Près de 50 ans après l'arrivée des troupes communistes au Tibet, les Chinois n'ont toujours pas réussi leur intégration sur le Toit du monde où leur présence n'est que tolérée par la population. "Nous n'avons pratiquement pas d'amis chinois, car nos relations ne sont pas bonnes", affirme Anjik, chauffeur de taxi de 23 ans qui travaille à son compte à Lhassa. "Les Hans (Chinois de souche) vont dans leurs restaurants et leurs karaokés, et les Tibétains dans les leurs. On ne se mélange pas et on ne se marie pas non plus entre les deux communautés", ajoute-t-il.
Les autorités locales sont d'un avis opposé et s'efforcent de donner une image harmonieuse des relations sino-tibétaines. Dans les rues de Lhassa, de Shigatse ou de Gyantse, les couples mixtes se font en tout cas discrets. Beaucoup de colons han ont été envoyés au Tibet après sa "libération pacifique" par l'armée communiste chinoise en 1950. Aujourd'hui, la population de souche chinoise ne compte, officiellement, que 100.000 personnes, mais elle est en fait maintenant supérieure au nombre de Tibétains dans les grandes villes.
Selon des sources non chinoises, l'armée, qui contrôle lesprincipaux axes et la frontière avec l'Inde et le Népal, totaliserait plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de milliers de soldats.
A l'école, la ségrégation est également une réalité et les Tibétains préfèrent le plus souvent former des classes homogènes.
A défaut de s'intégrer, les han se sont alors regroupés dans des= quartiers chinois, qui grignotent lentement mais inexorablement les villes tibétaines. Les inscriptions en chinois, le plus souvent deux fois plus grosses que celles en tibétain, fleurissent au-dessus des restaurants, karaokés et magasins, donnant aux cités tibétaines cet aspect uniformisé et sans charme
des villes modernes chinoises. Dans les monastères, contrôlés par des "comités démocratiques" à la solde du gouvernement, les rancoeurs à l'égard des han sont bien plus vivaces. "Les Chinois ne sont pas bons", affirme ce jeune moine de Gyantse. "Ils
emprisonnent nos moines et nous interdisent d'adorer le Dalai Lama." (Les photos du Dalaï Lama sont interdites au Tibet depuis le printemps 96, où de nombreux incidents ont éclaté, en particulier au monastère de Ganden, où plusieurs moines avaient été tués.)
(Source : 36 15 Tibet Info/AFP 31 mai 97)