce sujet, se concentrera sans doute sur l'essentiel, que je voudrais formuler ainsi: ici, aujourd'hui, le Parlement européen doit expliquer avec clarté et fermeté les raisons politiques de notre initiative. Il doit les expliquer à soi-même, aux gouvernements et aux parlements des Etats membres, aux partis, aux forces sociales et surtout aux citoyens dans les mains desquels nous remettrons dans quatre mois le mandat que nous avions brigué il y a cinq ans. C'est à la clarté et à la fermeté de cette explication que je veux contribuer avec mon introduction au débat.

Notre initiative institutionnelle et le plan Genscher-Colombo sont nés presqu'en même temps il y a un peu plus de deux ans et ont beaucoup de choses en commun. Les deux initiatives partent de la même perception de la contradiction entre le besoin croissant d'unité européenne et le danger évident qu'elle court non seulement de ne pas avancer, mais bien de reculer. Elles voient la raison fondamentale de cette crise dans une définition trop étriquée des buts à atteindre et dans une méthode de travail peu efficace. Elles sont, par conséquent, axées toutes les deux sur une réforme institutionnelle. Elles ont aussi en commun la conscience aigüe que le résultat ne saurait sortit que d'un compromis entre les participants à la recherche de la solution.

En revanche, les méthodes suivies dans les deux recherches ont été très différentes. Les négociateurs du plan Genscher-Colombo, ministres et diplomates, puisaient leur légitimité dans leur qualité de représentants d'Etats en tant que tels. Bien que conscients d'affronter des problèmes de signification et de dimension européennes, ils étaient tous tenus par vocation institutionnelle à voir par priorité les choses dans leur perspective nationale. Dans notre initiative, nous puisions notre légitimité dans notre qualité de représentants élus des citoyens de la Communauté, de responsables les plus authentiques de la démocratie européenne naissante. Venus de la vie politique et sociale de nos pays, nous sommes tous conscients de la nécessité de prendre en compte les problèmes propres de nos pays respectifs. Mais notre vocation institutionnelle est de voir par priorité les choses dans leur perspective européenne. Nous connaissons désormais les résultats de ces deux démarches différentes. Au cours de la négociation

du plan Genscher-Colombo, la perspective nationale a pris irrésistiblement le dessus. La perspective européenne s'est progressivement effacée et la déclaration finale propose, pratiquement, que soit renforcée l'action intergouvernementale au détriment de l'action supranationale. Dans l'élaboration du projet que nous voterons ce soir, la perspective européenne non seulement ne s'est jamais affaiblie, mais elle est devenue plus claire, plus sûre d'elle-même, au fur et à mesure que le travail progressait.

Notre projet fait de la Commission un véritable exécutif politique, maintient un rôle législatif et budgétaire pour le Conseil de l'Union, mais le définit et le limite, donne au Parlement un véritable pouvoir législatif et budgétaire qu'il partage avec le Conseil de l'Union. Notre projet reconnaît l'existence d'une sphère de problèmes qui seront traités par la méthode de la coopération par le Conseil européen. Mais, d'un côté, il interdit à la méthode intergouvernementale d'envahir le domaine de l'action commune et, d'un autre côté, il ouvre une porte qui rend possible le passage de la coopération à l'action commune. Il a été dans un certain sens providentiel qu'entre Stuttgart, où a été voté le plan Genscher-Colombo, et Strasbourg, où on vote aujourd'hui le projet de traité, se place le Conseil d'Athènes. Pour le plan Genscher-Colombo, Athènes a été un véritable hic Rhodus, hic salta, et il n'a pas su sauter. Il avait proposé de renforcer la méthode intergouvernementale et Athènes a démontré l'impossibilité

logique, outre que politique, de concevoir et de réaliser selon cette méthode des politiques d'envergure qui ont besoin de se prolonger dans le temps, de se fonder sur de larges consensus, de briser certaines rigidités nationales. Mais le désastre d'Athènes a montré aussi, à l'improviste, ce que les conseils précédents, bien que de plus en plus paralytiques, avaient réussi à voiler pudiquement.

