L'opposant Harry Wu et Wei Shanshan, la soeur du dissident Wei Jingsheng condamné l'an dernier à 14 ans de prison après avoir déjà purgé une peine de 14 ans 1/2, ont appelé le 18 avril les Nations Unies à condamner les violations des droits de l'homme en Chine, pays qui détient le record mondial des exécutions capitales.
"Le projet de résolution est extrêmement modéré. S'il ne peut pas être soutenu, la Commission des droits de l'homme ne vaut pas la peine qu'on en parle", a dit Wei Shanshan. Lors d'une conférence de presse commune, l'opposant d'origine chinoise Harry Wu, qui vit aux Etats-Unis, a présenté pour la 1ère fois un documentaire de 13 mn intitulé: "Meurtre sans fard, les exécutions capitales en Chine". Le film de 13 minutes montre notamment des images oppressantes d'une série de condamnés à genoux et maintenus aux épaules par 2 soldats. Un 3ème se tient en arrière et arme la culasse de son fusil. On n'entend que le bruit des armes en l'absence de tout commentaire. Un officier agite un drapeau et une balle est tirée dans la nuque des condamnés qui tombent face contre terre.
L'opposant a dénoncé le caractère public des exécutions auxquelles des enfants des écoles sont obligés d'assister "pour les forcer à la soumission par la peur". Il a également critiqué la pratique du prélèvement d'organes sur les condamnés pour des greffes dans les hopitaux chinois. Quelque 90% des organes greffés en Chine, notamment à des étrangers, viennent de condamnés à mort, a-t-il dit. "La Chine exécute plus de gens que n'importe quel pays au monde. Les Nations Unies doivent continuer à faire pression sur le gouvernement chinois" en votant la résolution, la 6ème présentée par l'UE depuis la répression du mouvement démocratique de Tien Anmen en 1989. Toutes les précédentes ont été repoussées.
Le nombre des exécutions en Chine n'est pas public. L'ambassadeur chinois auprès de l'ONU à Genève, M. Wu Jianmin, a évoqué cette semaine le chiffre de deux mille par an pour 1,2 milliard d'habitants. "Les Chinois doivent aussi faire face aux maux de leur pays", a ajouté M. Wu, qui s'est dit "triste" que les exécutions publiques fassent partie d'une sorte de "tradition" acceptée par de nombreux Chinois.
"Avons-nous besoin de cette sorte d'éducation publique ?" a demandé H. Wu. Les délégués à la Commission donnent peu de chance au projet de résolution sur la Chine d'être voté cette année, Pékin disposant de nombreux alliés parmi les 53 Etats représentés.
Les militants des droits de l'homme soulignent pourtant le caractère très mesuré du texte qui reflète, disent-ils, l'embarras des Etats-Unis sur la peine de mort en vigueur chez eux, et le désir des Européens de bénéficier de la croissance économique en Chine et en Asie. Une copie obtenue par l'AFP se félicite de réformes sociales et du système judiciaire en Chine, de la volonté de dialogue de Pékin et de son invitation à une visite d'un rapporteur de l'ONU sur l'intolérance religieuse. Le texte critique aussi les violations des libertés fondamentales et demande au gouvernement de prendre des mesures pour une justice impartiale, la protection des enfants et l'observation des droits de l'homme pour tous. Le texte ne mentionne que dans son préambule et de manière très vague la restriction des libertés religieuses au Tibet, les exécutions sommaires, la torture et l'emprisonnement des dissidents.
(Source: AFP) (TIBET INFO 25 AVRIL 1996)