par Marco PannellaSOMMAIRE: Nouvelle fondation du Parti communiste ou fondation d'un nouveau parti?
(L'UNITA', 15 mai 1990)
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Cher Occhetto (1), chers camarades du Comité central du Parti communiste, chers amis des "clubs", de la "gauche souterraine", de la "Gauche indépendante", il faut comprendre, il est urgent de comprendre, et d'être compris: s'agit-il d'une "nouvelle fondation" du Parti communiste ou de la "fondation" d'un nouveau parti? Un "projet de réforme de la politique, des institutions, en Italie et en Europe, à élaborer entre divers sujets politiques et électoraux au moins potentiellement autonomes et organisés de manière autonome, à structurer dans un Statut, dans les normes transitoires et finales d'un processus constituant serré et concordé, rapide, mais sans être inexistant, dans des organigrammes eux aussi définis d'avance pour le démarrage du nouveau parti? Ou s'agit-il, au contraire, d'une manifestation d'école jacobine qui décrète d'être constituante ou de constituer, en quelques jours, ou à peu près, le "nouveau parti"? D'un coté le Parti communiste qui concorde, autant que possible, parmi ses composantes inte
rnes, en premier lieu, et de l'autre nous, ou d'autres, "poussière d'étoile", galaxie qui vit "ad hoc", ou qui meurt, l'émanation du décret, et les circonstances plus ou moins publicitaires et "externes" de la manifestation de la "Constituante"?
Une constituante convoquée comme un Comité central extraordinaire par le secrétaire du Parti communiste, un jour annoncé comme tel, un autre comme un congrès de nouvelle fondation du Parti communiste, toujours en décembre, sans savoir l'heure ni la minute?
Ca me parait bien peu, même pour ceux qui d'aventure sont d'accord, qu'ils ne le soient pas déjà, et qui décident de rester.
Par ailleurs, il est temps de constituer une... (utilisons un peu la même méthode du moins pour le nom) Fédération démocratique des démocrates italiens, au niveau national, et des Unions régionales, avec l'objectif de la constituante, mais - aussi - avec la capacité de continuer si celle-ci ne devait pas avoir lieu, si elle devait échouer, ou si elle n'était que la couverture d'une simple nouvelle fondation. Nous essayerons tout de suite de la constituer, par exemple, dans les Abruzzes, sinon déjà dans le Latium, où avec une silencieuse mais claire arrogance on a suffoqué avant leur naissance, à deux reprises, en automne et au printemps, des listes "Nathan" (2) et toute autre préfiguration du nouveau.
De Venise à Catane, en passant par l'Aquila et Rome, il y a beaucoup à faire, me semble-t-il, pour que tout le nouveau ne vienne pas, ou ne manque pas, de la direction du Parti communiste et de ses repliements compréhensibles mais dangereux.
Il y a, pour finir, le choix internationaliste et fédéraliste, nonviolent et laïque, à garantir avec la vie du Parti radical, et non sa fin dans la confluence habituelle dans une "Internationale" d'appareils bureaucratiques et de leaders nationaux et nationalistes plus ou moins charismatiques, un choix de vie et de lutte, par contre, de chaque militant qui n'entend pas parcourir une nouvelle fois l'illusion du socialisme et de la démocratie dans un seul pays ou dans une seule région, engagé personnellement et collectivement dans la lutte concrète pour les droits civils, pour les droits de l'homme et les droits politiques, pour une société de droit, pour une politique radicalement environnementaliste au niveau international.
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N.d.T
1 - OCCHETTO ACHILLE. (Turin 1936). Homme politique, italien. Premier représentant de la gauche fidèle à Ingrao, passé ensuite au centre de Berlinguer, devenu secrétaire du Parti communiste italien (PCI) en 1988, succédant à Alessandro Natta. Après avoir lancé l'idée d'une grande "Constituante" de la gauche ouverte à toutes les forces réformatrices, il s'est ensuite replié uniquement sur le changement de nom du parti ("Parti Démocratique de la Gauche").
2 - NATHAN ERNESTO. (Londres 1845 - Rome 1921 - il prit la nationalité italienne en 1888). Homme politique, il conduisit au début du siècle une coalition laïque et réformiste à la conquête de l'Administration communale de Rome, contrôlée jusque-là par les représentants de la spéculation immobilière liés aux milieux les plus réactionnaires et cléricaux. C'est à lui, comme maire de Rome (du 25 novembre 1907 au 4 décembre 1913), que l'on doit les seules grandes réformes sociales de l'administration communale de Rome. Juif, franc-maçon, Nathan a représenté un cauchemar jamais oublié pour les forces réactionnaires romaines. En 1989 Marco Pannella, à l'occasion des élections administratives, lançait un projet de "Liste Nathan" ouverte aux forces laïques de gauche. La proposition ne fut pas accueillie.