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Teodori Massimo - 1 dicembre 1985
P2: L'histoire secrète (14) L'AMBROSIANO: LE GUICHET DE LA P2
POUR LES PARTIS.

Faits et méfaits - hommes, banques et journaux, généraux et terroristes, vols et assassinats, chantages et pouvoir - selon les documents de l'enquête parlementaire sur la loge de Gelli.

par Massimo Teodori.

SOMMAIRE: »On a beaucoup écrit sur la P2 et sur Gelli, mais la vérité sur la loge et sa prise de pouvoir dans l'Italie d'aujourd'hui a été gardée secrète. Contrairement à ce qu'affirme la relation Anselmi votée à la majorité en conclusion de l'activité de la Commission d'enquête parlementaire sur la P2, la loge n'a pas été une organisation de malfaiteurs externe aux partis, mais interne à la classe dirigeante. L'enjeu pour la P2 a été le pouvoir et son exercice illégitime et occulte avec utilisation de chantages, de vols à grande échelle, d'activités subversives et de gigantesques imbroglio financiers, et même avec le recours à l'élimination physique de personnes "gênantes".

L'"histoire secrète" de Teodori est une reconstitution de faits et de responsabilités sur la base de milliers de documents; c'est la réélaboration et la réécriture de la relation de minorité présentée par l'auteur au Parlement au terme des travaux de la Commission d'enquête parlementaire. Elle illustre les milieux-ambiants de l'association de malfaiteurs Gelli-P2; elle fournit l'interprétation des activités subversives des services secrets et celles des Cefis, des Sindona et des Calvi: elle élucide le rôle de la P2 dans l'"affaire Moro" et dans l'"affaire d'Urso", dans la Rizzoli et dans l'ENI, dans les Forces Armées et dans l'Administration publique. Elle révèle les intrigues avec le Vatican, les méfaits des Pazienza, des Carboni et la trouble "affaire Cirillo".

(Editions SUGARCO - Décembre 1985)

CHAPITRE XIV - L'AMBROSIANO: LE GUICHET DE LA P2 POUR LES PARTIS.

La P2 a élargi son pouvoir et celui de toute la coterie grâce à une série d'opérations illicites qui ont trouvé un terrain favorable dans la dégénérescence de la vie publique italienne. Les grands chapitres de l'activité piduiste concernent l'entremise dans les affaires illégitimes, l'occupation de positions de contrôle de la vie publique, et le marché des informations sur les secrets économiques, financiers, militaires et politiques du pays comme arme de chantage. Ce sont ces armes et ces modalités d'action qui ont permis à la P2 de tisser cette singulière toile de pouvoir fondée non pas sur ses propres ressources politiques, économiques ou financières mais sur l'exploitation des ressources d'autrui. Plus particulièrement, les deux chefs piduistes, Gelli et Ortolani, se sont constamment servi, pour étendre leurs contacts, des techniques de la corruption, naturelle conséquence de l'implication des puissants dans des affaires sales. Tout cela est arrivé de plusieurs manières et même à travers la corrupti

on directe par la distribution de financements, de crédits et de contributions avec lesquels la P2 s'est étendue. Ce qui avait été jusqu'en 1974 l'arme sindonienne par excellence, la corruption financière, n'est arrivé à la portée de Gelli et d'Ortolani qu'après la prise de possession du groupe Rizzoli à travers lequel sont passées de nombreuses opérations de corruption, grandes ou petites, à l'égard des représentants politiques, de partis entiers, de conseillers, de journalistes et autres. Cependant, le chapitre central de l'utilisation du financement comme corruption de la part du système piduiste se réalise à plein rythme avec l'acquisition de Roberto Calvi au sommet de la P2, c-à-d., vers la moitié des années Soixante-dix. C'est alors que s'ouvre à l'état-major de la coterie piduiste une nouvelle possibilité inédite de distribuer directement des crédits et des financements à travers l'utilisation aveugle des disponibilités du banquier et de son système financier international.

