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Mink George, Page Jean-Pierre - 14 novembre 1994
La question de l'élargissement vers l'Est.

POUR UN NOUVEAU TRAIT D'UNION ENTRE

L'EUROPE CENTRALE ET L'UE

par George Mink et Jean-Pierre Page *

SOMMAIRE: Après cinq ans de "transition" et d'attirance non démentie pour l'Ouest, les pays d'Europe du Centre-est doivent repenser les voies d'un rapprochement avec l'Union européenne. En janvier 1995, à Varsovie, des experts hongrois, polonais, slovaques et tchèques devraient poser les principes d'une nouvelle institution.

(Libération, 14-11-1994)

Pour faciliter l'intégration à l'Union européenne des pays post-communistes ayant retrouvé le chemin de la démocratie et de l'économie de marché, des représentants de haut niveau de quatre pays de l'Europe du Centre-Est (Hongrie, Pologne, Slovaquie et République tchèque) ont pris la décision, lors d'une conférence tenue à huis clos au collège de l'Europe à Bruges le 27 juin 1994, de proposer à leurs gouvernements et à l'Union européenne de mettre en place un nouvel instrument n'ayant pas d'équivalent actuel. Les experts qui préparent les fondements de cette institution disposent de quelques mois pour présenter, en janvier à Varsovie, une formule opérationnelle qui serait à cette occasion validée par les pays concernés.

Cinq années se sont écoulées depuis la chute du mur de Berlin, cinq années de "transition", cinq années de recomposition de l'espace économique et politique de l'Europe centrale et orientale, en vue de résorber l'héritage de l'ancien régime.

Cinq années d'une volonté inébranlable de rejoindre l'Union européenne en dépit des vicissitudes que cette dernière a connues, mais qui n'ont pas altéré son image de pôle d'attraction.

On pourra discuter longuement des motifs de cette attirance: désir de partager la prospérité de l'Europe de l'ouest (sans en mesurer toujours le prix), recherche de la sécurité dans un monde que la fin de la "guerre froide" a déstabilisé dans ses repères géopolitiques et interethniques, volonté légitime de réintégrer l'espace historique européen. Toujours est-il que la revendication de l'adhésion reste l'axe central de la plupart des pays de l'Europe centrale et orientale.

Et pourtant, cette volonté d'adhésion n'est pas sans entretenir des malentendus en Europe. Le premier malentendu tient au débat qui divise, depuis cinq ans, ceux qui préconisent une approche groupée, "régionale", de l'Union européenne, faisant valoir les vertus de la coopération par rapport aux démarches individuelles et, plus nombreux, les représentants de l'Europe centrale et orientale qui craignent que, sous couvert d'une telle approche collective, on cherche à les retenir dans une sorte d'antichambre, de sas, voire de les obliger à reconstituer la vieille réalité collectiviste du Comecon.

A ces arguments, s'ajoutent ceux des économistes et des politiques centre-est européens qui pensent que leur pays est le mieux armé pour aller plus vite vers l'Europe par ses propres moyens. Pourquoi, donc, s'encombrer de partenaires moins bien placés?

Au sein de l'Union européenne elle-même, la situation est loin d'être simple et dépourvue d'équivoque. S'il y a accord de principe sur le caractère souhaitable de l'intégration des pays de l'Europe centrale et orientale - et les déclarations répétées en ce sens au cours des sommets en attestent -, cet accord est beaucoup moins évident quant aux modalités et au calendrier de cette intégration.

C'est qu'elle ne manque pas d'interférer dans le débat entre approfondissement et élargissement (débat avivé par le projet circulant en Allemagne d'une Europe "en escalier") et d'opposer ceux qui mettent en avant la nécessité de l'approfondissement, non pas nécessairement comme un alibi pour éviter l'élargissement, mais, au contraire, pour permettre à celui-ci de se passer dans de bonnes conditions, et ceux qui donnent la priorité à l'élargissement, suspectés, à tort ou à raison, de vouloir ainsi diluer et affaiblir la portée politique de l'Union. Les variations des attitudes des parties en présence par rapport à ce débat expliquent le caractère un peu "flou" de la position de l'Union européenne en la matière et alimentent les insatisfactions, voire l'amertume, des candidats à l'adhésion.

Ce débat s'obscurcit encore du fait que, dans chaque pays membre de l'Union européenne comme chez les pays postulants, il est perturbé par des personnalités politiques désireuses de capter des électorats frileux et désorientés. Les sondages d'opinion effectués dans les pays post-communistes montrent une érosion, encore inefficace mais constante, des opinions favorables à l'adhésion. Il faut donc gagner sur le temps qui passe et, pour ce faire, le problème de la communication inter-européenne tend à prendre une place essentielle si l'on veut que les débuts prometteurs du retour de l'Europe de l'Est dans l'Europe soient couronnés de succès.

