A4-0123/95
Résolution sur la communication de la Commission concernant une politique de compétitivité industrielle pour l'Union européenne
Le Parlement européen,
-vu la communication de la Commission concernant une politique de compétitivité industrielle pour l'Union européenne (COM(94)0319 - C4-0140/94),
-vu le rapport de la commission économique, monétaire et de la politique industrielle et les avis de la commission de la recherche, du développement technologique et de l'énergie ainsi que de la commission des budgets (A4-0123/95),
1.soulignant la contribution importante que la politique industrielle exposée dans la communication peut apporter au renforcement de la compétitivité de l'Union européenne, en particulier sur les marchés porteurs - en croissance - des technologies de pointe (électronique, communications, informatique, etc.),
2.conscient que la stabilité macro-économique, facteur important de la compétitivité de l'industrie européenne, exige une consolidation des dépenses publiques et que, sous l'effet notamment d'un taux de chômage élevé, les dépenses publiques ont augmenté; considérant que cette évolution absorbe des ressources dont on a un besoin urgent pour effectuer, sur les marchés porteurs, des investissements propres à accroître la compétitivité,
3.considérant que les facteurs immatériels "qualité", "innovation" et "ressources humaines" sont les facteurs de compétitivité de demain, mais que l'acceptation, par les citoyens de l'Union européenne, des grandes évolutions technologiques requiert un débat de société ainsi que la mise en place de mécanismes de consensus sociétal et social,
4.estimant que le dialogue social ainsi que la participation des travailleurs à la définition des actions de qualification, à la modernisation de l'organisation du travail et de la production et aux tables rondes contribuent à renforcer la compétitivité, mais que, dans certains États membres, l'on n'y recourt pas suffisamment à cette fin,
5.estimant que, en ce qui concerne la promotion de la coopération entre entreprises des États membres (en particulier dans les industries-clés mentionnées par la Commission), objectif premier de la priorité d'action "Développement de la coopération industrielle", des propositions détaillées propres à inciter les entreprises à pratiquer des formes concrètes de coopération en matière financière et en matière d'organisation font toujours défaut,
6.conscient que l'industrie européenne est faite essentiellement d'un réseau dense de PME et qu'il est donc nécessaire de prendre davantage en compte l'importance que les PME présentent pour la compétitivité de l'économie européenne,
7.considérant que, à l'heure actuelle, un grand nombre d'entreprises européennes opèrent sur des marchés en stagnation,
8.estimant que, compte tenu de la pression exercée par la concurrence internationale, il n'est possible de renforcer la compétitivité de l'industrie européenne qu'en assurant la cohérence entre politique du marché intérieur, politique industrielle, politique de concurrence et politique sociale,
9.considérant que l'actuelle politique de la Commission en matière de contrôle des aides est parfois totalement contradictoire, en ce sens qu'à la libéralité avec laquelle des subventions élevées sont autorisées en faveur de grandes entreprises s'oppose la pratique que la Commission suit, surtout à l'égard des petites et moyennes entreprises, en matière d'autorisations dans le domaine des aides régionales, des aides à la R & D et des aides aux PME,
10.demandant la modernisation de l'action des pouvoirs publics; considérant que le rôle futur de ceux-ci doit être déterminé en fonction de ce que l'on est en droit d'attendre d'un État de droit opérationnel, d'une administration publique efficace et d'infrastructures performantes; estimant que la réalisation de ces objectifs suppose non seulement, tels que la Commission les mentionne à titre de facteurs de modernisation essentiels, une déréglementation au sens de la suppression des règles administratives superflues, l'allégement des procédures administratives et l'accélération de leur mise en oeuvre, un recours accru aux incitations fondées sur l'économie de marché et des privatisations judicieuses, mais aussi et d'abord une réglementation innovatrice,
11.considérant que des conditions-cadres fiables facilitant, au bénéfice de l'industrie, le développement des technologies de l'information et de la société de l'information constitueront l'un des principaux facteurs qui détermineront la compétitivité de l'économie européenne à l'échelle mondiale,
12.considérant que, si elle ne fait pas sienne la révolution des technologies de l'information et si elle ne s'adapte pas à une culture industrielle de l'évolution technologique permanente, l'Europe s'en trouvera réduite à une économie caractérisée par des niveaux peu élevés de compétence, de salaire et de productivité,
13.conscient que tous les facteurs évoqués ci-dessus influent sur la compétitivité de l'industrie européenne;