C'est dans ce cadre que se situent les très généreux financements que le Banco Ambrosiano, institut bancaire de ladite aire financière »catholique - la banque des curés -, a distribué aux partis laïques et de gauche, le Pci, le Psi et le Psdi, comme à la Démocratie Chrétienne et aux journaux rattachés à celle-ci. Etant donné le lien étroit de protection, soutien et conseil qui, à partir de 1976-77, existait entre Calvi et Gelli et Ortolani, il ne fait aucun doute que les ouvertures de crédit aux partis à un niveau qu'aucune autre banque italienne n'a jamais accordé à des organismes politiques, n'ont pas été des opérations bancaires normales, mais au contraire, un acte délibéré de la politique d'implication générale mis en acte par l'état-major de la P2. Ce qui suit est un examen basé sur la documentation transmise à la Commission d'enquête par le Nuovo Banco Ambrosiano, par ailleurs déjà en partie publiée par l'hebdomadaire »Il Mondo Economico (1).

Les rapports PSI - Ambrosiano

Le Parti socialiste Italien a des rapports d'affaires avec le Banco Ambrosiano dès 1975. Le 11 février de cette année-là, il obtient un découvert de compte-courant pendant un an de 250 millions, comme pré-financement des contributions d'état prévues par la loi sur le financement public des partis de 1974. Le 6 octobre, le crédit est rehaussé à un milliard, à cause du retard dans la distribution des contributions de l'Etat. Le 30 juin 1976, il obtient un découvert supplémentaire de compte-courant de un milliard et 250 millions à valoir sur la distribution de fonds de l'Etat. Le 27 septembre 1976 est une date importante: les crédits sont englobés en un unique découvert de compte-courant porté à 3 milliards. L'échéance du remboursement est pour février 1977, mais le Psi demande une prorogation jusqu'en mars 1978. Mais ce n'est pas tout. Le 6 mai 1977 le Psi réussit à obtenir du Banco Ambrosiano encore 2 milliards, s'engageant à restituer la totalité des 5 milliards avant mars 1978. Le 27 décembre, le Psi r

éussit à obtenir encore 2 milliards de découvert supplémentaires de compte-courant »pour nécessités financières du parti , s'engageant à les restituer en mars 1978.

Le 12 juin 1978, le sénateur Rino Formica, secrétaire administratif du Psi, entre en scène et demande verbalement aux fonctionnaires du siège romain de l'Ambrosiano de proroger jusqu'en septembre l'échéance des crédits. L'Ambrosiano accueille la requête, mais la soumet à de plus grandes assurances sur la couverture des crédits et à la vérification des termes réels d'encaissement des contributions prévues par la loi. On passe à 1979. Le siège romain de l'Ambrosiano sollicite à maintes reprises le Psi afin que ce dernier réduise sa dette. Les dirigeants socialistes donnent de plus amples assurances, mais en attendant ils demandent la prorogation de l'échéance et la concession d'un autre crédit de 2 milliards: ce dernier est accordé le 29 novembre 1979 avec échéance en mars 1980. La dette du Psi s'élève ainsi à 9 milliards. Mais la demande d'argent du Psi ne s'arrête pas là. Le siège romain de l'Ambrosiano essaie de prendre contact avec les dirigeants du parti pour les inviter à réduire la dette. Mais inu

tilement, puisqu'il n'arrive pas à parler avec les dirigeants administratifs du parti. Le siège de Rome de l'Ambrosiano envoie alors le 2 février 1980, une lettre recommandée au secrétaire politique du parti, Bettino Craxi, demandant le remboursement échelonné de la dette qui est devenue de 9.098.726.493 lires. Silence du côté du Psi. L'Ambrosiano de Rome sollicite à maintes reprises une réponse. Silence pendant deux ans. Finalement, le 15 janvier 1982, Giorgio Gangi, secrétaire administratif du Psi, envoie une lettre dans laquelle il annonce des versements à partir de la semaine d'après, pour réduire le solde débiteur.

En effet, le 29 janvier, le Psi verse le premier milliard au siège romain de l'Ambrosiano. Mais ce sera, momentanément, le dernier, malgré de nombreuses sollicitations. A la fin de Février 1982, en effet, sur un crédit de découvert de compte-courant de 9 milliards, avec échéance en mars 1980 (3 milliards de découvert ordinaire et 6 milliards de découvert supplémentaire), le Psi a utilisé 13.930.425.306 lires. Compte tenu des conditions de prêt (taux d'intérêt de 25,50%, plus 1/8), au 30 juin 1982 la dette du Psi envers le Banco Ambrosiano est d'environ 15 milliards.

