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Conferenza droga
Partito Radicale Centro Radicale - 17 agosto 1995
Colombie, drogue

L'EQUETE SUR LES CARTELS DE LA DROGUE ATTEINT LES MILIEUX GOUVERNEMENTAUX COLOMBIENS

Les récentes arrestation de trafiquants devraient faire monter le cours mondial de la cocaïne

par Anne Proenza

(Le Monde, 17 août 1995)

Le prix de la cocaïne va-t-il monter dans les rues de Paris, New York, Rome ou Los Angeles ? Telle est l'une des questions qui se posent après la mise sous les verrous de six des sept dirigeants du cartel de Cali (Le Monde du 8 août). Logiquement, le démantèlement de cette organisation criminelle, présentée comme une des plus puissantes du monde, devrait conduire à la déstabilisation du marché mondial de la drogue et à une envolée des prix. Si elle a lieu, la preuve sera donnée de l'ancienne puissance des trafiquants, aujourd'hui emprisonnés; la stabilité des prix montrerait, au contraire, que ces trafiquants ont déjà été remplacés, en Colombie ou ailleurs, dans leur lucratif négoce. Selon les spécialistes, la hausse attendue ne devrait avoir lieu, en tout état de cause, que plus tard, en fonction de l'importance des stocks accumulés, aux Etats-unis notamment.

Selon les estimations les plus courantes, la Colombie produirait entre 300 et 700 tonnes de cocaïne par an. Les cultures de feuilles de coca, de pavot et de marijuana couvriraient, selon les autorités, respectivement 45 000, 15 000 et 6 000 hectares. Depuis le début des années 80 et le boom de la marijuana, la demande n'a pas tari. La narco-industrie est l'expression du capitalisme le plus sauvage , affirme Gabriel de Vega, directeur du Conseil national des stupéfiants. Aussi l'argent engendré par la drogue est-il difficilement évaluable. il représenterait entre 1 % et 4 % du produit intérieur brut, selon les estimations de l'actuel gouvernement colombien. Guilbert et

Miguel Rodriguez les deux frères

qui dirigeaient le cartel de Cali jusqu'à leur récente arrestation, comptent parmi les cent personnes les plus riches du monde, avec une fortune à situer, selon la revue américaine Forbes, entre 5 et 7 milliards de dollars.

La grande force du cartel de Cali a été de réussir à mettre en place et

à contrôler le circuit complet du trafic de la drogue: plantations de cocas ou de pavots, laboratoires clandestins, logistique, distribution en gros et demi-gros, vente au détail. Pour parvenir à leurs fins, ils n'ont pas hésité à faciliter l'élimination de leur rival de Medellin, Pablo Escobar; ils ont aussi neutralisé la mafia italo-américaine qui contrôlait la distribution aux Etats-Unis. Ils ont créé une symbiose entre les structures économiques et politiques du pays, constate Alejandro Reyes, professeur à l'Institut politique de l'université nationale. Outre de nombreux parlementaires, le président ErnestoSamper est lui-même sur la sellette, accusé d'avoir accepté de l'argent de la drogue pour le financement de sa campagne.

Pour autant, le cartel de Cali est-il définitivement anéanti ? Selon Alejandro Reyes, il est évident que, se sachant depuis longtemps dans le collimateur, le cartel a mis en place une nouvelle structure capable d'assumer la suite des affaires . Le directeur de la police colombienne, le général Rosso José Serrano, estime que cette organisation était la dernière de grande envergure en Colombie. Il ajoute: Les petits et moyens trafiquants, déjà extrêmement riches, ne prendront pas le risque de se frotter à la justice. Comme Gabriel de Vega, il pense que la narco-industrie a aujourd'hui des structures beaucoup plus souples, compartimentées et indépendantes .

MOINS DE CONCENTRATION

opérant parfois depuis plusieurs années, les nouveaux trafiquants sont discrets et moins avides de pouvoir politique. Les cartelitos, comme on les appelle ici, se seraient multipliés depuis la guerre déclarée contre les barons de la drogue. Certaines de ces organisations sont connues dans la mesure où elles agissent dans une région précise. Mais les plus récentes n'auraient pas, selon la police, de domicile fixe . Quelques-unes ont été démantelées ces derniers mois. La police connaît les sept dirigeants du cartel du nord du Valle, une des organisations satellites du cartel de Cali. Son chef, Henri Loaiza, est en prison. Le mois dernier, la police a aussi annoncé la fin du cartel de l'héroïne d'Ibagué , dans le département du Tolima. Le cartel de la côte , un des plus connus, car il a commencé dans les années 60 avec la marijuana à Santa-Marta sur la côte caraïbe, ne serait plus, selon Alejandro Reyes, cette organisation fermée, dominée par une ou deux familles. Il s'agit aujourd'hui de commerçants

indépendants et concurrents les uns des autres. Un de ses principaux dirigeants, Eduardo Davila, notable de la région, a été arrêté.

Selon le gouvernement, il y aurait environ 300 000 petits cultivateurs de coca, de marijuana ou de pavot, victimes, pour beaucoup, de la crise de l'agriculture et de la chute du prix international du café. Jusqu'à présent, ils sont assurés de vendre une récolte de marijuana ou de pâte de coca à un bien meilleur prix qu'un sac de café. Ils ont

manifesté massivement l'hiver dernier, lorsque le gouvernement a lancé une vaste campagne d'éradication des cultures de coca au moyen de fumigations aériennes. Les programmes étatiques de substitution des cultures ne comblent pas leur manque à gagner.

Les autorités estiment que leurs dernières performances en matière de lutte contre la drogue devraient décourager plus d'un trafiquant en puissance, d'autant que le prix de base de la pâte de cocaïne a chuté, selon elles, de 40 % au cours des trois derniers mois. Peines de prison plus élevées, éradication des cultures, destruction de laboratoires (348 en six mois), multiplication des perquisitions et des arrestations, inscriptiondu délit de blanchiment d'argent au code pénal sont quelques-unes des mesures prises ces derniers mois. Les experts ajoutent qu'on assiste à une décentralisation du trafic de drogue. Les pays comme le Pérou et l'Equateur, qui n'étaient auparavant que des producteurs de feuilles de coca, ont maintenant leurs propres laboratoires. Le trafic transite largement par le Mexique et le Brésil notamment. Car le commerce de drogues reste extrêmement lucratif: un kilo de cocaïne se vend entre 10 000 et 11000 dollars aux Etats-Unis (un peu plus de 50 000 francs). Le même kilo, prêt à l'exportati

on, vaut en Colombie entre 1000 et 2 000 dollars.

Dans l'immédiat, la police va devoir s'attaquer à la délinquance dite commune. Selon le général Serrano, le démantèlement du cartel de Cali va entraîner l'apparition de nouveaux chômeurs. Le groupe spécial de l'armée qui était -chargé de traquer Pablo Escobar, puis le cartel de Cali, devrait être rapatrié à Bogota, afin de s'occuper de la sécurité de cette capitale réputée être une des villes les plus violentes du monde: un meurtre s'y commet pratiquement toutes les heures. Mais rarement pour des affaires de drogue.

 
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