Radicali.it - sito ufficiale di Radicali Italiani
Notizie Radicali, il giornale telematico di Radicali Italiani
cerca [dal 1999]


i testi dal 1955 al 1998

  RSS
mer 12 feb. 2025
[ cerca in archivio ] ARCHIVIO STORICO RADICALE
Archivio Partito radicale
Pannella Marco - 2 luglio 1976
Vaincre ou Mourir
par Marco Pannella

SOMMAIRE: Le Parti radical se présente pour la première fois aux élections politiques du 20 Juin 1976 et il réussit à atteindre le quorum, et à obtenir l'élection de quatre députés. Marco Pannella raconte la recherche désespérée, quelques jours avant le vote, d'un emprunt de deux cents millions de lires pour essayer de briser le mur du silence qui est tombé sur les listes radicales, la rencontre nocturne avec Gianni Agnelli et les 19 heures consécutives du fil direct à Radio Radicale.

(La Prova Radicale - Juillet-Août 1976)

Il ne reste que dix jours avant les élections. Nous découvrons par hasard que, si nous réussissons, nous aurons droit à plus de 200 millions de remboursement de frais électoraux. Nous en parlons avec Gianfranco et Paolo. Je connais mes prévisions. Il est plus que probable que nous ne réussirons pas. Si les élections avaient lieu le lendemain, nous aurions probablement le nombre de voix nécessaire, mais le jeu de massacre a déjà commencé. Il ne nous reste que six minutes de Télévision. Nous n'avons pas une lire pour la publicité dans les journaux, pour les affiches, pour n'importe quelle autre initiative. Nous nous déplaçons pour les meetings en nous débrouillant avec notre propre argent, en faisant des dettes personnelles. En attendant, finis les jeûnes, les affrontements avec le PCI pour les listes, le silence est tombé; pas un mot n'est dit ou écrit sur nos objectifs politiques, sur les arguments que nous proposons, sur les projets généraux.

Les signaux que nous avons émis à la Rai-Tv seront effacés par le bombardement de la censure et de la mystification. Si seulement nous réussissions à faire une seule annonce d'une demi-page sur tous les quotidiens le vendredi d'avant les élections! Certes, nous n'atteindrions qu'un dixième de l'électorat: mais cela suffirait certainement à nous permettre d'en retenir l'essentiel, le nécessaire. Dix jours auparavant j'avais demandé un sondage démoscopique sur la ville de Milan. Les résultats qui sont arrivés six jours avant les élections sont une confirmation: nous avons 2% des électeurs pour nous, et en projetant ce pourcentage sur la circonscription toute entière, nous devrions avoir plus du 1,6% pour le quorum névessaire. Mais si nous perdons le moindre vote, nous en avons terminé.

La situation est tragicomique. Si nous avions l'argent, même une partie, que nous devrions obtenir un mois après les élections, il est mathématique à notre avis, que nous y arriverions. Il suffirait d'un emprunt. Nous n'y arrivons pas et nous sommes pratiquement sûrs d'être battus. En quelques heures nous nous adressons à tout le monde, de tous côtés, avec une angoisse grandissante, tandis que nous continuons nos meetings dans toute l'Italie, avec la grève des compagnies aériennes, les trains en retard, les camarades à bout.

On voyage en voiture, la nuit; garder le contact par téléphone est une entreprise hallucinante. Autour de notre enthousiasme, les aides semblent se multiplier. Ils n'y croient pas: c'est par superstition - pensent-ils - que nous continuons à mettre en garde: nous allons être battus. Ainsi l'autre danger arrive: on ne votera pas, tant parceque l'on a peur de gâcher des voix, que parce que "de toutes façons, désormais, ils y arriveront", pensent-ils.

De la Sicile à Milan, j'ai essayé de comprendre, après trente ans que je suis dans la politique, comment on peut trouver, non pas tant un "financement" qu'un emprunt pour vingt jours. Nous sommes disposés à tout, à nous engager personnellement. Un espoir semble poindre.