Le rapport du Psi avec l'Ambrosiano se développe donc entre 1975 et 1979 et les intérêts plus le capital à restituer, au moment de la constitution du Nuovo Banco Ambrosiano (8 Août 1982), s'élèvent à environ 13 milliards 730 millions. Au cours des années de l'ouverture du crédit, Calvi se sert du conseil de Gelli et Ortolani pour les opérations à aspect politique; et le rapport avec le Psi ne peut avoir été pris qu'avec l'explicite connaissance et le consentement de la direction de la P2 qui a tenté, à maintes reprises, de faire valoir le chantage de l'endettement. Du reste c'est l'époque où le conflit avec Sindona est en acte. La Banca d'Italia agit et le banquier »catholique veut acquérir des titres de mérite de la part du Psi, le parti avec lequel les rapports sont établis par le truchement de la Rizzoli, en particulier pour la mise en place du quotidien »Il Lavoro de gênes.

Interrogé à ce propos, le secrétaire du Psi, Craxi, a déclaré: »Je me souviens que lorsque j'ai été nommé secrétaire du Psi en 1976, le banquier Calvi était déjà créditeur. Le parti, m'expliquait l'administration, s'endetta uniquement avec le Banco Ambrosiano, étant donné que ce dernier, banque privée, était le seul à avoir donné une certaine disponibilité à concéder des prêts; les autres banques publiques considéraient qu'une concession de prêts pouvait être une violation de la loi sur les financements aux partis... Ce fut à cause de ce rapport préexistant que le parti avait avec le Banco Ambrosiano que je connus Calvi et je le fis volontiers, parce que le Banco Ambrosiano était une banque illustre de la ville de Milan... (2).

L'hypothèse est donc crédible, selon laquelle la raison de certaines affaires financières qui ont vu par la suite le Psi engagé dans la recherche continue d'argent, aggravée par la nécessité de faire face à la dette contractée avec Calvi avant 1979 et à l'aggravation continue de la dette. Lorsque Calvi se trouve dans une position difficile et qu'il est incarcéré, sa femme Clara s'adresse à ceux qui, à son avis, pouvaient et devaient prendre les défenses du banquier, à savoir, Piccoli, Andreotti et Craxi, trois hommes politiques qui, d'une manière ou d'une autre devaient manifester leur reconnaissance pour les faveurs obtenues. En effet, Piccoli et Craxi, avec Longo, se lèvent à la chambre des députés, à l'occasion du débat de confiance au gouvernement Spadolini, et engagent leur prestige de leader pour défendre le banquier arrêté en attaquant la magistrature et l'usage de l'intimidation avec laquelle, à leur avis, celle-ci exerçait son autorité. Plus particulièrement, l'attaque de Craxi concerna le réc

it que Calvi avait fait, suite à des pressions présumées subies durant la détention, à propos d'une histoire concernant 21 millions de dollars fournis au Banco Financeiro de Montevideo d'Ortolani et destinés - selon ce qu'avait soutenu Ortolani et que Calvi avait déclaré aux juges - au Parti socialiste pour l'aider à diminuer la dette envers l'Ambrosiano. De toute cette histoire, soutenue par Ortolani, avouée dans un premier temps par Calvi, puis rétractée, et dont on n'a jamais pu venir à bout de la vérité, il est possible de tirer certaines conclusions importantes. Premièrement, que le Psi, en raison de l'endettement envers Calvi contracté jusqu'en 1979, a pu se trouver à la merci de personnages tels que Ortolani, et deuxièmement, que l'ouverture de ce crédit aussi important avait été effectuée par Calvi, d'accord avec la direction de la P2, justement pour créer une situation d'inter-échange P2-partis.

11 milliards au Pci entre 1980 et 1982 et 23 milliards à »Paese Sera jusqu'en 1979.

