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Niedzwiecka Anna - 25 giugno 1988
Partia Radykalna
Interview de Anna Niedwieska

SOMMAIRE: Les idéaux et les espoirs d'une jeune polonaise inscrite au Parti radical.

(Nouvelles Radicales N.3 - Juin 1988)

Nouvelles Radicales: Anna, tu as 20 ans, tu as décidé de rejoindre le Parti Radical. Comment as-tu connu le Parti Radical et pourquoi as-tu décidé de le rejoindre ?

Anna: La première fois que j'ai entendu quelque chose sur le Parti Radical c'était à l'occasion de l'élection de Cicciolina au Parlement italien. Puis j'ai rencontré Olivier et Lucio Berté qui sont venus à Varsovie pour rencontrer des gens qui voudraient participer au parti transnational. J'ai parlé avec eux pendant quelques jours et j'ai pensé que c'était la seule possibilité pour vivre ici. Parce qu'en Pologne, dans l'opposition il y a quelques mouvements, quelques organisations qui sont des organisations ouvrières comme Solidarité, des mouvements pour la paix et la liberté comme WiP (Wolnosc i Pokoj) qui vise seulement à obtenir un service alternatif. Et ce mouvement va se dissoudre parce que l'on obtiendra bientôt une législation sur le service civil. Il y a bien encore quelques organisations nationalistes mais elles ne sont pas importantes. En premier lieu j'ai pensé à des contacts avec des gens de l'Ouest qui se sont organisés pour se battre pour la paix. Je crois que c'est vraiment important d'être en

contact avec des gens de l'Ouest, des gens d'autres pays, pour se donner des informations, pour créer des amitiés aussi. Parce que les problèmes sont les mêmes: l'écologie par exemple. On ne peut pas parler d'écologie dans la seule Pologne. Que l'on soit en France, en Belgique, en Italie, on se trouve devant les mêmes problèmes écologiques. Il y a partout, là comme en Pologne, des usines nucléaires, des usines qui nuisent aux équilibres naturels. La deuxième raison c'est la paix. On ne peut pas parler de paix seulement si l'on habite en Pologne. La paix concerne tout le monde et tous les gens doivent savoir qu'ils ont besoin de paix. J'ai pensé surtout que le Parti transnational pouvait amener des gens à faire quelque chose pour la paix, pour l'écologie, pour les autres gens qui vivent dans des conditions si terribles que l'on ne peut même pas se les imaginer.

N.R. Que penses-tu de la bataille pour les Etats-Unis d'Europe ?

Anna: Je pense que c'est un peu fou. Mais je pense que toutes les batailles sont un peu folles si je peux m'exprimer ainsi. C'est une idée très, très, très belle. C'est l'idée de l'Europe sans frontières, de l'Europe des gens qui se mélangent. C'est bien. Beaucoup de gens ont pensé cela il y a déjà longtemps et beaucoup d'autres le pensent maintenant. C'est vraiment important, c'est ce dont nous avons besoin maintenant, je crois.

N.R. Et quand tu en parles avec tes amis de WiP, avec tes amis étudiants, avec ton entourage, qu'est-ce que les gens pensent en général de l'idée d'union européenne?

Anna: Ils disent toujours que c'est une folie. Ils disent que l'on ne peut pas réussir une telle chose. Mais il faut le tenter parce que c'est la possibilité pour nous.

N.R. Il y a une quarantaine d'autres inscrits au Parti Radical en Pologne. Qu'est-ce que vous pensez faire dans les prochaines semaines, dans les prochains mois ?

Anna: Premièrement nous devons nous occuper à terminer l'affaire du service civil en Pologne. C'est un problème urgent parce qu'une vingtaine de personnes sont encore en prison, parce que l'un d'entre nous, Slawomir Dutkiewicz fait un jeûne depuis 6 mois (il est soumis à une alimentation forcée par les autorités de la prison, ndlr). Il faut penser transnational, il faut faire des manifestations, il faut écrire des pétitions au Parlement polonais, il faut faire voir aux gens que nous avons besoin des Etats-Unis d'Europe. C'est un premier pas, je crois. Il faut rendre les gens plus libres de ce qu'ils sont actuellement en Pologne. Il faut faire en sortes qu'ils pensent plus librement qu'aujourd'hui.

N.R.: Comment penses-tu que le Parti radical puisse s'intégrer dans le panorama de l'opposition polonaise, ou plutôt à travers l'opposition polonaise puisque nous sommes un parti transparti, un parti qui traverse donc tous les autres partis ?