A Milan, un groupe d'ex-jeunes industriels progressistes, une paire de "radicaux" Scalfariens, se sont annoncés, après presque vingt ans de silence total. Pas même dix-mille lire pour les droits humains, en tant d'années. Mais ils trouvent tout à coup, que nous ne sommes pas très gentils envers Scalfari.

Ils apportent alors un Million de lires en liquide au siège lombard. Nous le leur restituons (Paolo risque l'infarctus) avec un télégramme: "Gardez-le pour la prime de fin d'année de votre majordome ou pour le pourboire de vos domestiques".

Il me vient alors une idée que, quel qu'en sera le résultat, nous jugeons rentable politiquement. J'essaie de savoir où se trouve actuellement Gianni Agnelli. En Espagne, me dit-on. Je n'ai pas de passeport: cela fait des années qu'on ne me le renouvelle pas. Tant pis pour les trente années de moralisme: je téléphone à Cossiga pour lui demander un laisser-passer, pour 24 heures. Il est très aimable. Le Préfet de Rome me téléphone en m'assurant un laisser-passer pour quelques jours, en attendant de faire mieux. Les avions partiront-ils? Il y a quelques années la police espagnole ne me laissa pas entrer. Et cette-fois-ci?. Mais finalement j'apprends qu'Agnelli est rentré à Turin. Il est 19 heures. Il me dit qu'il sera à Rome dans deux jours, et que nous pourrons nous rencontrer. Je lui réponds qu'il ne me reste que quelques heures pour lui soumettre un problème: s'il ne peut rien faire, tant pis. Mais il faut que je le voie cette nuit au plus tard. Demain matin, à 11 h 30 je dois être à Palerme. Je ne sai

s si je trouverai un avion mais j'irai tout de suite à Fiumicino. Il y a là des camarades qui me donnent un coup de main et que, hier encore, je ne connaissais pas. Je réussis à partir pour Gênes et non pour Turin. L'"Avvocato", aimable, m'avais envoyé, inutilement, un chauffeur, à l'aéroport de Caselle.

J'arrive chez lui vers minuit. J'avais prévu d'y rester une demi-heure maximum. L'avvocato est allé se coucher mais je suis son hôte pour la nuit. Nous nous voyons à l'aube. Je lui explique la chose: un emprunt pour vingt jours, cautionnement, aval de traite, que sais-je? Il est embarassé. Il consulte quelqu'un par téléphone. Je comprends qui et je commence à m'amuser: l'avvocato sait très bien qu'il sera déconseillé. "Bien sûr - me dit-il - il faudrait trouver quelqu'un disposé à "miser" sur vous; sportivement, j'entends. Il sait qu'à Rome, untel pourrait le faire..."

"Non, avvocato, c'est à vous que je le demande, et il ne me reste que très peu de temps, un quart-d'heure pour l'exactitude, sinon je rate mon avion".

"Voyez-vous, il faudrait que je fasse apparaître cette opération ou sur la comptabilité de la boîte ou sur celle... Si on l'apprenait, même pour vous..." A propos, avvocato, j'oubliais de vous dire que si la chose se fait, elle doit-être rendue publique. Par conséquent n'ayez aucune inquiétude. Ce n'est pas comme l'histoire des quatre cents millions à Sogno, avec ses golpes.

Alors, l'embarras se dissipe. "Je suis navré, je ne peux vraiment pas". Bien sûr, Avvocato.

