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Pannella Marco, Guce - 20 novembre 1980
CONVENTION ACP-CEE

SOMMAIRE: Marco Pannella a fait de la lutte contre l'extermination par la faim la bataille principale du Parti Radical la première moitié des années 80. Au Parlement européen et dans son assemblée conjointe des parlementaires des pays CEE et ACP, il a toujours exposé avec lucidité et clairvoyance des positions qui visaient à résoudre, à ses racines, les problèmes des pays du Tiers-Monde et à surmonter les causes d'arriération économique et politique de ces pays. La création de bases pour un développement économique autonome et la démocratie sont les seuls remèdes à ces situations dramatiques (20-11-80)

M. Pannella - Monsieur le Président, durant les quelques minutes dont je dispose, je dirai tout d'abord à Sir Fred Warner et à d'autres collègues, qui se sont émerveillés du fait que nous sommes très peu nombreux, que la manière de nos collègucs du Parlement de s'occuper de la faim dans le monde et des ACP, c'est de leur assurer le tourisme dans le monde... Car si nous devons nous réunir en Tanzanie, tout le monde est là, mais si nous devons travailler ici, personne n'est présent. C'est une observation cynique, dure, mais elle est vraie.

En ce qui nous concerne, Monsieur le Président, nous disons que ce rapport ne nous satisfait pas, non pas parce qu'il y manquerait de bonnes observations ou qu'on n'y exprimerait point de bons espoirs, mais parce qu'il se borne à prendre acte d'un accord qui, désormais et pour les raisons que notre collègue Israël vient d'ailleurs de souligner, n'est pas à la hauteur dela tragédie économique, sociale et humaine qui se déroule dans ces pays.

Tout d'abord, Monsieur le Président, nous devons cesser, je crois, de nous donner bonne conscience à bon marché. Je le dis à la Commission aussi bien qu'au Parlement. Lorsque deux tiers du volume global des échanges sont ceux de deux pays seulement, le Nigéria et la Côte d'Ivoire, il faut y réfléchir. Lorsque le STABEX, un excellent principe, si nous pouvions dire à l'origine qu'il était bon, ne se traduit plus guère dans les faits. La ligne générale est bonne, mais les faits ne le sont pas.

Lorsque nous nous sommes réunis à Luxembourg, le représentant d'un pays qui n'est pourtant guère révolutionnaire, le Sénégal, s'était permis de souligner - et il a très bien fait - que le Parlement européen paraît tenir un double ou un triple langage. J'estime que si cela est cynique, ce n'en est pas moins vrai.

En ce qui concerne les problèmes des droits de l'homme, le néo-colonialisme idéologique le plus dangereux nous empêche tous de l'affronter. Lorsqu'on dit que ces gens là ne méritent pas la liberté et la démocratie politique, etc., c'est l'un des arguments les plus honteux, mais aussi les plus dangereux, car cette observation s'appliquait aussi à l'Italie fasciste: les peuples latins, paraît-il ne méritaient pas la démocratie politique; aujourd'hui, ce sont les pays africains, ce qui, en réalité, permet aux successeurs de Foccart d'installer plus aisément les Bokassa et ceux qui suivent.

Monsieur le Président, j'en ai fini. Nous voterons contre, non pas parce que la lettre du rapport est d'une quelconque manière contraire aux attitudes de notre Parlement, mais parce qu'il le respecte. C'est la philosophie Ferrero: c'est, parait-il, la philosophie euro-communiste. C'est la philosophie de la bonne volonté, de la bonne conscience à très bon marchés. Je crois que, dans quelques mois, nous en aurons une démonstration: parmi les 60 pays associés au titre de Lomé, au moins 50 verront leur économie progressivement détruite. Nous verrons nos rapports se dégrader de plus-en plus. Ceux qui continuent à affirmer que ces accords sont suffisants, mentent à eux-mêmes. Je ne dis pas qu'ils mentent. Ils se leurrent. Un instrument politique est bon s'il permet de faire face à ce qui arrive, non pas seulement à ce qui est arrivé dans le passé. Pour moi ce rapport consiste à prendre acte, non seulement des accords de Lomé mais tout simplement d'une faillite de plus en plus grave.

Je crois que nous devons, nous radicaux italiens, d'être un tout petit peu plus rigoureux en la matière, je crois que nous devons accomplir cet acte d'humilité, en disant sans peut-être savoir comment imposer autre chose, que cette position que vous allez prendre, ces rapports que vous allez consacrer sont des rapports qui leurrent. C'est pour cette raison que nous voterons contre.

 
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