Radicali.it - sito ufficiale di Radicali Italiani
Notizie Radicali, il giornale telematico di Radicali Italiani
cerca [dal 1999]


i testi dal 1955 al 1998

  RSS
mar 25 feb. 2025
[ cerca in archivio ] ARCHIVIO STORICO RADICALE
Archivio Partito radicale
Pannella Marco - 25 dicembre 1980
Vous libérez D'Urso, Camarades?
par Marco Pannella

SOMMAIRE: Le juge italien Giovanni D'Urso est kidnappé par les Brigades Rouges le 12 Décembre 1980 avec, comme revendication, la fermeture de la maison d'arrêt de l'Asinara. A travers Radio Radicale, le PR lance une campagne soutenue pour la libération du magistrat et pour contrecarrer la tentative du "parti de la fermeté" d'utiliser la mort de Giovanni D'Urso pour des manipulations d'empreinte autoritaire. Dans l'article publié par "Lotta Continua", Marco Pannella affirme que les radicaux et les nonviolents sont défavorables à l'instauration, avec les violents, de toute négociation, mais qu'ils sont, par contre, toujours disponibles pour un dialogue avec les "camarades assassins": "Considérez-nous à votre disposition non pas pour collaborer mais pour dialoguer loyalement".

("Lotta Continua" - Décembre 1980, Extrait de "Marco Pannella -Ecrits et Discours - 1959-1980", Gammalibri éditeur, Janvier 1982)

Le communiqué des BR, donc, était apocryphe. Mais bienvenu quand-même. Il nous a incité à réfléchir, en tant que radicaux, encore plus, sur ce qui peut-être tenté, imaginé, donc sur ce qui est juste et possible.

Notre position sur le "cas Moro" fut très claire, autant que censurée, et encore maintenant méconnue. Nous étions sans réserves, et indépendamment du jugement sur la volonté ou les intérêts des BR, pour le dialogue et contre la négociation.

Et nous étions engagés jusqu'au bout, jour après jour, à exiger que toute initiative et toute ligne politique soient parcourues dans les tracés constitutionnellement prévus et obligés. La responsabilité appartient au Gouvernement, d'agir selon les ordres reçus ou à recevoir du Parlement, et sous sa surveillance.

L'évènement exigeait, à cause justement de son caractère dramatique et extraordinaire, de s'en tenir à ce que la Constitution et les règles institutionnelles prévoient, exigent. Lorsque les BR refusaient le droit et les lois, considérés hypocrites ou faux, nous demandions à ce que l'on réponde avec le respect le plus total des lois et du droit. Débat parlementaire donc, grand, continu et constant, jusqu'à ce que Moro ne soit libéré. Prise de responsabilité à travers un processus contradictoire et public pour la formation des volontés et des choix, comme le prévoit la constitution, aussi bien pour le Parlement que pour la Justice.

Au contraire, le Parlement fut exclus. Même le Statut de la Dc fut violé, par un processus aberrant et ignoble, en empêchant le Conseil national et la Direction de se réunir et délibérer, pour réserver à une "délégation" auto-nommée et abusive, tous les pouvoirs. Même chose dans les autres partis.

Même l'initiative socialiste fut menée avec les mêmes méthodes, en dehors et contre les règles de la prudence juridique, constitutionnelle et institutionnelle.

On refusa aux BR -justement- de leur concéder la reconnaissance de force combattante et ennemie, qu'elles demandaient en voie préjudicielle pour négocier la libération de Moro. Mais cette reconnaissance n'est donnée par les plus hautes sphères de l'Etat que quelques mois plus tard, lorsque l'on proclama officiellement que le Pays était en "état de guerre" et que l'"ennemi" était les BR...

Comme nous le disions, tout cela ne pouvait pas ne pas porter à la catastrophe. Mais nous étions bâillonnés, censurés, avec un pays qui aujourd'hui encore n'a pas la possibilité de connaître et de juger la ligne soutenue par les radicaux pour défendre avec la vie de Moro celle du droit et des lois. Les BR et les terroristes de tous bords virent s'accroître leurs rangs grâce au rassemblement, non pas de ceux qu'ils auraient pu engager par une solution "politique" et "généreuse" dans cette aventure horrible, mais de ceux qui, par désespoir social, de génération, culturel et existentiel, ou par fanatisme justicier ou militaire, subissaient la fascination de la mort et de la violence. Tout le monde fut entraîné dans la catastrophe: en commençant par les lois de l'Etat, mois après mois, massacrées au nom d'une pseudo-efficacité répressive que les terroristes et les violents voulaient justement provoquer: pour démontrer que le droit n'est que l'expression et la couverture du pouvoir. Aldo Moro en fut la premi

ère victime.