Anna: C'est difficile parce qu'en Pologne le seul mot de parti irrite les gens car ici quand on pense parti, on pense parti communiste. Mais il est vrai que "Parti Radical" passe déjà mieux en Pologne, peut-être parce qu'il n'y a jamais eu de Parti Radical en Pologne. En France par exemple au contraire on voit qu'il y a un Parti Radical, qui est un parti national, et qui porte le même nom que notre parti transnational. En Pologne jamais. Il y eu toujours des partis socialistes, des partis de gauche, de droite mais pas de Parti Radical. Mais ce qui est important c'est d'essayer de faire voir aux gens que "parti transnational", "Parti Radical", c'est seulement un nom, mais que contrairement à tous les autres partis ce n'est pas un parti vraiment institutionnalisé, qu'il veut faire des choses vraiment bonnes. Il faut le faire voir aux gens. Il faut dire aux gens que le Parti Radical n'est pas un parti tel que ceux qu'ils connaissent. C'est un autre organe, c'est autre chose. Il faut vraiment informer. C'est fon

damental.

N.R.: Le mouvement dont tu fais partie, WiP, est un mouvement qui a été fondé sur quelque chose de vraiment important pour nous radicaux, la non-violence. Comment crois-tu que l'expérience de la non-violence de WiP peut être transmise aux camarades radicaux de France, d'Italie, d'Espagne, de Belgique ou d'ailleurs. Qu'est-ce que tu crois que vous pouvez apporter aux autres radicaux ?

Anna: Nous pouvons apporter d'abord la patience. Nous avons beaucoup de patience. Nous pouvons par exemple faire un sit-in et voir la police arriver quelques minutes plus tard, nous embêter et puis nous emmener en prison. Nous, nous n'opposons aucune réaction. C'est la non-violence en Pologne. En Pologne la non-violence est toujours plus populaire. L'exemple de la grève à Gdansk. Les ouvriers qui ont fait la grève ont été eux aussi non-violents. Les ouvriers n'ont pas toujours été non-violents et jamais ils ne l'avaient été consciemment. Mais maintenant ils le sont. Ils n'ont pas voulu utiliser la violence contre la direction de cette usine. Ils n'ont rien fait. C'était la véritable découverte de la non-violence par les ouvriers polonais. Peut-être que cela peut faire comprendre à l'Ouest qu'il s'agit d'une tout autre situation que celle de 81.

N.R.: Tu crois que Solidarnosc a intégré, a repris des méthodes de lutte de Wolnosc i Pokoj ?

Anna: Peut-être un peu parce que quand Wolnosc i Pokoj était active, Solidarnosc ne faisait rien. Elle éditait seulement des livres. Elle a vu maintenant que Wolnosc i Pokoj a remporté certaines batailles, que la bataille pour le service alternatif est presque gagnée grâce à ses actions non-violentes. Peut-être qu'elle pourra maintenant utiliser la non-violence dans ses actions.

N.R.: La vie ici est une curiosité pour nous, peut-être parce que votre vie est marquée par la présence de la police, une présence qui est beaucoup plus forte que celle de la société dans laquelle nous vivons. Vous vivez dans une société où vous risquez tous les jours. Qu'est-ce que cela veut dire dans la vie quotidienne "avoir peur", même si le terme n'est sans doute pas le plus adéquat, qu'est-ce que cela signifie dans votre vie de tous les jours de devoir être attentifs, de devoir regarder ce qui se passe aux alentours, qu'est-ce que cela signifie du point de vue psychologique ?

Anna: Premièrement cela veut dire qu'il faut s'habituer. Et on peut s'habituer à cela. Par exemple quand on se réveille on pense: "est-ce que tous les choses, tous les journaux clandestins sont bien cachés, est-ce qu'ils ne sont pas en vue." Puis quand on sort il faut vérifier si personne ne nous suit. Puis si l'on veut rencontrer quelqu'un, il faut penser à ne pas dire trop de choses au téléphone, à ne pas parler trop fort s'il y a des gens autour. Mais on peut s'habituer, on peut vivre comme cela. Même si beaucoup de membre de l'opposition sont devenus trop nerveux, sont devenus malades. Ils ont des maladies d'estomac, ils sont malades des nerfs. Ils sont malades. Mais on peut s'habituer. Il faut toujours penser que c'est un jeu. C'est un risque mais c'est aussi un jeu. Je pense que nous sommes aussi un peu comme les scouts. Il faut toujours regarder. Il faut être malin. Mais on peut rire. Ainsi par exemple la milice est loin d'être parfaite. Ils se trompent toujours. On peut rire d'eux et ça nous fait du

bien.

N.R.: Oui, mais tes parents par exemple, comment jugent-ils ton activité, la connaissent-ils, ont-ils peur, que te disent-ils ?

