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Vernet Daniel, Le Monde - 3 dicembre 1994
IMPATIENCES A L'EST

par Daniel Vernet

SOMMAIRE: L'auteur affronte les nouveaux problèmes de sécurité de l'Europe centrale et de la difficulté sinon de l'impossibilité de les affronter dans le cadre des organisations, comme l'OTAN ou la CSCE, nées à l'époque de la guerre froide. (Le Monde, 3 décembre 1994)

L'architecture de la sécurité européenne se construit à petits pas dans les vieilles organisations du temps de la guerre froide, qui tentent tant bien que mal de s'adapter aux réalités. Pendant que les diplomates cherchent les formules miracles qui concilieront les points de vue opposés, la crédibilité de l'Europe sombre dans l'enclave de Bihac. Le fiasco yougoslave est à la fois un encouragement à avancer vite vers la création d'un système de sécurité qui ne laisse pas de côté les nouvelles démocraties de l'Est et un double avertissement, sur l'incapacité européenne à faire face aux nouveaux défis, sur les réticences américaines à s'engager.

Cette toile de fond préoccupante a marqué les débats qu'ont tenus des diplomates, des universitaires et des journalistes réunis pendant deux jours près de Varsovie pour essayer de donner une réalité au »triangle de Weimar créé en 1992 entre les ministres des affaires étrangères français, allemand et polonais de l'époque.

Pour les Polonais, la cause est entendue: leur sécurité passe par une adhésion aussi rapide que possible à l'OTAN, directement ou par le biais de l'Union européenne ou de l'UEO. Ils considèrent l'existence d'une »zone grise entre l'Europe occidentale et la Russie comme le plus grand danger pour la stabilité du continent et comme une invite lancée à Moscou de renouer avec les pratiques impériales du tsarisme ou du bolchevisme. Sans doute sont-ils peu nombreux à penser qu'il existe actuellement une menace russe directe et immédiate sur leur sécurité, mais ils sont extrêmement sensibles, »hypersensibles même, reconnaît un intervenant polonais. Le moindre incident, comme le report de la visite du premier ministre russe à la suite d'un incident ayant opposé dans une gare de Varsovie la police polonaise à des touristes russes, leur rappelle le souvenir des pressions auxquelles les soumettait naguère le Kremlin.

La discussion avec les Européens de l'Ouest n'est pas simple parce que les interlocuteurs partent de prémisses opposées (1). Les Polonais - mais leurs compagnons d'infortune des autres pays de l'Est ne pensent pas différemment - estiment qu'ils sont mieux placés, géographiquement et historiquement, que les Occidentaux pour connaître les menaces pesant sur la stabilité du continent. Ils regrettent qu'on ne les ait pas écoutés, ni même consultés, lorsque la guerre a éclaté en Yougoslavie, parce que leur expérience communiste aurait pu aider à comprendre le drame. Si l'on ne profite pas de la faiblesse relative de la Russie pour élargir l'OTAN, comment osera-t-on le faire quand la Russie sera redevenue forte ?

Argument que les Occidentaux retournent: en tirant profit de la faiblesse de la Russie on encourage dans ce pays les tendances nationalistes qui constituent en elles-mêmes des menaces pour la stabilité de l'Europe, et en particulier de l'Europe centrale. En d'autres termes, les Européens de l'Est disent: puisqu'il n'y a pas de menace russe, il n'y a aucun risque à élargir l'OTAN et les Occidentaux répliquent: si vous n'êtes pas menacés, pourquoi vouloir adhérer à l'OTAN !

Sans doute la vraie raison de "l'impatience" (le terme est revenu comme un leitmotiv) tient-elle plus à des considérations intérieures qu'extérieures. En se liant formellement à l'Ouest, les Polonais espèrent conjurer tout risque de retour en arrière, quels que soient les avatars électoraux et tous les »placebos que l'Union européenne ou l'OTAN leur a prescrits depuis quatre ans, ne leur paraisssent pas à la mesure des défis, que ce soient le COCONA, le partenariat pour la paix, le »plan Balladur ou les accords d'association. Et ce n'est pas le »dialogue structuré que l'UE s'apprête à leur proposer qui les consolera de faire antichambre.