Après tant d'années, c'est au tour de Giovanni D'Urso, dans un scénario pas très différent de celui du 16 Mars. Mais avec une grande différence: le 16 Mars pour capturer aldo Moro, on assassina les hommes de son escorte, d'humbles employés de police qui accomplissaient leur tâche. Libérer Moro, le puissant, l'ennemi, après avoir assassiné via Fani les quatre agents, constituait une difficulté politique, idéologique, "humaine" aussi, une contradiction périlleuse.

Aujourd'hui, par bonheur, ceux qui ont kidnappé D'Urso n'ont pas commis, pour l'instant, d'autre délit que celui du rapt. Il faut, cette fois-ci, que le PR et le mouvement démocratique de classe, le mouvement nonviolent, ceux qui croient à l'humanisme juridique et à l'Etat de droit, tous ceux qui n'entendent pas sacrifier à un projet d'homme ou de société, l'homme et sa vie, que les révolutionnaires "non-poujadistes" et les réformateurs "non-riformisti", réussissent à approfondir à un tel point leurs convictions et à les renforcer de manière telle à permettre à cet évènement, un résultat de vie, d'humanité, de croissance du droit et de défaite de la violence.

Il est possible que la vie et non pas la mort de Giovanni D'Urso, vie qui lui appartient, vie sacrée au moins autant que celle de tous ceux qui le gardent prisonnier et menacent d'assassiner, se transforme en une occasion de victoire et de croissance pour tous, de part et d'autre, dans la seule direction où il puisse y avoir croissance et espoir, et non pas désespoir et néant. Il est possible de convaincre, de vaincre, aujourd'hui et toujours, tous ensemble. Et non pas l'un contre l'autre. Dialogue. Dialogue. Dialogue. Pas de négociations. Il n'y a pas de négociation possible et digne de respect nulle part si elle est imposée par la violence, la peur,le chantage. On désobéït aux ordres injustes: c'est un devoir. On ne collabore pas avec ceux qui pratiquent la violence: c'est un devoir. Il n'y a pas de règles de guerre à suivre: pour le bonheur et par la volonté du peuple elle est bannie par la Constitution, dictée par l'antifascisme de la Résistance, et trahie par l'"antifascisme" et par le "néofascism

e" des partis parlementaires, de 1947 à aujourd'hui, avec la seule exception du PR. Dialogue, et dialogue loyal, et sans conditions.

Si les Brigadistes Rouges pensent vraiment qu'ils sont "rouges", je répèterai à ces camarades assassins, qu'ils ont choisi l'assassinat, le terrorisme, la violence, le sacrifice non seulement des autres mais également d'eux-mêmes, et qu'ils se trompent, ils se trompent terriblement. Et qu'il est terrible, que c'est un travail de Sisife, que de "lutter pour libérer" un camarade détenu, alors que les détenus pour terrorisme vrai ou présumé tel, sont déjà plus de mille, et que des milliers d'autres risquent de l'être, qu'ils vivent de toutes façons comme s'ils l'étaient déjà, qu'ils assassinent et qu'ils meurent, et voient croître autour d'eux la douleur, le désespoir, le déchirement; et s'ils continuaient de choisir des formes de lutte qui multiplient le nombre des camarades détenus.

Alors que d'autres se suicident "directement" et que d'autres encore dénoncent leurs camarades, pour les sauver peut-être, en plus de se sauver eux-mêmes, ou dans cette illusion du moins, ou en payant ce juste prix pour sauver la rigueur de leurs convictions.

De toutes façons il ne s'agit pas de nous convaincre mutuellement, de tout. D'un seul coup. Nous autres révolutionnaires par amour, nonviolents. Vous, révolutionnaires par haine, violents. Il s'agit aujourd'hui de dialoguer pour tirer le plus grand profit, de force, de la vie -sacrée au moins autant que la vôtre- de Giovanni D'Urso. Pour extraire tous ensemble, le caractère extraordinaire d'un résultat exemplaire et positif, de cette situation immonde.

Je ne sais pas ce que vous pouvez faire. Mais ce que vous ferez ou ne ferez pas, ce que vous saurez inventer et créer, il n'y a que vous qui en êtes responsables. Il est difficile de bien choisir, sans pouvoir faire grand'chose, et discuter et rechercher ce qui est le mieux et le plus avantageux. Vous êtes en effet des "militaires" et nous des civils, vous êtes des "clandestins" et nous des vivants au milieux des gens; vous, vous devez inventer à tout moment la bonne façon de parler, d'agir, et nous, nous avons les règles de la Constitution et des processus qu'elle prescrit, et celles de notre parti, ou de la démocratie.

C'est à nous, par contre, de respecter nos règles, celles pour lesquelles et au nom desquelles nous sommes légitimés pour vous condamner comme nous condamnerions nous-mêmes si nous agissions comme vous.

Nous avons le devoir bien plus grave d'exiger que le Parlement, les partis, la "politique", respectent eux-mêmes, leurs prérogatives et leurs règles, pour essayer de libérer D'Urso, de lui sauver la vie, de vous aider et de vous permettre, dans le respect absolu des lois, de nous le rendre sain et sauf. C'est dans ce sens-là que vont les décisions et les propositions du groupe radical, rendues publiques hier.

