CHAMBRE DES REPRESENTANT DE BELGIQUE
Session ordinaire 1993-1994 - Janvier 1994
PROPOSITION DE RESOLUTION
concernant le Tribunal International contre les victimes de guerre en ex-Yougoslavie
(Déposée par M. de Clippele)
DEVELOPPEMENTS
Mesdames, Messieurs,
Depuis un an déjà, des voix se sont élevées dans tous les pays démocratiques en faveur d'un Tribunal International contre les crimes de guerre en ex-Yougoslavie et pour l'institution successive d'un tribunal international permanent.
Cette initiative a connu un premier succès puisque les juges et un procureur général ont été finalement désignés et qu'ils ont procédé à l'ouverture formelle et à la mise en fonction de ce nouvel instrument international de justice.
Plus de mille parlementaires, des dizaines de membres de gouvernement, 25 lauréats du Prix Nobel ont adhéré à l'appel lancé il y a quelques mois. A New York, au début du mois de novembre, une délégation de signataires conduite par Emma Bonino, et composée, notamment, de parlementaires de la Bosnie, du Monténégro et de la Croatie, a remis à Mr. Boutros-Ghali les signatures recueillies dans le monde entier. L'échange de vues a été très positif et a mis en lumière une substancielle convergence quant à la signification du Tribunal pour l'ex-Yougoslavie et quant à la nécessité d'arriver rapidement - et déjà, si possible en 1995, à l'occasion du cinquantième anniversaire de la fondation des Nations-Unies - à la constitution d'un Tribunal International Permanent.
Malheureusement les hypothèques ne manquent pas quant aux possibilités qu'aura le tribunal international pour l'ex-Yougoslavie de remplir effectivement sa mission. En effet, nombreux sont ceux qui voient dans cette nouvelle institution internationale une sérieuse entrave à une résolution du conflit basée sur une division ethnique de la Bosnie. Une option politique qui prend acte, en les sanctionnant, des résultats de la politique fondée sur la force, l'agression, la violence et le nettoyage ethnique, mise en oeuvre par le régime de Belgrade et de Zagreb et qui s'accomoderait difficilement de voir tout d'un coup certains négociateurs se transformer en inculpés ayant à comparaître devant la nouvelle cour internationale.
Un scénario qui, tout l'indique, s'est sensiblement renforcé au cours de ces dernières semaines, en particulier suite à la nouvelle proposition de négociations fondée sur un nouveau "marchandage" de petites concessions territoriales de la part des serbes au "bénéfice" des musulmans contre une levée progressive des sanctions internationales contre la Serbie-Monténégro.
C'est dans un tel contexte que s'inscrivent les difficultés rencontrées par l'ONU pour trouver une solution à la question du financement du Tribunal. Des difficultés qui ont contraint le Secrétaire Général à instituer un fonds spécial ouvert aux contributions volontaires des Etats.
Dans cette situation particulièrement difficile, nous pensons - même si nous savons que cela n'est pas suffisant - qu'il faille parer au plus pressé, autrement dit tenter de bloquer les tentatives en cours visant à vider le Tribunal de sa substance.
Nous demandons que notre gouvernement contribue de façon volontaire et unilatérale au fonds spécial pour le Tribunal ad-hoc institué par Mr. Boutros Boutros Ghali.
Il est clair qu'une telle initiative, si elle se multiple en Europe, ne manquera pas de donner un nouvel élan au Tribunal International.
J.-P. de Clippele
PROPOSITION DE RESOLUTION
La Chambre des Représentants,
- Considérant que la Commission d'experts qui enquête sur les violations du droit international humanitaire commises en ex-Yougoslavie, instituée par la résolution 780 du 6 octobre 1992, risque de ne pas pouvoir agir, à défaut de financement, avec l'urgence et la profondeur nécessaires;
- considérant que le Secrétaire Général des Nations Unies a institué un fonds ad hoc, en soutien aux activités de la Commission d'experts, lequel fonds, nonobstant la demande de la Commission de disposer de 1,8 million de dollars, est doté actuellement d'1 million de dollars seulement versés par le Canada, le Danemark, la Nouvelle Zélande, la Norvège, la Suède, les Etats-Unis et les Pays-Bas;
- considérant que les Nations Unies ont, jusqu'ici, attribué 500.000 dollars seulement pour les activités du Tribunal ad hoc pour les crimes de guerre dans l'ex-Yougoslavie institué par le Conseil de Sécurité par sa résolution 827 du 25 mai 1993 et inauguré à La Haye le 17 novembre;
- considérant que le Secrétaire Général a présenté à l'Assemblée Générale un projet de budjet de 35 millions de dollars (annuel) pour le financement dudit Tribunal;
- considérant que l'Assemblée Générale des Nations Unies, et en particulier le Vième Comité, n'ont pas encore décidé si les sommes nécessaires à l'activité du Tribunal devaient être comprises dans les rubriques du bilan ordinaire des Nations Unies comme cela a été établi par la résolution 827 ou si elles devaient être fournies par des contributions volontaires des Etats membres;
- considérant que pour surmonter cet obstacle réel, le Secrétaire Général a été obligé d'instituer un Fonds spécial afin de garantir le fonctionnement effectif du Tribunal, invitant les Etats membres à y contribuer de la façon la plus large et le plus rapidement possible;
Engage le Gouvernement à contribuer financièrement et au moyen d'autres ressources au Fonds pour la Commission d'experts pour les enquêtes sur les crimes commis en ex-Yougoslavie et au Fonds pour le Tribunal ad hoc pour les crimes commis en ex-Yougoslavie.
J.-P. de Clippele (Parti Libéral Réformateur)
J. Canon (Parti Socialiste)
G. Clerfayt (Front des Francophones - Parti Populaire Wallon)
P. Hazette (Parti Libéral Réformateur)
S. Platteau (Vlaams Liberalen Democraten)
W. Poncelet (Parti Social-Chrétien)
F. Sarens (Christelijk Volks Partij)
J. Sleeckx (Socialistisch Partij)