Les rapports financiers du Parti communiste italien avec l'Ambrosiano également ont été intenses, même si le Pci s'est montré plus prompt que le Psi dans la restitution des prêts. Le 31 juillet 1980, le Pci a obtenu de la filiale de Rome du Banco Ambrosiano, un découvert de compte-courant de 4 milliards de lires, avec échéance en février 1981, à utiliser pour les besoins financiers du parti: les remboursements devraient être effectués avec les ressources provenant de la campagne de presse et de la campagne d'inscription. Le 27 janvier 1981 l'échéance du prêt est prorogée à avril 1981. Le premier avril de cette même année, le Pci obtient un découvert supplémentaire de 1 milliard: les deux crédits ont leur échéance au mois de mai: les dirigeants du Pci garantissent que le remboursement est possible grâce à l'encaissement imminent des contributions de l'Etat (augmentation du financement public et prêts à travers une nouvelle loi) qui devrait être de 11.377.592.854 lires. Et en effet, aux début de mai, le P

ci restitue intégralement sa dette: si bien que le 15 mai, l'Ambrosiano révoque le crédit suite à la couverture de la dette.

Le premier février 1982, le Pci obtient de la filiale de Rome de l'Ambrosiano, un nouveau découvert de compte-courant de 5 milliards de lires, avec échéance en juin de la même année, comme préfinancement des contributions prévues par la loi de 1974 et de 1981. Un autre découvert supplémentaire de 5 milliards est obtenu le 30 mars grâce à une fidéjussion de l'Unione Immobiliare Centrale, une société immobilière du Pci propriétaire d'immeubles (dont les édifices des Botteghe Oscure) évalués à plus de 40 milliards de lires. L'échéance du crédit est en octobre 1982. Le 15 juin 1982 le Pci demande la prorogation de l'échéance du premier crédit de 5 milliards jusqu'au mois de décembre. En conclusion, en février 1982, sur une ligne de crédit de découvert de 10 milliards de lires, le Pci a utilisé 10.530.577.148 lires, donnant en garantie une fidéjussion de l'Unione Immobiliare Générale. Compte tenu des conditions du prêt (taux de 25,50% et de 27,50% sur l'excédent) au 30 juin 1982, la dette du Pci envers l'Amb

rosiano tournait autour de 11 milliards.

Il faut ajouter à ce rapport direct du Pci avec l'Ambrosiano, le rapport avec la Société d'édition »Il Rinnovamento , propriétaire du quotidien »Paese Sera . Le premier contact remonte à novembre 1978 lorsque la société d'édition demande un découvert de compte-courant de 1 milliard. La filiale de Rome de l'Ambrosiano accorde le 13 décembre suivant, 350 millions et le 18 décembre encore 500 millions avec échéance en juin 1979. Le 27 novembre 1979 l'Ambrosiano accorde encore deux découverts de compte-courant, respectivement de 1,5 milliards et de 2 milliards, à titre de pré-financement des contributions de l'Etat sur la presse: le financement devrait être finalisé pour la réalisation d'un programme de restructuration et d'investissements. Le 29 mai 1980, sur demande de la société d'édition, l'Ambrosiano accorde un découvert de compte-courant de 6 milliards avec échéance en juin de la même année, en se faisant donner un mandat irréversible pour encaisser les fonds prévus par la loi sur l'édition. Le 3 juil

let 1980 »Paese Sera obtient un dernier découvert de compte-courant de 2,1 milliards pour nécessités financières impérieuses, avec échéance en septembre 1980, en attente d'une augmentation du capital social. Le 6 octobre un autre découvert est autorisé, de 1,9 milliards, avec échéance en décembre de la même année. Le 25 février 1981, à cause d'un ultérieur ajournement de l'encaissement des contributions de l'Etat et de l'augmentation de 4 milliards du capital de la société, l'Ambrosiano autorise un nouveau découvert de 3,5 milliards avec échéance en mars, et proroge à cette même date l'échéance de tous les autres crédits. Le 17 septembre 1981, la société d'édition de »Paese Sera obtient un découvert supplémentaire de compte-courant de 5,5 milliards, en donnant à l'Ambrosiano un mandat irréversible à l'encaissement des entrées en faveur de l'édition (loi 416 de 1981), avec échéance au 31 décembre, et réussit à faire reporter à cette date l'échéance de tous les autres crédits. Le 25 janvier 1982, grâce à l'e

ncaissement des contributions d'Etat pour la période 1er juillet 1979 - 31 décembre 1980, équivalent à 2.224.000.000 lires, la société d'édition réussit à réduire le découvert initial de 6 milliards à 3.776.000.000. Mais la dette totale de »Paese Sera envers l'Ambrosiano demeure encore élevée. Au 30 juin 1983, il résultait une dette d'environ 22.281.000.000 lires; en plus des intérêts, commissions et frais qui s'élevaient, au 8 septembre 1983 à 25.409.000.000 comme le notifiait la maison d'édition »Il Rinnovamento en liquidation.