Mais vous ne pouvez pas commettre l'erreur d'exiger ce que votre adversaire ne croit pas. Lorsque nous-autres nonviolents faisons des jeûnes dramatiques, ceux de la soif ou de la faim, nous ne demandons jamais à ce que l'on nous donne ce que nous croyons juste d'avoir et voulons obtenir. Nous jeûnons pour que le pouvoir respecte sa propre légalité, ses propres engagements ponctuels, qu'il cesse sa violence, qu'il cesse d'oeuvrer contre ce qui est et doit-être une loi même pour lui, lui qui l'a imposé et qui en exige le respect par les autres.

Vous ne pouvez pas non plus commettre l'autre erreur de proposer le marché de la vie, n'importe quelle vie dans n'importe quel sens, la vôtre et celle de vos camarades, ou celle de Giovanni D'Urso, ou de qui que ce soit. Cela serait nuisible plus qu'inutile parceque le pouvoir veut la mort, et D'Urso lui sert en tant que martyr et non pas vivant. Bien sûr cela demande d'étudier, de se documenter à fond, d'évaluer et de connaître les contradictions existantes chez les adversaires, gagner du temps, de l'espace, de l'espace physique et de l'espace dans la conscience populaire et dans celle de chacun, et mettre à nu et essayer de battre non pas la "violence", mais celle-ci, et puis encore cette autre, et cette autre encore, pour lesquelles le pouvoir est, lui en premier, lui-même, hors-la-loi.

Il y a mille termes "ordonnateurs" dans la vie de nos institutions, que la conscience populaire et celle de nous tous peuvent exiger et doivent exiger, qui deviennent péremptoires. Il y aura, camarades qui êtes tentés par l'assassinat, ou qui l'avez déjà pratiqué ou choisi, l'amnistie et les libérations, uniquement lorsque la conscience des gens, la conscience populaire aura été sollicitée, secondée pour en comprendre l'utilité, la nécessité: en relation avec le principe souverain de civilité et de civilisation judiciaire, de la peine comme tutèle de la communauté et de chacun, de la persistance du danger spécifique de l'un de ses membres, avec le principe de la peine, non pas en tant que punition, ou instrument autocratique de réintégration sociale.

Je souhaite qu'il y ait, au Parlement italien, des personnes qui pensent, maintenant, outre les radicaux, à proposer une motion, un instrument de débat pour une forme nouvelle et féconde de réponse politique au danger dans lequel vous gardez D'Urso. Ce n'est pas "vous" qu'il s'agit de battre, comme ces imbéciles lugubres et violents croient, mais ce qui en vous peut faire croître et déterminer le pire, un ennième cri de "viva la muerte", désespéré et suicidaire, s'il vient de celui qui pense être ou est un "camarade".

Il s'agit de s'interroger publiquement, avec la télévision et les journaux qui, pour une fois, ne censurent pas totalement ou presque, les débats parlementaires, si bien que la réponse quotidienne que l'on donnera soit donnée selon la Constitution et par ceux-là-mêmes que la Constitution exige.

Permettez-moi de vous dire qu'aujourd'hui la fermeture de l'Asinara, sinon plus lointaine, est du moins plus difficile de ce qu'elle était avant le rapt de Giovanni D'Urso. Dans l'Etat dominent en effet, assez souvent, des instincts et des réflexes qui sont assez semblables aux vôtres, que vous avez peut-être hérité et que vous partagez avec une bonne partie du régime.

Et ce n'est pas cela que vous voulez, j'en suis sûr. Ce n'est pas cela, ce n'est pas sur la vie de centaines de vos camarades détenus pour terrorisme que vous voudrez édifier on ne sait quelle "victoire tactique", ou quelle "exécution de justiciers".

Il faut que l'etat, les partis, les forces politiques, les gens, nous-mêmes, fassent de tout pour gagner des occasions de dialogue urgent avec vous, quelles qu'elles soient. Il faut, je pense, que vous en fassiez autant. Je ne sais pas comment: vous le savez, si vous le voulez.

Considérez-moi à votre disposition. Entendez-moi: non pas pour collaborer à une forme quelconque de violence ou d'ordre injuste, mais pour dialoguer, loyalement, sans donner en aucun cas, même pas par omission, de complicité ou de connivence. Ni de nous à vous, ni de vous à nous.

Mais êtes-vous bien sûrs, camarades, qu'il ne vous convienne pas de libérer, dès maintenant, Giovanni D'Urso? En réalité "ils" ne le souhaitent pas, ils ne s'y attendent pas. Ils n'en seraient pas heureux. Par contre, vous le savez bien, "les gens" s'y attendent, les gens en seraient heureux, les gens, nous, vous-mêmes...

Vous libérez D'Urso, Camarades?

 
Argomenti correlati:
stampa questo documento invia questa pagina per mail