(EU) UE/1996: BELMONT SOULIGNE LA NECESSITE D'UNE CONSTITUTION EUROPEENNE ECRITE, ESTIME QUE LES ETATS MEMBRES DEVRAIENT POUVOIR "OPT UP", ET SUGGERE QUE LA CONFERENCE INTERGOUVERNEMENTALE COMMENCE PAR DES SESSIONS OUVERTES
(Agence Europe, 18-10-1994)
Le "Message sur l'état de l'Union" que vient de publier le Belmont European Policy Centre constate une "légère, mais perceptible éclaircie dans le pessimisme excessif" qui a marqué le débat sur l'Union européenne depuis le dernier "Message sur l'état de l'Union" diffusé par le "think-tank" basé à Bruxelles. En particulier, Belmont souligne que, ayant gagné les élections du 16 octobre (fût-ce de justesse), le chancelier Kohl "peut maintenant indiquer très clairement les réformes spécifiques, institutionnelles et autres, que l'Allemagne souhaite voir adopter" par la Conférence Intergouvernementale de 1996. En outre, Belmont note que la poursuite du gouvernement Kohl "stimulera la réalisation de l'Union économique et monétaire", tout en insistant sur la nécessité d'une "européisation" du rôle de leader que l'Allemagne joue en matière monétaire.
Belmont, constatant qu'il n'y a "pas encore de consensus quant à la portée de la révision de 1996", estime aussi que "le climat politique qui se développe dans les Etats membres de l'Union rendrait une simple répétition des négociations du Traité de Maastricht peu probable cette fois-ci". Il sera en effet "impossible - et en fait indésirable - que des politiciens, des diplomates et des fonctionnaires négocient des textes ésotériques à huis clos", et il faudra au contraire un débat public qui serait facilité si la CIG commençait par des sessions ouvertes et si les documents de base étaient disponibles. La participation du PE et des parlements nationaux devrait aussi contribuer à "un plus vaste soutien du public" pour la réforme, observe Belmont, qui constate que le débat a déjà commencé, notamment avec la publication du document Schäuble-Lamers, de l'interview d'Edouard Balladur et du discours de John Major. A propos de la discussion sur le "noyau dur" au sein de l'Union envisagé par le document allemand, Bel
mont affirme que, si certains Etats membres peuvent ""opt out" d'un ou de plusieurs engagements de l'Union, alors d'autres devraient être libres de "opt up" dans le sens d'une Union plus étroite". En effet, selon Belmont "ce n'est plus acceptable qu'une petite minorité - et encore moins un seul pays - puisse opposer son veto à la volonté et la capacité d'autres d'aller plus loin sur le chemin de l'intégration européenne". L'abolition du droit de veto est cruciale, affirme Belmont, estimant que "la géométrie variable sans un noyau dur mènera à la désintégration et à un retour à l'intergouvernementalisme". La Conférence de 1996 sera la prochaine occasion d'adapter l'Union et ses institutions aux problèmes et défis nouveaux, et "si l'unanimité continue à être requise pour toutes les décisions-prises par les Conférences Intergouvernementales, elle pourrait être la dernière", estime Belmont.
Belmont, qui annonce qu'il contribuera au débat public sur la révision de 1996 par la publication, à partir de janvier 1995, de "Challenge 96" (une sorte d'"Intelligence Service" sur la CIG), indique comme réformes prioritaires:
- de nouvelles règles pour le vote à la majorité au Conseil, une possibilité étant celle d'exiger une "double majorité" (des Etats et de la population);
- l'égalité Conseil/PE en matière législative;
- l'intégration progressive d'au moins certains aspects du "troisième pilier" (justice et affaires intérieures) dans le pilier communautaire, ce qui impliquera un certain recours au vote à la majorité, une plus grande implication de la Commission et une pleine responsabilité devant le Parlement européen;
- la consultation du PE dans les questions concernant le "deuxième pilier", avec, là aussi, un plus grand recours au vote à la majorité au moins sur la mise en oeuvre des décisions. Selon Belmont, par ailleurs, la discussion sur la révision du Traité de l'UEO "avant sa probable expiration en 1998" pourrait aboutir à ramener formellement l'UEO dans le cadre de l'Union européenne, ce qui pourrait conduire à la création au sein de l'Union d'un nouveau "quatrième pilier" responsable pour la défense, qui serait, au moins au début, essentiellement de caractère intergouvernemental (Belmont juge "hautement significative" dans ce contexte la nomination comme Secrétaire général de l'OTAN de Willy Claes, "connu pour son engagement envers la notion d'une Union européenne de défense");
- l'abolition du veto sur l'admission de nouveaux membres et sur les changements apportés aux Traités;
- l'abolition du système de rotation semestrielle de la présidence de l'Union, afin d'assurer une représentation plus adéquate de l'Union sur la scène internationale, et examen des rôles respectifs de la Commission et des présidences du Conseil;
- une forte réduction du nombre de membres de la Commission en abandonnant le système selon lequel "les Etats membres ont automatiquement le droit à un (et encore moins deux) Commissaires".
En ce qui concerne l'élargissement à l'Est, Belmont note qu'on pourrait envisager l'intégration des pays d'Europe centrale et orientale d'abord dans les deuxième, troisième et éventuellement quatrième piliers avant que ces Etats ne soient membres à part entière du premier pilier. Mais cette possibilité ne
devrait pas être une excuse pour reporter indéfiniment leur pleine appartenance à l'Union, affirme Belmont, pour qui l'alternative consisterait à accueillir des groupes de pays à des rythmes différents, en fonction de leur développement économique et politique.
Tout ceci, selon Belmont, montre la nécessité d'"une Constitution de l'Union eurpéenne claire et écrite (probablement selon le modèle allemand ou suisse)", qui clarifierait aussi le partage des responsabilités entre l'Union, les gouvernements nationaux et les autorités régionales. Belmont, qui souhaite que la CIG de 1996 puisse convenir d'un mécanisme pour la rédaction d'une telle Constitution estime aussi qu'une Constitution claire pourrait aussi "atténuer les craintes exagérées" au sujet du contrôle exercé par Bruxelles, craintes exploitées par ceux qui "utilisent la subsidiarité comme moyen pour affaiblir la cohésion de l'Union". En l'absence d'une Constitution stricto sensu, estime Belmont, la CIG devra examiner de quelle manière préserver la suprématie de la Cour de justice et du droit communautaire tout en permettant au législatif de modifier des jugements de la Cour qui n'ont pas une nature constitutionnelle. La nécessité de réforme ne doit pas être utilisée comme excuse pour réduire les pouvoirs de l
a Cour, affirme Belmont.
Par ailleurs, Belmont fait une série de propositions concernant des réformes internes de la Commission qui lui paraissent devoir aller de soi, à savoir: - l'abolition de la répartition des postes plus importants par nationalité (même si un équilibre global entre nationalités peut continuer à être nécessaire); - une révision en profondeur de l'efficacité du système des cabinets et des relations entre cabinets et services; - un réexamen de l'utilisation des ressources humaines, y compris de l'usage de consultants permanents pour certaines fonctions; - une révision du système d'attribution de contrats à des consultants, notamment en vue d'une plus grande transparence; - une "reconstruction radicale du groupe du porte-parole et des services d'information et de communication"; - une réforme de la comitologie; - des recommandations concernant les Langues de travail; - un examen du fonctionnement des délégations de la Commission ou de l'Union dans les pays tiers.