En ce qui concerne la situation créditrice de »Paese Sera , une série de conflits (3) pendent devant les tribunaux de Rome entre les différentes sociétés qui se sont succédées à la propriété du journal romain, en particulier entre la Impredit et la Rinnovamento, conflits qui ne modifient en rien le fond de la question: à savoir, que les financements de l'Ambrosiano d'abord à la Rinnovamento, puis à la Imprendit à travers la société Tritone, ont été accordés puisqu'ils ont été négociés et garantis par le Pci et en particulier par le responsable de la presse et de la propagande de la direction du parti, Adalberto Minucci. Tout comme l'hypothèse plus que probable selon laquelle une partie de la propriété de »Paese Sera , à travers la Tritone, aurait été transférée à la société luxembourgeoise Logos International appartenant à une autre société financière de l'empire de Calvi, la Finimtrust (4) n'ajoute rien à la question du rapport très particulier Calvi-Pci à propos de Paese Sera. La dette de »Paese Sera

aurait été convertie en un engagement d'actions si bien qu'il se serait créé une co-propriété entre, d'une part, l'Ambrosiano Holding de Luxembourg et, de l'autre, le Pci à travers des hommes et des sociétés de confiance.

Dans une interview au journal Tv de la 2ème chaîne italienne du 16 mai 1985 depuis la prison de New York, Francesco Pazienza a affirmé que la vieille dette de Paese Sera envers l'Ambrosiano serait arrivée à 36,2 milliards de lires, en calculant les intérêts à partir du 8 septembre 1983 (alors que la dette était de 25,5 milliards) au 1er Mai 1985. Au cours de cette même interview, l'avocat Ignazio Fiore de la société d'édition Tritone a déclaré qu'»à la date actuelle la société Rinnovamento n'est plus débitrice du Nuovo Banco Ambrosiano et que la »Rinnovamento a payé ses dettes à travers une autre société... et qu'»elle a stipulé un accord avec le Nuovo Banco Ambrosiano... conclu en 1984 . Trois ans après la mise en liquidation de la Banque de Calvi, son rapport avec »Paese Sera et avec le Pci demeure mystérieux. En effet, ou bien le Nuovo Banco Ambrosiano a vraiment stipulé un accord pour la réduction de la dette des différentes sociétés à travers le journal communiste offrant ainsi un certain nombr

e de milliards à un journal et à un parti, ou bien, si les sociétés de »Paese Sera n'ont pas payé, elles auraient dû répondre de la faillite de l'Ambrosiano comme ce fut le cas pour d'autres débiteurs. La question qui se pose donc - devant le financement de 35 milliards environ qui a été distribué au Pci par Calvi entre 1979 et 1982 - est de savoir s'il s'est bien agi simplement d'un »normal rapport bancaire comme l'a soutenu le secrétaire du Pci. »Je ne sais pas exactement quels ont pu être les rapports de »Paese Sera avec le Banco Ambrosiano a affirmé Berlinguer le 24 janvier 1984. »Je peux exclure qu'il y ait eu des garanties du Pci pour ce qui concerne ces rapports... ; et, en ce qui concerne le parti, »les prêts ont été demandés tout-à-fait normalement, à des taux normaux, et même supérieurs aux taux usuels, et le remboursement des dettes et des intérêts a été régulier. Il y a eu par conséquent, un rapport normal, comme avec n'importe quel organisme de crédit... Des rapports commençés je crois, avan

t que l'on ne soit au courant de l'organisation P2, des rapports avec le Banco Ambrosiano en tant que tel; il y a eu de nombreuses autres banques italiennes dont les représentants ont été impliqués dans des scandales, toutefois nous les considérons comme des organismes de crédit avec lesquels on fait de normales opérations comme font tous les autres partis. Il me semble avoir lu que tous ou presque tous les autres partis politiques avaient des dettes avec le Banco Ambrosiano (5).