Pour la première fois, le Conseil d'Athènes a montré la possibilité de la fin de l'union réalisée dans la Communauté et le retour aux sacro-saints égoïsmes nationaux. Tout le monde a eu peur de conséquences d'un tel éclatement et s'est mis à la recherche des moyens de renflouer le bateau européen.

Notre projet de traité n'aurait pu apparaître sur la scène politique à un moment plus approprié car il est la seule réponse politiquement et intellectuellement valable à l'échec d'Athènes. Notre réponse est, comme toute chose vraie et authentique, à la fois simple et difficile à être digérée. Elle peut être résumée en très peu de mots: les affaires d'intérêt commun ne peuvent être valablement gérées que par un pouvoir véritablement commun. Qui cherche sérieusement à sortir de l'impasse d'Athènes doit adhérer à notre projet, mais que de tabous à surmonter pour voir les choses évidentes!

Une fois approuvé, notre projet ne devra pas aller au Conseil, qui le remettrait aux représentants diplomatiques, lesquels le dissèqueraient et l'enseveliraient. Nous le remettrons aux gouvernements et aux parlements nationaux en leur demandant d'entamer les procédures de ratification.

La commission institutionnelle vous propose de suivre cette voie essentiellement pour deux raisons complémentaires l'une de l'autre. D'un côté, ce Parlement élu doit avoir la conscience claire, précise et fière d'être la seule instance européenne où sont légitimement représentés les citoyens d'Europe en tant que tels, selon les groupements politiques qui sont les mêmes que ceux qui existent dans les cadres nationaux. Il est, par conséquent, la seule instance européenne capable d'élaborer un projet constitutionnel sans perdre de vue la perspective européenne et avec la participation des forces politiques de tous les pays membres. D'autre part, les gouvernements et les parlements nationaux sont évidemment conscients de la nécessité de faire avancer la construction européenne et donc de dire oui ou non à un projet européen. Mais s'ils se mettent autour d'une table comme ministres nationaux ou délégations parlementaires nationales pour rédiger un texte, ils ne peuvent que déclencher les réflexes nationaux de cha

que ministre ou de chaque délégation parlementaire et rouvrir automatiquement le débat autour de revendications nationales nécessairement divergentes. La méthode de la négociation diplomatique ferait vite reprendre le dessus à l'intérêt national et le projet du Parlement européen serait rapidement réduit à un document de travail et, par la suite, mis de côté.

Certes, on ne peut pas exclure que l'acceptation de notre projet se heurte à de tels obstacles, qu'il conviendra au Parlement de le reprendre, de le remettre sur le métier pour ainsi dire et de le remodeler. Mais attendons de voir avant de décider de le faire. Gardons-nous bien de dégrader dès maintenant notre projet du niveau de projet formel de la seule assemblée politique habilitée à proposer un texte institutionnel européen à celui d'un document de travail humblement présenté par une Assemblée peu sûre de son droit de le rédiger.

Je me suis arrêté sur cet aspect de notre initiative contenue dans les paragraphes 2 et 3 de la résolution et dans l'amendement de compromis que notre commission recommande d'approuver parce que l'amendement Haagerup-Nord demande exactement ce dont j'ai essayé de démontrer l'incohérence. Si cet amendement devait être approuvé, nous aurions déclaré nous-mêmes que nous sommes incapables de présenter un projet valable. Probablement quelques-uns d'entre nous, moi certainement, éprouveraient une certaine honte à mettre encore le pied dans un parlement capable d'un tel acte d'automutilation et d'autodérision. Nous déciderons donc, je l'espère, de nous adresser aux gouvernements et aux parlements des Etats membres pour leur demander d'assumer et d'approuver le projet. La véritable bataille pour l'Union commencera à ce moment-là, et le rôle du Parlement européen continuera à être essentiel car il devra guider et animer une action dure, exigeante et qui ne pourra être gagnée que si nous savons être tenaces.