Dans ce contexte, s'inscrit la décision de représentants de haut niveau de quatre pays de l'Europe du Centre-Est (Hongrie, Pologne, Slovaquie et République tchèque) de proposer à leurs gouvernements et à l'Union européenne de mettre en place un nouvel instrument en vue de faciliter leur intégration dans cette Union. Cette décision, prise à Bruges le 27 juin 1994, montre qu'une étape a été franchie, que le réflexe de rejet de l'idée de coopération, qui a joué depuis l'effondrement des régimes communistes en raison des connotations que ceux-ci lui avaient données, a fait place à une attitude nouvelle empreinte d'un plus grand pragmatisme.

A quoi pourrait servir une nouvelle structure, pourra-t-on se demander, étant donné que les quatre pays signataires de la déclaration de Bruges peuvent déjà faire valoir, avec la constitution d'une zone de libre-échange, le Cefta, une avancée substantielle dans le sens de la coopération régionale?

Les difficultés rencontrées sur la voie de l'intégration européenne justifient qu'un pas de plus soit accompli. Il est d'autant plus facile à faire que l'on sait mieux localiser les malentendus suscités par des projets antérieurs. Il ne s'agit pas de promouvoir une adhésion commune des pays de l'Europe centrale et orientale à l'union européenne, ni même une négociation collective de cette adhésion. Ces pays n'en veulent pas.

Il semble difficile également, aujourd'hui, de vouloir mettre en oeuvre une démarche intermédiaire conduisant à constituer une sorte d'AELE (Association européenne de libre-échange) négociant un "espace économique commun" avant l'adhésion.

Mais les pays candidats à l'adhésion, tout en prenant bien soin de conserver leur entière liberté de manoeuvre, ressentent la nécessité d'une réflexion commune qui, au minimum, permettrait une concertation de leurs stratégies d'approche et une meilleure présentation de leurs problèmes similaires et en mesurent la valeur ajoutée. Les obstacles sur le chemin de la libéralisation des échanges avec l'union européenne qui alimentent les polémiques parfois aigres-douces, l'accumulation des questions de nature "transfrontière" qui appellent, bon gré mal gré, un traitement régional comme l'interconnexion des infrastructures, la sécurité nucléaire, la sauvegarde de l'environnement ou la restructuration de certaines activités, les y poussent.

Et, signe des temps, on voit se poser avec une acuité croissante un problème très concret qui met en question, à la fois l'avenir de la politique agricole commune et les politiques de réforme agricole des pays de l'Europe centrale et orientale: comment intégrer les agricultures des nouveaux candidats à l'adhésion dans l'Europe de demain?

A cette réflexion commune, la Commission européenne a tout intérêt à participer pour mieux recevoir et faire passer les messages concernant la double nature des problèmes posés par la candidature des nouveaux pays à l'Union européenne. C'est, en effet, à un "double ajustement", que sont appelés, aujourd'hui, les pays de l'Europe centrale et orientale et l'Union européenne. on a mis, jusqu'ici, principalement, l'accent, avec la mise en chantier des réformes économiques dans les pays en transition, sur l'adaptation des pays de l'Europe centrale et orientale en vue de leur intégration dans l'Union européenne, un peu comme si celle-ci était un ensemble "constitué", intouchable.

C'était oublier que l'Union européenne elle-même devra pour être en mesure d'accueillir ses nouveaux partenaires économiques et accepter sur son marché la concurrence de leurs produits.

Que de drames de la pêche, de l'agriculture, de la sidérurgie, du textile ou d'autres secteurs ne sont-ils pas en gestation si l'on n'y prend garde! Et ce "double ajustement", aujourd'hui reconnu comme nécessaire, dépasse le problème de la stricte convergence macroéconomique mesurée à l'aune de quelques critères traditionnels.

Tout ceci milite donc en faveur de la création d'une nouvelle structure qui serait, à la fois, un "espace de réflexion" (un "think tank") pour permettre aux pays de l'Europe centrale et orientale d'aborder les questions que pose leur intégration dans l'Union européenne, ensemble et avec celle-ci, et un espace de communication en vue de mieux faire connaître et comprendre leurs positions et leurs préoccupations.

C'est bien dans cet esprit qu'il faut comprendre la proposition qui a été faite à Bruges d'un organisme d'experts qui se veut petit, souple, économe en moyens et indépendant (même s'il doit être mandaté par les gouvernements).

C'est, en fait, d'un "pont" entre l'Union européenne et les pays de l'Europe centrale et orientale qu'il s'agit, un pont qui viendrait compléter le dispositif jusqu'ici axé essentiellement sur les accords bilatéraux d'association.

* Sociologue et économiste, spécialistes des pays de l'Europe de l'Est Initiateurs d'un groupe d'experts pour l'intégration des pays du Centre-Est.

 
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