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Conferenza droga
Ruiz-Portella Xavier - 10 settembre 1990
LA POMME INTERDITE
Ou comment St-Jean Chrysostome est devenu, à son insu, un tout grand anti-prohibitionniste

Article de Fernando Savater paru dans "El País" du 2.9.1990, où il commente le livre de Thoomas Szasz "Droga y ritual" dont la traduction en espagnol vient de paraître au Fondo de Cultura Económica, Madrid, 1990.

On nous a toujours dit que nos premiers parents ont été chassés du paradis parce qu'ils ont enfreint l'interdiction divine et ont mangé le fruit de l'arbre de la science du bien et du mal. Ils ont pris par la suite des habitudes néfastes: la désobéissance à l'autorité et la formulation de jugements moraux. Ce n'est pas rien ce qu'une simple pomme a apporté: la liberté humaine découle de ce fruit si profitable. Il s'est agit sans doute d'une "felix culpa", d'un pêché indispensable.

DES MAITRES PLEINS DE BON SENS

Même dans le christianisme il y a eu des maîtres pleins de bon sens. Par exemple, saint Jean Chrysostome (appelé "Bouche d'or"), qui déjà au IVème siècle avait les idées très claires: "J'entends l'homme s'écrier: Si seulement on ne l'avait jamais découvert! Quelle folie! Quelle démence! Est-ce donc le vin la cause de ces abus? Non. Car si, à cause de l'ivresse, tu dis 'si seulement il n'y avait pas de vin!', alors tu dois dire de même 'si seulement il n'y avait pas la nuit!' à cause des voleurs, et 'si seulement il n'y avait pas de femmes!' à cause de l'adultère".

C'est évident, et c'est évidemment oublié. L'ancien évêque de Constantinople s'indignait que l'on pût tenir une substance, aussi moralement insignifiante que n'importe quelle autre, pour la source de désordres et de problèmes qui proviennent du désir des hommes ou de la convention sociale. Pauvre saint-Jean Chrysostome! Il savait peu de chimie et encore moins de médecine; il croyait donc que l'homme était un sujet auquel on pouvait attribuer des fautes et des mérites, un sujet qui pouvait être éduqué en vue de s'améliorer. Il lui aurait suffi d'une courte conversation avec n'importe quel expert d'aujourd'hui en lutte anti drogue pour apprendre que l'homme agit par réflexe, d'une façon non volontaire; qu'il est un objet, non pas un sujet, et qu'il ne peut rien contre des produits diaboliques et tout-puissants comme l'héroïne ou le crack.

Vous recommenderai-je ce livre de Thomas Szasz seulement parece qu'il s'agit du meilleur livre écrit jusqu'à présent sur les mécanismes socio-culturels qui ont produit le mythe de la drogue-démon? Je crains que ce ne soit pas suffisant. L'époque des raisonnements sur cette question semble déjà définitivement révolue, du moins si nous en jugeons de la façon servile dont sont acceptés les dogmes repressifs. Enfin "l'ami américain" a mis tout le monde d'accord sur les félicitations mutuelles! Quel argument logique pourrait bien s'imposer là oú échoue la simple évidence médiatique de la bêtise quotidienne? Un jour, c'est Miguel Solans qui apparaît sur les écrans de la télévision espagnole et il assure que le plan anti-drogue semble porter, petit à petit, ses fruits; le lendemain la presse informe qu'en Espagne les morts par drogue ont augmenté ces six dernières années de 400%. Les experts prédisent avec un zèle bien enviable que le crack drogue d'acoutumance instantanée, comme on l'affirmait de la masturbation

au siècle dernier est mortel à coup sûr (tout comme la masturbation, bien entendu); par après, nous apprenons que Marion Berry, ancien maire de Washington et parfaitement bien portant, en prenait sans cesse, tout comme il consommait de l'héroïne, de la cocaïne et de l'alcool tandis qu'il gouvernait l'une des plus grandes capitales du monde: les seuls ennuis qui ont réussi à l'abattre ont été policiers, non pas chimiques. (...) Franchement, espérer que la lucidité du docteur Szasz puisse servir de quelque chose contre le crétinisme croissant, ce serait parfaitement UTOPIQUE, pour employer le mot préféré des curés et des hommes politiques.

Donc, je me bornerai à vous dire que "LA DROGUE ET LE RITUEL" est une des réfléxions éthiques les plus passionantes de ces dernières décennies, et qu'elle a été écrite par l'un des maîtres les plus courageux et profonds de la raison pratique de ce siècle. Quelqu'un qui en 1984, peu d'années avant l'effondrement des systèmes communistes, faisait remarquer: "Apparemment, le grand débat moral de notre époque est la lutte entre le communisme et le capitalisme. Or, en réalité cette lutte cache un combat encore plus grand: la bataille livrée par les politiciens et leurs lacais intellectuels, aussi bien de l'Est que de l'Ouest, contre la liberté de jugement et la responsabilité personnelle"! Je vous le dis au cas où ce genre de choses vous intérésserait encore.

 
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