SOMMAIRE. Il votera pour les trois résolutions présentées, tout en n'en partageant pas tous les jugements. On meurt chaque jour, au Moyen-Orient, davantage de la main des syriens que d'Israël. A propos aussi du Chouf, on manoeuvre entre "des petites choses exactes", et d'autres qui sont inexactes. La gauche est déraisonnable si elle laisse à d'autres le monopole de certaines valeurs. Il faut dire "non" à une politique de Ponce Pilate.

(DISCUSSIONS DU PARLEMENT EUROPEEN, 10 octobre 1985)

Pannella (NI) Monsieur le Président, je crois que la gauche raisonnable, à laquelle je souhaiterais pouvoir chaque jour apporter mon soutien, n'est pas raisonnable dès lors qu'elle laisse à d'autres secteurs politiques le monopole et l'obligation d'assumer ses responsabilités, alors que se trouvent mis en cause des principes, des réalités qu'elle, cette gauche raisonnable de la tolérance et de l'intransigeance, devrait être la première à defendre.

Je voterai pour ces trois résolutions, et ce non seulement par provocation. En effet, le devoir d'intervention est exprimé par ces résolutions et non par d'autres. Je ne partage pas tous les points de vue qui y sont exprimés. Et je crois qu'il importe de souligner je le dis à mon ami et camarade Baget Bozzo que s'il est un préjuge avec lequel il faut en finir, c'est celui qui consiste à croire qu'au Liban, mourir de main israélienne ou prétendument israélienne, sans que la preuve en soit rapportée, c'est mourir assassiné. Si l'on meurt chaque jour sous le joug des Assad dans tout le Moyen-Orient, pas seulement au Liban qui tuent plus de Syriens en une année que les Israeliens n'en tuent en vingt ans, si les pertes se multiplient dans les populations mêmes, non seulement parmi les Kurdes mais aussi parmi les populations druzes et autres, combien sont-ils, ceux qu'ont tués leurs chefs. Combien sont-ils?

Je n'accepte pas ce jeu casuistique sur le Chouf, où l'on jongle avec de petites choses exactes, et d'autres ausses. Certaines exactitudes desservent la vérité car on nie le contexte en ne lisant qu'une partie du texte. Je dis donc, Monsieur le Président, qu'au nom des droits des Libanais, des Arabes, de ceux que les autres veulent defendre, paraît-il, qui ont les mêmes droits que les chrétiens, qui eux aussi ont maille à partir avec leurs dirigeants, je vote en faveur de tout interventionnisme de l'Europe et de notre Communauté. Je veux que nous y soyons présents. Nous y serons peut-être avec des erreurs au début, mais nous pourrons les corriger à ce moment-là. Je dis non à la politique de Ponce Pilate quand elle n'est pas pire à ce niveau préconisée par les secteurs progressistes de notre Assemblée.

(Applaudissements au centre et à droite)

Pannella (NI). Monsieur le Président, la Commission fait ce qu'elle peut et ce qu'elle doit faire dans le cadre de la politique communautaire telle qu'elle est définie par les autres institutions aussi. Dont acte.

Quant à moi, je voterai ici contre l'aveuglement politique et l'absence de politique, tant du Parlement européen que du gouvernement d'Israèl, en ce qui concerne les problémes historiques qui se posent. Je voterai contre l'illusion qu'un Kosovo qui serait democratique, qu'un pays basque qui serait democratique, qu'une Irlande du Nord qui serait democratique, puissent résoudre leurs problèms historiques tout seuls contre une Grande-Brettagne qui serait totalitaire, contre une Espagne qui serait totalitaire, contre une Yougoslavie qui serait totalitaire, contre une Europe qui serait autoritaire.

Il y a de l'aveuglement! Je voterai non, au nom de ce 99,99% d'hommes et de femmes du Moyen-Orient, tous victimes de régimes più ou moins infâmes, ces gens qui n'ont pas la possibilité de se révolter, qui sont tués jusque dans leurs pensées mêmes. Ils n'ont même pas le droit de mourir en faisant connaître aux autres leurs propres idéaux. Je voterai contre ce leurre. Les Arabes n'ont le droit d'exister que quand ils s'opposent à Israèl.

C'est infâme!

Je dis non à ce chantage.