SOMMAIRE: La Politique Agricole Commune na pas seulement des effets pervers du point de vue économique, menaçant la compétitivité du secteur agricole européen et de ses produits sur le marché interne et international, mais également sur le plan social et culturel, en créant les préalables pour la décadence socio-économique des travailleurs agricoles et pour des tensions entre les secteurs agricoles nationaux et entre ceux-ci et la CEE (17-09-81).
M. Pannella. - Madame le Président, je voudrais me féliciter avec les groupes qui ont présenté tant de résolutions sur ce point si important et qui ont dit tellement de choses importantes et sages...
Permettez-moi de me féliciter avec mon ami Galland qui démontre une fois de plus qu'il y a certains libéraux qui sont adorables dans l'opposition autant que détestables au gouvernement... (Sourires)
Je souhaite que l'on vous assure pendant très longtemps, en France et ailleurs, ce traitement d'opposition et c'est parce que nous sommes vos amis que nous vous le souhaitons...
Madame le Président, je tiens à adresser toutes mes félicitations à tous les groupes. Que sommes-nous en train de célébrer ce soir, sinon une querelle ou un marché de dupes? De quoi parle-t-on, sinon de cette agriculture à laquelle nous avons donné tout notre argent, et qui, aujourd'hui, se venge comme une sorte de Nemesis? C'est que nous avons, en fait, affaire à une agriculture qui produit la défaite des agriculteurs et du travail agricole, qui réduit non seulement aux jacqueries les travailleurs, mais qui oblige en quelque sorte les groupes politiques à défendre ces jacqueries avec une démagogie autant nationaliste que corporative qui fait honte à ceux qui croient quand même qu'il n'est pas nécessaire d'être marxologue ou marxiste pour savoir que le Tiers Etat est une chose sérieuse qui perdure à travers l'histoire de chaque pays.
Mais, Madame le Président, comment choisir parmi ces résolutions? C'est difficile.
Je suis consommateur de pinard. Excusez-moi, mais tout compte fait, le vin, c'est du pinard. Je suis consommateur et j'ai peur que, encore une fois, on ne célèbre ici une liturgie contre les consommateurs. Je voudrais, après tant de choses importantes qui ont été dites, demander des choses vraiment minimes. Je ne dis pas que cette histoire est louche. Je dis qu'elle n'est pas claire, comme parfois le mauvais vin n'est pas clair.
Pourquoi, Madame le Président, la douane française ou lesautorités françaises n'ont-elles pas rendues publiques les analyses qu'elles ont faites sur nos vins? Est-ce qu'ils étaient tous bons, ces vins? Est-ce qu'ils étaient bons nos vins? Ensuite, une autre question: d'où vient-il que notre gouvernement n'envoie pas ce que l'on appelle les documents d'accompagnement? Il continue à ne pas les envoyer. Pourquoi? Aurait-on peur qu'aux analyses du vin italien succèdent, en Italie, des analyses de certains produits français? Est-ce par hasard que, là-dessus, l'on se précipite, l'on fait mine de s'affronter, par pure démagogie, tant de la part du gouvernement que de l'opposition, pour obtenir encore un peu plus d'argent de la Communauté, ou de je ne sais qui, et continuer à inonder les marchés de produits dont il est préférable que les consommateurs ignorent le contenu?
Je souhaite donc avoir bientôt des nouvelles de l'analyse de nos vins. Oh, vous savez, je sais bien, je ne suis pas un "bon mec" du Midi. Mais je suis du Midi, et tout compte fait, je préfère, dans cette histoire, ne pas prendre parti, car l'histoire est autre: c'est cette agriculture dont nous mourrons politiquement. Jamais, à aucun moment, elle ne s'est aussi dégradée.
Voilà dix résolutions, qui s'affrontent sur ce sujet alors que, sur la Turquie, vous vous taisez. Vous vous taisez lorsqu'il s'agit des problèmes portant sur les libertés et le droit à la vie, des problèmes fondamentaux, tandis qu'ici, chacun espère rentrer avec sa petite paperasse européenne chez ses électeurs. On pense ainsi défendre quoi? Le libéralisme, le socialisme, la chrétienté? Je crois que l'on défend seulement la continuation d'un processus de désagrégation de notre Europe traversée par une lutte de classes très importante.
Donc, je m'abstiendrai, Madame le Président. Amusez-vous bien, mes chers collègues vous n'avez que l'embarras du choix. Quand vous serez prêts à discuter sérieusement de cette agriculture organisée contre les agriculteurs, nous en serons vraiment arrivés à un moment important de la vie de notre Parlement et de notre Communauté.