B4-0097, 0117, 0133, 0138, 0151 et 0163/94
Résolution sur la situation en Haïti
Le Parlement européen,
-rappelant ses résolutions antérieures sur la situation en Haïti, notamment celles des 10 octobre 1991, 9 avril 1992 et 28 octobre 1993,
1.considérant qu'en décembre 1990, Jean-Bertrand Aristide a été élu président avec 67 % des voix,
2.considérant qu'en septembre 1991, les militaires conduits par le général Cédras ont pris le pouvoir par un coup d'État,
3.considérant que face aux sanctions de Washington et à l'embargo décrété par l'ONU sur le pétrole et sur les armes, le général Cédras accepte, par la signature de l'accord de Governor's Island en juillet 1993, de se retirer dans un délai de quatre mois, d'organiser des élections libres et démocratiques et de favoriser le retour du président déchu,
4.considérant qu'en mai 1994, suite au non-respect de l'engagement de Governor's Island, l'ONU décide un embargo commercial total et donne, en juillet de la même année, son feu vert à une intervention militaire américaine, soutenue par 25 autres nations,
5.considérant que sous la menace d'une invasion militaire, le régime dictatorial haïtien conclut un accord de dernière heure avec la délégation diplomatique américaine conduite par l'ancien Président Jimmy Carter, le 18 septembre 1994,
6.considérant que cet accord ouvre la voie au retour du Président Aristide et à l'instauration de la démocratie en Haïti, mais laisse impunies les graves violations des droits de l'homme commises par un régime dictatorial illégal, non reconnu par les Nations unies,
7.considérant que la junte militaire et le général Cédras sont responsables des massacres perpétrés contre les partisans de l'état de droit dont le nombre de victimes est de l'ordre de 5 000,
8.considérant que l'arrivée de forces envoyées par les États-Unis et certains États des Caraïbes, agissant sous l'autorité du Conseil de sécurité des Nations unies, a été accueillie avec joie par une grande partie de la population haïtienne,
9.eu égard à la résolution 940 du Conseil de sécurité des Nations unies;
9.1.prend note de l'accord diplomatique intervenu entre la délégation nord-américaine conduite par M. Carter et le régime militaire d'Haïti, qui a évité une invasion militaire de l'île et un inévitable bain de sang et rappelle son attachement à toute résolution pacifique des conflits;
9.2.condamne la répression brutale par les forces de l'ordre haïtiennes des manifestations de soutien au Président Aristide qui, depuis le 18 septembre 1994, ont déjà fait plusieurs victimes;
9.3.demande que mandat soit donné aux forces d'occupation pacifique installées actuellement en Haïti d'intervenir en cas de violation des droits de l'homme - dont le droit de manifester pacifiquement - afin de protéger la population haïtienne contre toute répression policière; insiste sur le caractère temporaire et limité de leur mission;
9.4.demande aux États membres de l'Union européenne siégeant au Conseil de sécurité des Nations unies de veiller à la mise en oeuvre des dispositions de la résolution 940 des Nations unies et exige notamment des garanties quant aux lois d'amnistie et la protection physique du Président Aristide dont le retour dans l'île devrait se faire dans les plus brefs délais;
9.5.demande que l'Union européenne fasse un effort particulier quant à l'assistance, technique et financière, des institutions démocratiques haïtiennes et notamment de son Parlement;
9.6.estime que les États membres de l'Union européenne pourraient jouer un rôle précieux en assurant la formation et le recyclage des forces de police;
9.7.demande que toute mesure de levée de l'embargo soit conditionnée par des actes concrets de mise en oeuvre des accords de Governor's Island et de l'accord du 18 septembre 1994 par les autorités militaires de l'île, notamment le retour au pouvoir du Président Aristide;
9.8.estime que le peuple haïtien devra construire son propre système démocratique, mais reconnaissant qu'une aide économique et technique importante devra être accordée pour arracher ce peuple à la misère;
9.9.charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, ainsi qu'au Secrétaire général des Nations unies, au gouvernement des États-Unis, aux autorités haïtiennes et aux coprésidents de l'Assemblée paritaire ACP/CE.