13.1.se félicite que, dans la communication à l'examen, la Commission pose en principe que, comme le Parlement européen le demande déjà depuis longtemps, les compétences des pouvoirs publics doivent être élargies à des mesures actives de politique industrielle, et qu'elle reconnaisse pourtant que le secteur public doit être modernisé, les règlements administratifs simplifiés, au profit en particulier des petites et moyennes entreprises, et des conditions-cadres favorables créées en garantissant la concurrence;
13.2.souligne que la concurrence mondiale exige des entreprises qu'elles puissent s'affirmer comme "global players", et qu'une politique de renforcement de la compétitivité doit créer les moyens d'action nécessaires à cet effet en adaptant les principes de l'actuelle politique de concurrence de l'Union européenne aux conditions de la concurrence mondiale; considère que la politique industrielle ne saurait cependant poursuivre ses objectifs qu'en tenant compte de la nécessité d'assurer des conditions de concurrence équitables et doit donc prendre les dispositions du GATT pour cadre de référence, et invite les États membres à concourir le plus rapidement possible, de manière coordonnée et efficace, à la réalisation des objectifs de politique industrielle et, ainsi, à apporter une contribution importante à la mise en oeuvre du Livre blanc sur la croissance, la compétitivité et l'emploi;
13.3.se félicite, y voyant autant d'aspects positifs, de la définition claire qui est donnée, sous forme de priorités d'action, des objectifs principaux de la politique industrielle à mettre en oeuvre et, en particulier, de la place importante qui est réservée à une recherche considérée comme facteur de compétitivité ainsi que de la reconnaissance du potentiel de croissance du marché des technologies environnementales et du marché des produits respectueux de l'environnement;
13.4.estime que les Etats membres devraient pousser les entreprises nationales à affecter des parts croissantes de profits à la recherche, surtout dans le domaine des technologies environnementales, par des actes efficaces de politique fiscale;
13.5.souscrit à l'analyse que la Commission fait de la situation ainsi qu'aux priorités d'action qu'elle formule: promouvoir l'investissement immatériel -en particulier la formation professionnelle -, développer la coopération industrielle, assurer une concurrence équitable et moderniser le rôle des pouvoirs publics;
13.6.estime que, sous l'angle des objectifs susmentionnés, la communication de la Commission apporte une contribution importante au renforcement de la compétitivité de l'industrie européenne;
13.7.déplore toutefois que, alors que les entreprises commercialisent les résultats de la recherche, l'industrie européenne présente une capacité d'innovation relativement faible, cependant que l'on ne progresse toujours pas en matière de création de conditions-cadres favorables, en particulier en ce qui concerne la protection de la propriété intellectuelle (brevets, marques et modèles), l'établissement de normes communes et la reconnaissance mutuelle des titres;
13.8.considère que la politique actuelle de recherche et de développement ne répond qu'en partie aux problèmes technologiques de la compétitivité;
13.9.invite les États membres à pratiquer une politique active du marché de l'emploi, visant à en accroître la flexibilité et à développer une structure de croissance à fort taux d'emploi;
13.10.souligne la nécessité de renforcer un développement durable en favorisant la protection préventive de l'environnement et les technologies environnementales intégrées et invite donc la Commission à présenter un programme d'investissements dans les systèmes et technologies respectueux de l'environnement, de manière à tenir pleinement compte du potentiel très considérable qu'un accroissement des investissements dans ces secteurs industriels porteurs recèle tant en termes de compétitivité de l'industrie européenne qu'en termes de création d'emplois;
13.11.estime que les États membres devraient favoriser aussi un débat de société sur les évolutions technologiques ainsi que la mise en place de mécanismes de consensus social;
13.12.estime que toute politique industrielle moderne doit créer des richesses pour la société, objectif dont la réalisation peut être favorisée par le dialogue social ainsi que par la participation des travailleurs, et demande que le programme LEONARDO soit mis à profit, développé et modernisé en permanence aux fins d'amélioration de la compétitivité individuelle par la formation professionnelle; estime que le dialogue social doit porter plus particulièrement sur les innovations à mettre en oeuvre dans le domaine des formes du travail et de la production et, notamment, sur les objectifs suivants:
- axer l'organisation du travail et de la production sur les impératifs d'une qualification accrue, sur les impératifs d'une formation et d'un apprentissage continus ainsi que sur la prise en compte du savoir-faire des travailleurs d'un certain âge;