Les Allemands suggèrent que les Européens de l'Est ont tort de se montrer aussi inquiets pour leur défense, car même en l'absence d'intégration dans l'Alliance atlantique, ils bénéficient d'une »garantie implicite de sécurité de la part des Occidentaux; ceux-ci ne pourraient, selon cette théorie, tolérer que les nouvelles démocraties d'Europe centrale et orientale soient agressées par quiconque. Il n'est pas certain que, vu le précédent yougoslave, cette »garantie implicite suffise à rassurer, surtout les Polonais qui, depuis 1939, savent quelle confiance accorder aux garanties »explicites ... A fortiori quand Français et Allemands eux-mêmes se prennent à douter à haute voix de l'efficacité du parapluie américain.

Ces contradictions ne sont que le reflet du désarroi des Européens qui, constatant leur impuissance dans l'ex-Yougoslavie, savent qu'ils ne peuvent rien faire sans les Américains et pas grand-chose avec eux. Le pilier européen de défense n'aura pas d'existence autonome avant plusieurs années dans la meilleure hypothèse, et la tentation est grande de faire patienter les pays d'Europe centrale et orientale, avec le secret espoir qu'entre-temps le problème aura changé de nature.

La relance de la CSCE

Car l'obsession des uns et des autres reste la Russie, son avenir, ses intérêts, son comportement dans son »étranger proche . Comment trouver le juste milieu entre »le refus d'humilier la Russie et la prise de conscience que l'URSS n'existe plus ? , a demandé l'ancien premier ministre polonais Tadeusz Mazowiecki. Les Occidentaux croient avoir trouvé la solution dans la résurrection de la CSCE. Cette organisation, - les diplomates préféraient parler de »processus née après la Conférence d'Helsinki en 1975, a été paralysée au cours des dernières années par la règle de l'unanimité prévalant entre ses cinquante-trois membres, parmi lesquels les Républiques d'Asie centrale issues de l'URSS. Malgré ses défauts, la CSCE a l'avantage d'être la seule institution paneuropéenne à accueillir également la Russie et les Etats-Unis.

Au prochain sommet qui se tiendra lundi 5 et mardi 6 décembre à Budapest, les Occidentaux proposeront à Moscou de faire de la CSCE une sorte de »toit pour la sécurité européenne, sous lequel pourrait se développer un partenariat entre l'OTAN d'une part et les Russes entourés de leurs alliés de la CEI, d'autre part. La CSCE aurait la priorité dans la recherche des solutions à des conflits régionaux, et ce n'est qu'en cas d'échec qu'elle ferait appel à l'ONU. Les forces étrangères participant en son nom à des opérations de maintien ou de rétablissement de la paix devraient suivre les règles de l'organisation internationale. Les Occidentaux refusent en tout cas d'accéder au voeu des Russes qui voudraient voir l'OTAN subordonnée à la CSCE, donc à leur veto, et donner un chèque en blanc aux troupes russes dans le maitien de l'ordre dans l'ex-URSS.

La Russie serait-elle prête à accepter un élargissement de l'OTAN à condition de se voir reconnaître le statut de grande puissance auquel elle aspire ? Un observateur polonais qui connaît trop bien ses voisins à une réponse cynique: »Pourquoi le Kremlin donnerait-il une contrepartie puisqu'il aura l'accord stratégique qui le hissera au niveau de l'OTAN, sans payer de prix?

(1) La réunion était organisée par le Centre d'information et de recherche sur l'Allemagne contemporaine, l'IFRI (Paris), l'Institut franco-allemand de Ludwigsburg, la Société allemande pour la politique étrangère (Bonn) et la Fondation Batory (Varsovie).

 
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