Radicali.it - sito ufficiale di Radicali Italiani
Notizie Radicali, il giornale telematico di Radicali Italiani
cerca [dal 1999]


i testi dal 1955 al 1998

  RSS
ven 09 mag. 2025
[ cerca in archivio ] ARCHIVIO STORICO RADICALE
Conferenza droga
Losonczy Anne - 23 luglio 1990
AU-DELA DE LA DEPENALISATION

Il semble bien que l'hystérie prohibitionniste et ses dangeureux effets sociaux commencent á ébranler une partie des médias et de l'opinion publique. Dans le même temps, la dénonciation des méfaits de cette politique et les arguments en faveur de la dépénalisation se sont affinés et enrichis; ces deux facteurs convergents ont créé un espace de débat publique d'une ampleur auparavant inimaginable. Parallèlement, l'usage des drogues de différents types s'étend dans la société, et au-delá de ses effets pervers, commence á y engendrer un savoir populaire diffus sur leurs effets et usages.

Le moment me semble donc propice pour que les antiprohibitionnistes puissent entamer une réfléxion, au-delá du débat juridique, sur le phènomène socio-culturel complexe qui se trouve derrière le mot simplificateur de "drogue". Car s'il est évident que la dépénalisation éliminerait les problèmes sociaux (gigantesques) créés par la répression, elle laisse dans l'ombre un autre problème, majeur: celui du manque d'un système culturel de normes de conduite socialement apprises qui régulerait le bon usage de la drogue, de la même manière que la culture occidentale a su réguler depuis longtemps la consommation de l'alcohol et du tabac. Les antiprohibitionnistes devraient être préparés á réfléchir sur ce problème et á y proposer des hypothèses de solution, car une grande partie des effets pervers qu'une dépénalisation culturellement non préparée, massive et indiscriminée susciterait, pourrait être atténuée.

Quelles seraient en gros les pistes pour une telle réfléxion? Il s'agirait de connaître et d'élargir le processus d'acclimatation culturelle des différentes drogues, processus (á peine entamé dans notre société), qui consiste en l'émergence de normes CULTURELLES (non juridiques) du bon usage de celles-ci, qui limite les abus et stabilise la consommation majoritaire á un niveau peu nocif,tel qu'il en existe pour la cocaïne par exemple dans certains milieux intellectuels de la Colombie et du Pérou. Faute d'une acculturation sociale de la drogue, faute d'une typologie réaliste et efficace qui distingue clairement entre les drogues créant une accoutumance forte et celles n'en créant pratiquement pas, faute de casser l'association établie "drogue-déchéance nécessaire-mort atroce", chaîne associative qui fait des stupéfiants la valeur-refuge de tous les desperados et bloque ainsi le processus d'acculturation de ceux-ci; faute de tout cela, une dépénalisation indiscriminée, massive et soudaine de TOUTES les drogues

pourrait produire pendant un temps les mêmes effets mortifères chez nous que l'introduction brutale de l'alcohol dans les sociétés indiennes de l'Amérique. En effet, celles-ci avaient normalisé culturellement, d'une façon totale et positive, toute une série de substances hallucinogènes sans jamais connaitre l'effet d'acoutumance; par contre, elles ne se sont pas encore remises des effets destructeurs de l'alcohol qu'elles n'ont pas eu le temps graduel d'apprivoiser socialement.

Pour que dans notre société puissent émerger des normes socio-culturelles de cet apprivoisement et du bon usage des drogues, il serait á mon avis nécessaire: 1) De passer par une phase paradoxale (déjá existante dans certains pays) de tolérer et contrôler la consommation á petite échelle avant de dépenaliser la consommation massive; 2) De contribuer á l'établissement d'une politique de tolérance SOCIO-CULTURELLE, en sortant la drogue de l'optique exclusivement "victimiste", misérabiliste et marginale, afin de développer par l'information et l'éducation un contexte culturel CONVIVIAL des drogues moins nocives (tel qu'il en existe pour l'alcohol et le tabac) qui s'opposerait á son usage actuel, honteux, caché et solitaire ou orgastique et scandaleux. 3) De viser ainsi á l'auto-contrôle social de l'usage et de l'abus de la drogue.

Cette alternative n'impliquerait pas la dépenalisation IMMEDIATE de toutes les drogues; elle consisterait à entamer un processus de tolérance contrôlée qui donnerait le temps pour aboutir á la normalisation sociale de chacune et á sa progressive dépénalisation; processus qui a été historiquement celui de l'acclimatation culturelle du tabac, du café et de l'alcohol chez nous. Celui-ci devrait permettre parallèlement le développement d'une moindre tolérance socio-culturelle (et non pénale) par rapport á certains produits (exemple actuel le crack) qui sont massivement nocifs.

La dépénalisation socialement la moins coûteuse possible passe donc á mon avis nécessairement par l'acculturation sociale progressive des drogues qui inclut leur détachement d'un univers de valeurs exclusivement mortifères et marginales, et leur rattachement á un contexte culturellement et socialement plus positif; voìlá l'enseignement pour l'anthropologue que je suis de l'exemple des sociétés indiennes d'Amérique du Sud, de leur maîtrise culturelle du bon usage de ce que nous appelons des "drogues" et de leur désarroi face á l'alcohol.

Dans ce processus d'innovation de l'éthique et de la culture publiques, le rôle des minorités sociales "pionnières" peut être très impórtant. Aux antiprohibitionnistes -entre autres- d'appuyer ce défi par leur réflexion et leur action éducative et d'information, au-delá de la dénonciation purement juridique. Si seules des normes culturelles d'intolérance sociale face á l'abus et á certaines drogues hautement nocives peuvent efficacement limiter les dégâts -le contexte actuel du tabac est éclairant á ce sujet, malgré ses dérapages "puritains"-, il faut cependant accepter aussi que toute drogue -légale ou non, culturelle ou non - trouve dans nos sociétés des espaces de marginalité sociale, culturelle et psychique où sa pathologie suicidaire se déploie. Il dépend aussi de notre effort et de notre réfléxion au-delá du créneau juridique habituel que ces espaces se réduisent progressivement.

 
Argomenti correlati:
stampa questo documento invia questa pagina per mail