- assurer la perméabilité des systèmes de formation; assurer, entre États membres, non seulement la reconnaissance mutuelle des titres, mais aussi la compatibilité des cycles de formation; obtenir que, en cas de changement d'entreprise, le niveau de qualification atteint après la formation professionnelle initiale soit, lui aussi, pris en compte;
- former les cadres à la gestion des structures décisionnelles de l'entreprise;
- assurer la participation des travailleurs aux discussions et dialogues sur les problèmes concernant l'avenir de l'entreprise;
13.13.invite la Commission et les gouvernements des États membres à adopter des politiques concertées et cohérentes favorisant le développement des technologies de l'information et de la société de l'information au bénéfice de l'industrie, de manière à en promouvoir la compétitivité à l'échelle mondiale;
13.14.invite la Commission à lancer, de toute urgence, des débats sur l'évaluation de la société de l'information, sur le secteur productif et le secteur des services ainsi que, comme indiqué dans son programme de travail 1995, sur une meilleure interaction entre recherche et industrie;
13.15.estime que le champ d'application des programmes de recherche et développement et des Fonds structurels doit être élargi aux dimensions "dialogue social" et "participation";
13.16.demande que soient élaborées des propositions détaillées relatives à des critères applicables aux entreprises communes ciblées et accords de coopération à long terme destinés à mettre en oeuvre la coopération industrielle;
13.17.estime qu'il y a lieu d'exploiter pleinement le potentiel d'innovation et de création d'emplois que présentent les PME, car il est susceptible de renforcer la compétitivité, et que, à cet effet, il convient de faciliter la participation des PME au marché intérieur en simplifiant l'accès aux informations concernant les programmes communautaires destinés à favoriser l'innovation et la compétitivité, en renforçant la capacité des PME à accroître leurs fonds propres, en mettant à disposition des capitaux à risque et en réduisant les charges administratives imposées par la bureaucratie nationale, et demande, dans le cadre de la révision du FEI, la création d'un instrument de financement de capitaux à risque ou la mise au point d'une cotation des valeurs mobilières pour les PME;
13.18.demande la définition et la mise en oeuvre, en faveur des entreprises qui opèrent sur des marchés en stagnation, d'une stratégie d'adaptation active qui prévoie des programmes de recherche et développement conçus en fonction des problèmes de ces entreprises, l'accroissement de la productivité par une amélioration des concepts d'organisation et de gestion ainsi qu'une spécialisation dans le sens de la fabrication de produits répondant à des exigences rigoureuses en matière de qualité et de conception;
13.19.déplore que, en ce qui concerne la mise en place des conditions d'une concurrence équitable, le respect des normes sociales et environnementales ne soit exigé, des pays tiers, que dans le contexte du commerce mondial, alors que la nécessité de respecter ces normes n'est pas évoquée dans les observations relatives au marché intérieur;
13.20.souligne que la modernisation de l'industrie doit aller de pair avec la modernisation des pouvoirs publics, impératif en fonction duquel doivent être définis leurs domaines d'action stratégiques, des rythmes de travail conçus dans leur totalité, des hiérarchies planes, un travail axé sur des projets, un service de qualité; demande que des instruments communautaires soient mis en oeuvre pour soutenir des projets modèles, de sorte que les pouvoirs publics puissent remplir leurs missions, à savoir:
- exercer un contrôle et fixer des normes qui, s'agissant des marchés du travail, des transports, de l'énergie et de la formation continue, doivent notamment satisfaire à des critères sociaux et environnementaux;
- promouvoir l'économie dans le cadre de diverses politiques: structures régionales, PME et technologies;
- organiser, tout en y participant en tant qu'interlocuteurs, un dialogue rassemblant différents acteurs à différents niveaux;
- assumer une responsabilité directe en matière d'orientation des évolutions en tant que demandeurs en technologies de pointe dans les secteurs des communications, de la santé, des infrastructures et de l'élimination des déchets;
13.21.déplore que la communication ne permette pas de faire nettement la distinction entre ceux des programmes d'action et des programmes politiques mentionnés qui sont déjà mis en oeuvre et ceux qui doivent encore l'être;
13.22.déplore aussi que la fiche financière jointe à la communication ne contienne aucune indication concernant le volume des ressources humaines et financières supplémentaires nécessaires pour réaliser les actions mentionnées, ni concernant les réaménagements qui, autrement, devraient être opérés dans le budget;
13.23.exhorte les États membres à évaluer quelles seraient les répercussions sur leur budget de l'application des mesures prévues dans la communication de la Commission;
13.24.charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux gouvernements des Etats membres.