Nos groupes politiques seront invités à exercer toute leur influence sur leurs partis et, par conséquent, sur leurs groupes politiques homologues dans les parlements nationaux. Nous défendrons et ferons connaître notre projet lors de la prochaine campagne électorale. Nous demandons, dès à présent, que le futur parlement prenne toutes les initiative nécessaires pour surmonter les obstacles et obtenir les ratifications.

J'attire votre attention aussi sur l'article 82 et sur l'amendement de compromis qui le précise et que la commission vous demande d'approuver. On y dit que l'unanimité des Etats membres actuels n'est pas requise pour l'entrée en vigueur du traité entre ceux qui l'auront ratifié. Il reviendra à ceux-ci de fixer la date et la procédure de l'entrée en vigueur de ce texte et de négocier des rapports nouveaux avec les Etats qui n'y auront pas adhéré. J'attire votre attention sur le fait que ce quorum implique que les Etats ayant adhéré soient au moins au nombre de six, et sept dans une Europe à douze; donc que les Etats plus petits auront leur mot à dire d'une manière décisive.

Si nous laissions planer un doute sur la possibilité de commencer, même si l'on n'est pas au complet, nous mettrions le succès de l'opération non dans les mains des plus décidés, mais dans celles des plus hésitants, voire des adversaires possibles, en vouant ainsi toute l'entreprise à un échec quasi certain.

Parmi les pays qui hésitent, je pense - et je ne suis pas le seul à le penser avec une attention, une tension et une angoisse spéciales à la France en raison de l'importance probablement décisive que son comportement aura sur tous les autres pays de la Communauté. Les hésitations de beaucoup de nos collègues français dans cette enceinte sont un indice évident d'hésitations profondes parmi les dirigeants du pays.

Il est, encore une fois, presque providentiel que la France exerce la présidence du Conseil dans ce premier semestre de 1984, qui commence par le vote d'aujourd'hui sur le projet de traité de l'Union, qui s'achèvera par les élections européennes et au cours duquel personne ne peut certes prétendre que tous les dégats accumulés à Athènes, et bien avant Athènes, soient réparés, mais on a le droit de s'attendre à ce que le chemin à parcourir pour les réparer soit découvert et indiqué.

Le gouvernement français se trouve donc engagé pendant ces six mois à méditer avec plus d'intensité et plus d'imagination que dans les années passées sur la crise européenne et sur les moyens d'en sortir. Il nous convient, me semble-t-il, de lui conseiller de ne pas attendre grand-chose des rencontres bilatérales qu'il poursuit avec tant d'alacrité.

Certes, il est possible, même probable, qu'une série de compromis à courte échéance soient trouvés au cours de ces rencontres, mais on peut miser à coup sûr qu'il s'agirait de mauvais compromis parce qu'ils renverraient la crise institutionnelle d'un ou deux ans, ce qui la fera éclater encore plus dangereusement.

Utiles pour des accords ponctuels limités, les négociations intergouvernementales ne peuvent déboucher que sur de mauvais compromis dès qu'il s'agit de bâtir une politique d'envergure et durable.

A tous les Français, mais surtout au Président de la République qui a récemment invoqué un retour à l'esprit du congrès de La Haye et a parlé de la nécessité d'arriver à une unité politique, notre Parlement doit, par le vote de ce soir, dire que de la présidence française du Conseil nous attendons qu'elle ne se borne pas à venir nous parler rituellement à la fin de son semestre des vétilles que le Conseil aura réalisées, mais qu'elle découvre que notre projet est la réponse, la seule réponse sérieuse, au défi existentiel devant lequel l'Europe, et la France avec elle, se trouvent placées, et nous nous attendons à ce que le gouvernement français - je dis bien, le gouvernement ftançais, non le Conseil européen fasse sien le projet et annonce qu'il est prêt à entamer la procédure de ratification, dès que le minimum de pays prévu dans le traité pour son entrée en vigueur auront pris le même engagement.

Dans ce cas, le semestre de présidence française passerait à l'histoire.

Pour finir, je demande à cette Assemblée, au nom de la commission institutionnelle, de voter massivement la résolution que la commission a présentée et les amendements qu'elle recommande.

 
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