Dans sa déposition, le secrétaire du Pci n'a pas dit exactement la vérité, ou bien il n'était pas au courant des circonstances exactes du financement. En effet, les financements, et ceux du Pci et de »Paese Sera en particulier se développent surtout après et non avant l'explosion du scandale P2 en mars 1981, et il ne s'agit pas du tout de normales opérations comme avec les autres banques puisque il ne résulte point que, dans cette mesure et avec cette continuité, il y ait eu des ouvertures de crédit en faveur du Pci de la part d'autres organismes de crédit. Mais ce n'est pas tout: les rapports avec les partis, et par conséquent les rapports pour les crédits supplémentaires au Pci, sont passés exclusivement à travers Calvi sans passer par la filière bancaire ordinaire, si bien que lorsque le vice-président de l'Ambrosiano, Roberto Rosone, demanda la fidéjussion de la société propriétaire des immeubles du Pci, le président de l'Ambrosiano entra dans toutes ses fureurs en revendiquant le caractère »spécia

l du rapport avec les partis.

L'analyse du tempo des opérations conduites par les dirigeants communistes porte à d'autres considérations encore plus graves. Le premier financement au Pci de juillet 1980 est effectué en plein régime de contrôle piduiste de l'Ambrosiano; et le renouvellement de crédit est négocié justement durant la détention de Calvi. Le Pci couvre sa position débitrice le 5 mai 1981 et la rouvre pour 5 milliards le 22 mai, devenant au cours des mois qui suivent, 7 milliards, puis 10 milliards. Calvi est arrêté le 20 mai et fait une tentative de suicide le 8 juillet.

Comment ne pas mettre en relation ce qui était une matière de compétence exclusive du président de la Banque avec son état de précarité et de chantage? Calvi, dans de telles circonstances, était prêt à n'importe quoi pour son salut et les financements au Pci se rouvrent et s'amplifient en coïcidence avec la période la plus critique. L'ouverture de crédit se fait sous le signe de la protection de Gelli et Ortolani, elle se renouvelle lorsque Calvi passe sous le parrainage de Pazienza et s'amplifie entre février et mars 1982, avec l'assistance et le conseil de Flavio Carbone tandis qu'est tentée une grande opération de corruption sur les politiques, la magistrature et autres organes de l'Etat. Le Pci, durant la période la plus critique de Calvi (1981-1982), profite de la situation pour satisfaire ses exigences financières.

Financements au PRI et au PSDI. Financement public aux partis et loi sur l'édition comme gage à Calvi.

Les rapports financiers entre le Parti socialiste démocratique italien et l'Ambrosiano sont de vieille date, même si c'est pour des sommes moins importantes par rapport au Pci et Psi. Le 29 décembre 1977, le Psdi obtient une première autorisation de découvert de compte-courant de 200 millions, avec échéance en mars 1978, sur les contributions de l'Etat prévues par la loi. Même si avec quelques semaines de retard, le prêt est remboursé et la filiale de Rome de l'Ambrosiano révoque le crédit. Le 24 octobre 1978 le Psdi obtient un nouveau découvert de compte courant de 200 millions, avec échéance en mars 1979, sur les contributions de l'Etat prévues par la loi. Cette fois-ci, cependant, le Psdi tergiverse et ne restitue pas le prêt à l'échéance concordée. Si bien que la filiale romaine de l'Ambrosiano écrit une lettre au secrétaire du Psdi Pietro Longo, en date du 29 mai 1980, pour demander la couverture de la dette. L'habilité de Longo est telle que non seulement le Psdi ne restitue pas le financement, m

ais, le 21 octobre 1981, il réussit à obtenir un découvert supplémentaire de 200 millions remboursables au moment de l'encaissement des contributions de l'Etat ou avec les entrées de la campagne associative: les deux crédits, grâce à une prorogation, viennent à échéance en Avril 1982. En conclusion, au février 1982, sur un crédit de 400 millions, le Psdi a utilisé 440.1452.454 lires. Au 30 juin 1982, compte-tenu des conditions du prêt (taux de 25,50% plus 1/8 et de 27,50% plus 1/8 sur les dépassements), la dette du Psdi envers l'Ambrosiano tourne aux alentours du demi-milliard.