A midi, je suis à Palerme. A 17 heures à Messina. A 21 heures à Catania. A 3 heures du matin de nouveau à Palerme, où nous trouvons un hôtel à 5 heures, et à 6 heures 30 on devrait partir pour Milan, pour enregistrer le dernier appel régional, parler à 17 heures à Pavia, à 19 heures à Lodi, puis à Monza... Je n'ai même pas le temps de dire à Rome que tout a été inutile. Paolo s'en doute, et avec dix millions il fait quelques placards. De toute la presse italienne, seuls "Il Messaggero" et "Il Tempo" acceptent. Pendant ce temps, Berlinguer nous aggresse dans sa conférence de presse à la Tv. Nous sommes des menteurs et des exhibitionnistes. "Paese Sera" accomplit son oeuvre de "killer" de Cefis, Agnelli, du "Parti". Jusqu'à l'éditorial que nous republions: de toutes façons nous ne pouvons pas répondre. Arrigo Benedetti signe ces rafales de gros calibre, comme les mafiosi: il les signes, plus précisément pour être encore, à tout prix, le "directeur". Le Pci s'était rendu compte, avant nous, que des centain

es de milliers de camarades communistes allaient voter pour nous.

Les derniers meetings sont de véritables triomphes. A Milan, la place du Dôme est bourrée jusqu'à minuit d'une foule émue, enthousiaste. Je leur dis: on n'y arrivera pas. J'explique pourquoi. Ils n'y croient pas. C'est impossible: personne n'a rempli la place de cette manière. Et ce n'est pas simplement par curiosité. Il y a ici des électeurs décidés. Les résultats m'ont donné raison: à milan nous n'y sommes pas arrivés. Je repars à Rome. Il ne reste plus maintenant qu'à m'asseoir 19 heures durant, ou davantage, à Radio Radicale. Pour la première fois depuis des mois, après les jeûnes, les meetings, les réunions, les nuits blanches et les journées presque hallucinantes, mêmes si les unes et les autres, tellement pleines de vie, d'amour, de dialogue, de batailles gagnées. Je me paye une promenade. Je vais à pied, du Parti à la Radio, à Monteverde Vecchio (quartier de Rome sur une colline, NDT). Je traverse Place Navona, Via Giulia, le Tibre, je dévie un peu jusqu'à Regina Coeli (prison, NDT), puis vers V

ia Garibaldi, Porta San Pancrazio. Il y a un coucher de soleil limpide, chaud, printanier. Des personnes m'arrêtent, elles me disent "tout ira bien".

Puis ces trente heures de dialogue sans arrêt, terribles, la radio, le téléphone, cette marée d'amitié, de compréhension, de croissance commune, de nouveaux et de vieux camarades, de nuits blanches de familles entières, réunies depuis Dieu sait quand, de confiance émue et de découverte de soi, avant même la découverte des autres, et les voix des aveugles, des aveugles de toutes sortes, que nous sommes toujours mais que nous ne savons pas. Nous n'y sommes pas arrivés, chers camarades, chers amis, mais il nous reste encore la moitié de la nuit, et l'aube, puis une heure encore.

De toutes manières, c'est très bien ainsi. Même si pour le Parti, c'en est fait, ce parti à peine découvert, aimé.

Mais, parce que nous avons su voir, tous ensemble, voir avec courage, avec clairvoyance, parce que nous avons su ne pas mentir, ne pas nous mentir à nous-mêmes; parce que, jusqu'au dernier moment, nous n'avons pas abandonné l'espérance reconquise dans l'importance de chacun de nous, c'est seulement à 14 heures de ce Lundi 21 Juin que nous avons su que nous avions réussi (en Italie, les bureaux de vote sont ouverts le Dimanche toute la journée et le Lundi jusqu'à 14 heures, NDT).

Grâce à trois cents d'entre-nous, trois cents sur quarante millions; trois cents petites croix au crayon, moins que celles que l'on applique pour une "bataille navale", nous avons sauvé quatre cent mille voix, quatre cent mille espérances. Nous n'avons pas permis qu'une seule voix ne se perde. Nous avons été heureux et nous le serons encore avec tant d'autres, heureux et plus libres. Pas mal, n'est-ce pas "avvocato Agnelli" ?

 
Argomenti correlati:
stampa questo documento invia questa pagina per mail