Anna: Je suis étudiante. Mon père m'a dit: "Tu dois finir tes études. Et si tu continues à faire ce que tu fais, ils t'expulseront, tu ne pourras pas terminer tes études". Je lui ai répondu "s'ils veulent m'expulser, ils le feront. Ca ne fait rien, j'ai d'autres choses à faire, beaucoup plus graves, beaucoup plus importantes que mes études." Ils ont peur, je sais qu'ils ont peur, ils me le disent toujours. Mais je suis adulte. Je ne peux rester toujours l'enfant de mes parents. Je dois vivre comme tout autre personne, ma vie.

N.R. Tu parlais de paix tantôt. Qu'est-ce que la paix pour toi. Quand on parle de paix et de mouvement pacifiste en Occident on entend souvent des choses génériques. Autrement dit la paix sans contenu politique, sans espoir de démocratie. A l'Est par contre parler de paix c'est déjà quelque chose de révolutionnaire. Qu'est-ce que la paix, le lien avec les droits de l'homme, l'affirmation de la démocratie politique ?

Anna: Je suis idéaliste. La paix c'est la fin des actions non-violentes, la fin des objections de conscience totale. C'est par exemple le fait qu'aucun homme ne peut penser qu'il peut en tuer un autre. J'espère que dans une centaine d'années si l'on fait les choses nécessaires, les gens ne pourront plus penser à tuer parce que ce sera devenu impossible, idiot. Pourquoi tuer quelqu'un? Il n'existe pas de nécessité de tuer. C'est la paix pour moi. Pour les pays de l'Est la paix ne peut exister sans les droits de l'homme. Tout d'abord il faut appliquer les droits de l'homme sanctionnés en 1948 par la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme des Nations Unies. Je crois qu'il faut étendre les droits de l'homme aux droit de libre parole, de libre écriture, d'objection de conscience. Vraiment d'abord les droits de l'homme et puis l'on pourra penser à la paix. Parce qu'ici en Pologne nous vivons toujours la guerre. La guerre avec la police. La guerre avec l'armée. Une guerre à l'intérieur de la Nation, du pays.

On ne tue personne, presque personne mais c'est la guerre des paroles, c'est la guerre des gestes, c'est la guerre des regards. La guerre existe toujours. On ne peut pas parler de paix sans la libération de tous les gens.

N.R. Donc c'est paix et liberté, c'est Wolnosc i Pokoj. Ne trouves-tu pas que cela soit quelque peu contradictoire. Tu disais tantôt que vous alliez bientôt gagner la bataille pour l'objection de conscience et que Wolnosc i Pokoj se dissoudrait donc probablement. Mais en fait dans ta définition de la paix, la reconnaissance du droit à l'objection de conscience ne signifie pas la fin du combat pour la paix puisqu'il existe encore en Pologne tous les autres problèmes de liberté. Ne crois-tu donc pas qu'il y aurait pour Wolnosc i Pokoj ou pour un autre mouvement similaire, et évidemment pour le Parti Radical beaucoup de choses à faire encore ?

Anna: Oui mais je ne suis pas aussi optimiste que toi. Parce que la science, l'expérience des mouvements de contestation nous dit que chaque mouvement de contestation s'arrête après quelques années d'existence. C'est le même processus qui a lieu avec Wolnosc i Pokoj. La moitié des gens se retrouvent maintenant au Parti socialiste polonais, d'autres sont au Parti Radical comme moi, d'autres font autre chose encore. Je pense que Wolnosc i Pokoj existera peut-être encore, je l'espère. Mais peut-être qu'après avoir gagné cette bataille pour l'objection de conscience, qu'après avoir libéré les objecteurs qui sont en prison, nous nous trouverons devant un vide. L'écologie c'est bien mais cela ne donne rien, ou en tout cas c'est loin d'être suffisant. On pourrait peut-être exister encore comme Wolnosc i Pokoj. Je l'espère, on ne sait jamais.

N.R.: Walesa, Michnik et les autres leaders fameux en Occident, que représentent-ils pour toi ?

