Nous sommes des militants du Parti Radical, militants de la démocratie et du droit, des libertés de pensée et d'opinion, des droits humains et civils. Nous sommes, surtout, des militants nonviolents qui vivent quotidiennement leur propre engagement afin que, ici et maintenant, puissent s'affirmer dans nos sociétés des principes et des valeurs qui autrement seraient condamnées à demeurer lettre morte, trop souvent hypocritement mis en exergue pour être ensuite mieux répudiés et foulés aux pieds. Dans les pays de socialisme réel, de ses crises et de ses cendres, beaucoup d'entre-nous continuent de payer cet engagement avec une lourde contribution personnelle, entourés et refoulés dans le mur de silence et de la répression. Mais nous savons aussi bien que l'émargination, la censure, l'embrigadement et le refus du droit à l'identité et à l'image, sont des phénomènes qui n'appartiennent pas seulement aux pays de socialisme réel: avec ces armes et à travers les mass-média on combat les adversaires politiques, les
voix qui dérangent, les minorités même en Occident qui se veut libre et démocratique, en sacrifiant à l'autel des intérêts de pouvoir, ce bien collectif qui est l'information libre et complète, la possibilité de communiquer et de connaître des idées et des propositions, le fondement même de la démocratie. Certains de nos camarades ont commencé aujourd'hui en Italie et en Espagne une grève de la faim nonviolente pour que soit assurée enfin l'information, la démocratie, des règles identiques pour tout le monde même à l'occasion d'élections qui se déroulent dans ces pays. Il y a entre autres, ceux qui, comme Marco Pannella, se sont battus, avec les seules armes de la nonviolence et de la tolérance, pour notre liberté et nos droits. Mais ce n'est pas tant par pure solidarité ou reconnaissance fraternelle qu'aujourd'hui nous décidons de manifester dans plusieurs capitales de l'Est européen et de participer à l'initiative nonviolente de la grève de la faim, que pour affirmer les raisons et la volonté d'une lutte
qui est commune. Dans le monde et dans l'ère de la communication de masse, caractérisée par un "quatrième pouvoir" dont la force apparait quelques fois démesurément supérieure aux pouvoirs traditionnels, la division entre la libre information des pays démocratiques et l'information autoritaire des régimes totalitaires, est toujours moins actuelle. A l'Ouest, pas moins qu'à l'Est, le contrôle rigide de l'information est recherché, pratiqué, localisé comme un centre de pouvoir et de conditionnement. Mais dans le monde et dans l'ère des communications de masse, il n'y a pas de plus grande blessure à la démocratie que la suppression des voix, des idées, des minorités: socialisme réel, et "démocratie réelle" tendent à des logiques identiques d'exclusion et de violence, conscients que le contrôle des moyens de communication rend désormais superflues les précédentes méthodes de liquidation de la dissension. C'est pour cela qu'aujourd'hui nous avons décidé de manifester. Et si après des années de lutte nonviolente,
de silence et de répression à l'Est, il y a aujourd'hui encore en Occident toujours plus de gens qui nous encouragent et partagent nos espérances, tout aussi bien nous demandons à ce que l'on sache combien est commune et partagée à l'Est également la bataille nonviolente pour une effective démocratie politique, une libre information, des règles et des droits identiques pour tout le monde même en Italie et en Espagne, Nous, pays de "démocratie Réelle" et de "quatrième pouvoir" embrigadé et répressif. C'est pour cela que nous manifestons devant les ambassades italiennes et espagnoles, et c'est pour cela que nous voulons aujourd'hui de façon emblématique, participer à leurs initiatives nonviolentes et partager leur grève de la faim.