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substances illégales

LE VICE ET LA VERTU, UNE OPINION SUR LES DROGUES

par Pierre Carlier

Le Soir, 29 décembre 1995

Depuis que Rhône-Poulenc a synthétisé la prométhazine découverte par Laborit, les vagabonds de la défonce qui refusent à la religion, le droit, la psychiatrie ou la psychanalyse le droit de s'occuper de leurs douleurs intimes et de leurs états d'humeur, ont retrouvé face à leur désir l'énergie renouvelée des lobbies médicopharmaceutiques peu soucieux de partager la manne avec les trafiquants de tout poil.

Les barons de la pharmacodépendance se heurtent de front aux barons des cartels, les espoirs de bénéfices juteux s'entrechoquent.

Les uns profitent des remboursements de la sécurité sociale, les autres pèsent sur les budgets des Etats par les frais engagés dans la lutte contre leur concurrence, finalement, c'est tout à l'avantage des premiers et des seconds mais à charge du cotisant et du contribuable.

Après les électrochocs, qui resteraient une des meilleures médications contre la dépression, les nouveaux magiciens expérimentent le blocage des récepteurs dopaminergiques, la libération de l'acetylcholine ou de la prolactine, la stimulation de l'adenylcyclase l'inhibition de l'histamine ou des récepteurs muscariniques, l'action dé la sérotonine et des interventions sur les récepteurs spécifiques D3 et D4, autant de recherches coûteuses qu'il faudra bien amortir et valoriser.

Ces manipulations ne s'attaquent toujours qu'aux symptômes, tout comme les substances illégales, elles ne peuvent prétendre guérir la cause du malaise.

Comme le dit Zarifian (1): le gène du mal-être existentiel reste à découvrir, on n'empêchera pas l'homme d'essayer de conquérir le bonheur, même si pour cela il lui faut voler aux dieux le nectar et l'ambroisie .

Le reste est une question de gros sous.

Quand Muhammad interdit le vin, c'est peut-être parce que l'ivresse fait négliger au croyant l'obligation de ses devoirs religieux, mais c'est aussi parce qu'au VII siècle, les chrétiens possèdent le monopole du commerce du divin breuvage dans la péninsule arabique, colportant barriques et idées d'oasis en oasis.

D'ailleurs, la lutte pour le contrôle du marché de l'anxiété bat également son plein à l'intérieur du système légal, entre marchands de pilules et marchands de tabac ou d'alcool, entre psychologues en surnombre et apothicaires du cerveau.

Il va falloir faire le tri entre les malades qui attendent tout de la potion magique et ceux qui ne supportent aucune médication. Le psychotrope est un produit industriel soumis aux logiques commerciales... L 'industriel, particulièrement en France où le prix est maintenu assez bas les accords avec les organismes qui remboursent, est conduit à rechercher les moyens de développer ses volume s de vente sur un terrain propice. (2)

La plupart des drogues légales, de synthèse ont fini par dégager des effets secondaires néfastes et ont dû être abandonnées après quelques années de commercialisation.

Or, il manque à la science actuelle une information essentielle: à quoi servent en temps normal les récepteurs sur lesquels se fixent les molécules stimulées par la chimie de l'anxiété? (3)

Si le travail politique des consortiums est plus facilement identifiable aux Etats-Unis où leurs pressions font partie du jeu politique établi, on remarquera qu'en Europe, c'est dans les pays où la médecine est la moins sacralisée dans le statut que lesprescriptions respectent des posologies raisonnables.

De l'Imaprine au Prozac (fluotexine sérotoninergique), de l'Haldol (que les laboratoires belges ont largement fourni aux camps d'internement psychiatrique de l'ex-URSS) à la clozapine et à la ritaline des enfants hyper-actifs avec déficit d'attention (THADA), les chimio-psychiatres ne guérissent personne, ils soulagent peut-être certaines misères mais ni plus ni moins que d'autres produits interdits.

Des produits dont l'utilisation serait inoffensive pour l'intégrité physique de leurs consommateurs mais dont les effets seraient puissants sur leur comportement, leurs sentiments, leur capacité de résistance, revêtiraient rapidement une grande importance stratégique et politique. (4)

Ce qu'on a voulu nier aux substances naturelles, à savoir qu'elles pouvaient soigner les maux de l'âme, on le reconnaît aujourd'hui aux produits synthétiques parce que ce qui était jusqu'à présent demeuré dans le champ de la philosophie est entré dans le domaine des sciences (5) et de leurs applications pratiques marchandes.

Dès lors, le grands cris des vertueux quand on parle de légaliser le marché des substances illégales par l'Etat dans le cadre d'une politique de prévention des dommages et la suppression du caractère criminogène de cette législation mortifère, apparaissent sous un jour nettement moins éthique que voudrait nous le faire croire une certaine coterie en blouse blanche.

PIERRE CARLIER

Criminologue U.L.B. Extrait de Le Fantôme de la drogue , à paraître

(1)Zarifian Ed, Des paradis plein la tête, Paris, Jacob, 1994.

(2)Huber G., L'illusion métabolique, Paris, P. U. F, 1994.

(3)Escande M., dans La Revue du Praticien , 44, 2316, 1994.

(4)Gros, Jacob, Royer, Rapport sur Sciences de la vie et société dans La Documentation française, 1979, P. 267.

(5)Dennett D., Content and Consciousness, London, Routledge, 1969.

 
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