A son tour, le Parti républicain italien a obtenu le 4 avril 1979 de la filiale de Rome de l'Ambrosiano un découvert de compte-courant de 600 millions, avec échéance en mai de la même année, sur les contributions de l'Etat. Le prêt est remboursé et le 22 Août de la même année l'Ambrosiano révoque le crédit puisque celui-ci n'est plus utilisé. Le 24 septembre 1979, le crédit de 600 millions est ouvert à nouveau, avec échéance en janvier 1980, toujours à titre de pré-financement sur les contributions de l'Etat. Le 20 octobre 1981, après le remboursement total de la part du Pri, le crédit est révoqué puisqu'il n'est plus utilisé. En conclusion, en 1982, le Pri n'a plus aucun crédit à l'Ambrosiano.

Parmi tous les financements aux partis, dans ce tableau on ne trouve pas directement la Démocratie Chrétienne en tant que telle. Mais cela ne peut guère nous tromper. En effet, la nature des rapports entre Calvi et la Dc s'est développée sur d'autres terrains avec des financements à des hommes et des journaux - aussi importants que ceux du Pci et du Psi. L'agence journalistique ASCA, ayant obtenu en 1976, une autorisation de crédit de 375 millions de lires, avait utilisé au 8 Août 1982, 514.885.647 lires. La société financières et d'édition San Marco (»Il Gazzettino ) sur un crédit de 4.500.000.000 lires en avait utilisé, à la même date, 3.662.824.908. Mais en ce qui concerne le journal vénitien, il faut rappeler qu'au total, le financement DC tournait autour de 40 milliards de lire de la part de la SPARFIN contrôlée par la Centrale et présidée par le piduiste Aladino Minciaroni, à ce qu'il paraît, contre l'engagement de faire obtenir à la Banca Cattolica del Veneto, l'autorisation pour ouvrir de nouvea

ux guichets.

En ce qui concerne les temps et les modalités de réalisation, il ne peut y avoir aucun doute sur le fait que tous les financements récapitulés ici font partie de la politique de la P2 pour engager et soutenir les plus grands partis. Pci, Psi, Dc et Psdi engagèrent dans leurs opérations les contributions qu'ils devaient obtenir à travers les dispositions de loi sur le financement public aux partis et sur l'édition. Aussi bien les longs affrontements pour le doublement et l'indexation du financement public, que l'affrontement sur la loi pour l'édition et les aides à la Rizzoli, trouvèrent d'accord Dc, Pci et Psi sur le front de ceux qui voulaient obtenir des contributions plus importantes de la part de l'Etat, surtout parce que ces partis avaient pris des engagements avec les hommes et les structures de la P2. Et de cette manière, le pouvoir de la P2 pouvait croître et s'exercer avec des limites et des résistances toujours moindres.

NOTES

1. Toutes les données concernant les financements destinés aux partis sont basé sur la documentation transmise par le Nuovo Banco Ambrosiano à la Commission P2 en date du 23 décembre 1982. Toutes les données concernant les financements destinés aux journaux sont basées sur la documentation transmise par le Nuovo Banco Ambrosiano à la Commission P2 en date du 30 juin 1983. Le tout est publié dans All. (T.), vol. III, tome XIV, pp. 265-295. Une grande partie de ce matériel avait été publié de manière analytique dans »Il Mondo Economico du 20 septembre 1982.

2. Audition de Bettino Craxi à la Commission P2 du 8 février 1984.

3. Sont pendants au tribunal de Rome, une série de conflits entre les sociétés »Il Rinnovamento , »Imprédit , »Editoriale Tritone , »Grafica Editoriale Cartografica et le »Nuovo Banco Ambrosiano et le Pci. Une copie de ces procédures a été transmise à la Commission P2 le 18 juin 1984. Des extraits en sont publiés dans All. (T.), vol. III, tome XIV, pp. 297-425.

4. Cf. "E il paese finì in mano a Calvi", »L'Europeo , novembre 1983; "Touche Ross harcèle le Pci", »Il Mondo N·46, novembre 1983.

5. Audition d'Enrico Berlinguer à la Commission P2 du 24 janvier 1984.

 
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