B4-0062, B4-0064, B4-0065, B4-0107, B4-0114
Résolution sur le trafic illicite des matières nucléaires
Le Parlement européen,
-vu les articles 2, 3B, 7A, 8A, 100A du traité CE et K1, K3, paragraphes 1 et 2 et K6 du traité sur l'Union européenne,
-vu les recommandations sur la criminalité organisée internationale du Conseil "Justice et Affaires intérieures" des 29-30 novembre 1993, ainsi que les conclusions de la présidence au Conseil européen de Corfou,
-vu la déclaration de Berlin sur une coopération renforcée dans la lutte contre la criminalité en matière de drogue et la criminalité organisée en Europe du 8 septembre 1994,
1.rappelant que, comme pour le trafic international de la drogue, il est indispensable de prendre en compte toutes les facètes de ce "marché" en agissant au niveau de l'"offre" comme de la "demande" de produits fissibles, en enquêtant tant sur les filières de détournement de matières que sur le blanchiment de l'argent et sur les réseaux de revente,
2.alarmé par les risques que fait peser sur l'humanité le commerce illicite de plutonium et d'uranium enrichi et faisant remarquer que les dangers les plus immédiats ne résident pas dans l'explosion d'une bombe atomique, mais sont liés, au départ, à la fabrication elle-même de cette substance hautement toxique, à sa manipulation, à son transport, ou à sa circulation en contrebande, et à son traitement,
3.constatant que la faillite d'un système fondé sur l'absence de séparation entre les aspects civils et militaires du nucléaire a conduit à une situation de grand danger, en ce qui concerne tant la gestion des installations nucléaires que le contrôle des substances radioactives,
4.constatant avec une vive inquiétude que les cas de vol et de trafic illicite de matières radioactives et nucléaires augmentent et que ce processus menace la sécurité des citoyens;
4.1.persuadé que la gravité du phénomène exige instamment une solution du problème au niveau de l'Union, attire d'abord l'attention de la Commission sur le fait que:
-conformément au texte de l'article 3B, deuxième alinéa, du traité CE, la dimension transnationale du problème exige que "les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les Etats membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire",
-dans le cas d'espèce l'action répond aux critères de nécessité, efficacité, proportionnalité aux fins de l'application de l'article 7A du traité,
4.2.demande que la Commission utilise le droit de proposition que lui confère l'article K.3, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne afin de présenter au Parlement et au Conseil une stratégie globale de lutte contre la fraude internationale de produits fissibles tout en garantissant qu'un important effort soit accompli en vue de l'exercice, au niveau mondial, d'un contrôle démocratique sur les produits fissibles et que, en particulier dans le cadre de l'Union européenne, les résultats de ce contrôle soient régulièrement communiqués au Parlement européen;
4.3.demande au Conseil que l'échange d'information en la matière rentre dans la compétence d'Europol conformément à l'article K.1 point 9) TUE et demande que pour cette institution soit prévu un contrôle politique du Parlement européen et que la Cour de justice soit compétente pour les aspects judiciaires;
4.4.invite le Conseil à traiter le trafic illicite de matières nucléaires comme une "forme grave de criminalité internationale" au sens de l'article K.1, point 9) TUE;
4.5.regrette néanmoins qu'il n'y ait pas eu de décisions sur le financement urgent de mesures pour promouvoir l'auto-détermination ("empowerment") des femmes;
4.6.demande que les structures qui sont déjà en place dans le cadre des compétences relevant d'Euratom soient renforcées en établissant un contrôle parlementaire effectué par le Parlement européen et que la mise en oeuvre d'actions préventives contre le trafic illicite de matières nucléaires devienne une composante des relations extérieures de l'Union avec les pays les plus susceptibles d'être concernés;
4.7.réaffirme que le monde développé doit reconnaître son rôle dans ce processus et faire face à ses responsabilités dans les dommages sociaux, économiques et écologiques causés par la surconsommation et le primat accordé à des technologies inadaptées et des modes de vie propices au gaspillage; réaffirme par ailleurs sa volonté d'équilibrer les problèmes de population, de schémas de consommation et de technologie afin d'instaurer un monde juste et durable, digne d'être légué aux descendants de l'actuelle population mondiale;
4.8.propose que les Etats membres de la Communauté des Etats indépendants (CEI) établissent une organisation de sécurité nucléaire - Cisatom - selon les expériences de l'Euratom qui recevrait de la Communauté une aide financière et technique;
4.9.propose d'utiliser les accords de l'Union européenne avec les Etats de l'Europe centrale et orientale pour assurer le contrôle de la matière fissile en collaboration étroite avec Euratom - en anticipant leur adhésion en quelque sorte;
4.10.s'étonne qu'au moment où l'acuité du trafic de matières fissibles se fait le plus sentir, la ligne budgétaire B4-2001 ("Formation et recyclage d'experts en matière de sécurité nucléaire des pays de l'Europe centrale et orientale et des Etats de la Communauté des Etats indépendants") créée à l'initiative du Parlement européen à la suite de sa résolution du 9 avril 1992 sur la sécurité nucléaire dans les pays de l'Europe centrale et orientale et de la Communauté des Etats indépendants et consacrant un million d'écus à la formation et au recyclage d'experts en matière de sécurité nucléaire des pays d'Europe centrale et orientale et de la CEI, ne mentionne plus qu'un " pour mémoire" dans l'avant-projet de budget pour l'exercice 1995 et invite les autorités budgétaires à revenir sur la suppression de cette ligne budgétaire et à rétablir cette ligne;
4.11.demande en outre, que l'Union européenne apporte sa contribution financière, notamment par le biais des programmes PHARE et TACIS, au renforcement des autorités de surveillance indépendantes et techniquement compétentes dans les Etats de l'Europe centrale et orientale et de l'ancienne URSS;
4.12.souhaite que des efforts d'une ampleur maximale soient entrepris immédiatement dans le domaine scientifique en vue de la destruction des armes nucléaires, ce afin que les immenses quantités de plutonium accumulées ne soient pas transformées en un arsenal nucléaire;
4.13.demande que l'Union européenne apporte sa contribution à un programme de fermeture sans délai des installations nucléaires reconnues comme particulièrement dangereuses dans les pays de la CEI ainsi qu'à un programme de gestion des sites de dépôt de déchets radioactifs et des équipements nucléaires obsolètes;
4.14.demande, ainsi que le suggère la Commission, que l'Union européenne apporte sa contribution à l'instauration et l'exploitation d'un véritable système de contrôle et de comptabilité des matières nucléaires, tant au niveau national qu'au niveau de chaque installation, ainsi qu'à la formation des inspecteurs et exploitants, dans les Etats de l'Europe centrale et orientale et de l'ancienne URSS;
4.15.propose l'établissement d'une commission temporaire, à laquelle participeraient toutes les commissions concernées, en vue de l'élaboration d'une position coordonnée sur la communication de la Commission;
4.16.charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des Etats membres et des Etats candidats.