Anna: C'est difficile. Ce sont des types bien, Walesa par exemple. Lors de la grève par exemple Walesa les a rejoint et cela a été une très bonne chose pour les ouvriers qui ont fait la grève. Walesa n'avait rien fait pour cette grève éclate. Il n'était pas d'accord avec cette grève. Il est allé passer ces journées avec les ouvriers. Ca leur a donné de la force. Mais cela veut dire aussi que Walesa ce n'est pas seulement un homme, c'est aussi un visage, un symbole. Rien de plus non plus. Mais c'est aussi l'establishment. Il participe à l'activité de Solidarité bien sûr. Il parle. Il donne des interviews, des mots d'ordre, il proteste. Michnik c'est un homme qui fait de la publicité. J'ai entendu que pour le moment il écrivait beaucoup. Il est un peu historien. Il écrit des essais historiques. Quelque chose comme ça. Je crois que ces gens ont fait beaucoup en 1980. Maintenant je ne sais pas. Je ne les vois pas en train de faire quelque chose. Ils existent et quelque part cela suffit pour les polonais. Ils exi

stent encore.

N.R.: Mais tu ne crois pas qu'il serait possible de faire des choses avec eux, de nouvelles choses, par forcément et peut-être justement pas les choses qui ont été faites jusque maintenant, mais d'autres choses?

Anna: Je ne sais pas parce qu'alors que WiP existe depuis trois ans, Walesa vient s'adresser vraiment à nous pour la première fois. C'était il y a quelques jours quand il a dit officiellement merci aux gens de WiP qui les avaient aidés lors de la grève. C'était la première fois qu'il a fait un pas aux côtés de WiP, dans la direction de WiP. Cela a duré trois ans. Je ne sais pas s'ils veulent faire quelque chose avec nous. Ils sont, comme Kuron l'a dit, ouvriers, ils veulent Solidarité pour avoir un syndicat des ouvriers. Et ça s'arrête là pour eux.

N.R.: Tu disais, tu expliquais que tu n'aimerais pas vivre Occident. Quelles sont les raisons réelles, concrètes pour lesquelles tu ne vivrais pas en Occident?

Anna: En Pologne les gens pensent que l'Occident est un paradis et que la Pologne, l'Est, l'Union Soviétique, ce sont de véritables enfers. Moi personnellement, j'ai beaucoup d'amis qui voudraient vivre en Occident, la majorité des polonais voudrait vivre en Occident. Mais je pense que c'est bien de vivre ici parce qu'il y a beaucoup de choses à faire. On peut y être vraiment un être humain. Tandis qu'en Occident les gens veulent vivre seulement tranquillement. Ca ne suffit pas. C'est consommer la vie et c'est tout. Je crois que si je vivais en Occident cela me suffirait peut-être aussi. Ici je ne pourrais pas être vraiment riche, établie et donc je dois penser à autre chose. Est-ce que je dois changer, est-ce que je dois vivre normalement dans la pauvreté. Non, ce serait idiot, cela signifierait accepter le marasme. Mais la plupart des polonais vivent dans ce marasme. Si l'on vit dans la pauvreté, il faut faire quelque chose d'intéressant. Et je fais quelque chose d'intéressant, quelque chose que j'aime bea

ucoup cela. Si je vivais en Occident ça ne serait pas la même chose.

N.R.: Qu'attends-tu du Parti Radical pour la Pologne ? Qu'est-ce que tu veux, qu'espères-tu que le Parti Radical puisse faire un peu partout mais aussi en Pologne?

Anna: La libération de la Pologne peut-être (rires). Moi comme tous les polonais j'ai une idée de la Pologne européenne. Je ne sais pas si je peux dire européiste. Mais une Pologne européenne parce que pays qui vit comme les autres pays européens. En Europe il y a deux blocs, l'Est et l'Ouest. Nous sommes toujours à l'Est et ce n'est pas bon. Nous avons la même culture parce que la Pologne est fondée sur une culture latine comme toute l'Europe. Nous avons une très grande littérature comme en Occident. Et je ne peux pas dire qu'elle soit moins bonne que celle de l'Occident. Elle est seulement moins connue. Nous avons aussi des artistes, des peintres, des écrivains qui font la même chose qu'à l'Ouest. On ne dit pas tout cela. Je ne sais pas pourquoi mais tout ce qui se passe en Pologne est vraiment inconnu. Je pense qu'il faut unifier l'Europe. La Pologne par exemple est un pays fermé, vraiment fermé pour les polonais parce qu'ils ne peuvent pas aller à l'étranger et connaître ce qui se passe là-bas. En ce qui

concerne la culture par exemple. La culture c'est mon métier. Et ce serait mieux s'il n'y avait pas de frontière. On pourrait par exemple faire une université européenne dans laquelle les gens pourraient se rencontrer, dans laquelle, grâce à quelques langues officielles les gens pourraient parler ensemble. Je ne sais pas. Je ne m'imagine pas encore les Etats-Unis d'Europe. Il faut y penser. Je suis sûr que vous aussi au Parti Radical vous ne vous imaginez pas non plus les Etats-Unis d'Europe. Mais je crois que c'est important pour nous.

 
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