Bruxelles, le 17 mars 1998.Madame, Monsieur,
Chèr (e) ami (e),
" Aujourd'hui en Italie, demain en Europe", c'était le slogan utilisé lors des actions de désobéissance civile organisées par la CORA il y a quelques semaines à Rome. Certains d'entre nous, les français Thierry Meyssan et Michel Sitbon, des belges Eric Picard, Michel Hancisse, Alexandre de Perlinghi, des italiens, avions décidé de désobéir publiquement aux lois italiennes sur les drogues en distribuant gratuitement de petites quantités de hashish afin de soutenir l'engagement de Marco Pannella et d'autres militants radicaux eux-mêmes confrontés à une série de procès pour faits similaires et révéler l'exemplarité de la situation de ce pays dans le cadre international.
Ce n'est sans doute pas par hasard si au moment où s'ouvrent ces procès pour désobéissance civile, le Parlement italien vient de débloquer l'examen d'un texte de loi sur le cannabis, quatre années après que la CoRA ait déposé une proposition de loi d'initiative populaire signée par plus de 50 000 citoyens. Ces actions de désobéissance civiles nonviolentes, avec les limites imposées par les réflexes "anti-radical" de beaucoup de médias, et pas seulement en Italie, ont permis d'accélérer les temps de cet affrontement face au pouvoir et à la violence des mafias internationales.
Libertés, respect de l'Etat de droit et nonviolence
Elles font croître également auprès des citoyens la possibilité de comprendre les raisons précises, dramatiques pour lesquelles nous avons choisi de passer à la phase ultime de cette bataille contre le prohibitionnisme. Ces initiatives nonviolentes apportent à une grande partie de l'opinion publique la conscience de ce que la liberté de chacun est en réalité mise en péril à cause de lois avant tout idéologiques, dont l'application est nécessairement arbitraire, destructrice de toute certitude du droit. Et justement c'est de ce pays, l'Italie membre de l'Union Européenne, qu'est issu un haut représentant de l'ONU, Pino Arlachi qui a décidé la honte d'un financement en milliards de francs au régime guerrier des Talibans d'Afghanistan, contre les droits et la vie des femmes , pour soi-disant détruire les cultures d'opium.
A Strasbourg et à l'ONU
Dans le même temps nous soutenons les prémisses d'un débat démocratique à Strasbourg et celles d'une voix disonante à l'ONU, afin d'éviter que les institutions internationales ne soient invoquées comme lieu de la "non-politique", où se développent par exellence les réflexes autoritaires et purement répressifs des bureaucraties de "l'anti-drogue", au regard de la responsabilité respective des gouvernements et des forces d'oppositions. Au PE avec les débats sur une proposition de résolution déjà adoptée en Commission des Libertés publiques (légalisation des drogues "légères" et distribution contrôlée d'héroïne); et à l'ONU en aidant la voix finalement toujours isolée du Parti radical transnational (ONG de 1ère catégorie des Nations-Unies) sur le front de la guerre à la drogue.
A l'occasion de la session spéciale des Nations-Unies consacrée à la drogue du 10 au 13 juin '98, nous vérifions la possibilité d'organiser ensemble avec des associations européennes et américaines une journée mondiale antiprohibiionniste pour la révision des Conventions internationales en matière de drogues.
A Paris, le prochain Congrès de la CORA : "une folie raisonnable"
Ces dernières semaines nous avons commencé à travailler sur l'organisation du prochain Congrès international de la Cora qui devrait se dérouler les 5 et 6 juin prochain à Paris dans les salles mêmes de l'Assemblée nationale . Il va sans dire que dans le contexte politique français actuel prônant la répression à outrance envers les consommateurs de drogues, ce rendez-vous des antiprohibitionnistes revêt une portée toute particulière, qui plus est dans un lieu où par excellence devrait normalement voir s'ouvrir le débat démocratique.
Pour le droit à la liberté d'expression
Vous n'êtes pas sans savoir qu'en France existe une disposition -l'art. L 630- interdissant la présentation des stupéfiants sous un jour favorable. Cet article du code de la santé publique et la loi générale de prohibition (1970) conduisent les autorités, sous couvert de réprimer l'apologie des drogues illicites, à interdire toute manifestation en faveur de la légalisation des drogues, à saisir livres et brochures, à poursuivre pour incitation et traffic, y compris des éditeurs ( éditions du Lézard; Eléphand Rose). De fait les responsables d'Act-Up, du Circ (collectif cannabis) et le secrétaire général des Verts, -organisation membre de la majorité gouvernementale !-, auront à en répondre devant la justice les 25, 26 mars et 8 avril prochains. Des peines d'emprisonnements et de lourdes amendes ne sont pas à exclure. Pour tous les démocrates, au delà de leurs opinions propres sur les drogues, il s'agit bien dans cette situation de s'opposer à la censure du débat politique et de la liberté d'expression.
Avec Emma Bonino
Ainsi le Congrès de la Cora, où l'on devrait voir, sous l'égide de la Commissaire européenne Emma Bonino, affluer nombre de députés nationaux et européens, des responsables de partis et d'associations, des ministres, et aussi et surtout nombre de militants de toute l'Europe, devrait constituer en soi un évènement politique d'importance, sans aucun doute une "provocation" aux yeux de la majorité de la classe politique française. Exiger le débat démocratique et l'organiser au sein même de l'Assemblée nationale, ceci représente plus encore une "provocation" supplémentaire.
Ce Congrès s'inscrit également dans la foulée des journées d'actions des 11 et 12 décembre derniers tenues au Parlement européen à Bruxelles et au Grand-Duché. Sous la présidence de Mr Pol Boël (industriel et ancien sénateur libéral), nous avons vu la participation de près de 200 personnes, dont Emma Bonino, le ministre grec Georges Panpandréou, des hauts responsables socialistes portugais , les députés José Happart (B-PS), Hedy d'Ancona (PB-PS), Vaz da Silva (P-PPE) ...Le même jour le député radical Dell'Alba prenait la parole à Londres à un meeting organisé par le journal The Independent On Sunday, soutenu par Virgin et les Body Shops.
Le débat au Parlement européen
En janvier de cette année, fait rarissime, le rapport d'Ancona -préconisant la légalisation du cannabis, la dépénalisation de toutes les drogues, la révision des Conventions de l'ONU et autres questions portant sur la prévention et le respect des politiques nationales pour la réduction des risques-, fut renvoyé pour examen en commission des Libertés publiques du PE, alors qu'une majorité de députés (17 contre 11) l'avaient déjà approuvé dans cette même commission. En plénière, nous pensions être battus à 30 ou 40 %. Sous la pression directe des cabinets Blair et Jospin contre l'adoption de ce texte, une majorité de députés composés des socialistes, des verts, des radicaux, de la plupart des libéraux et de quelques démocrates-chrétiens ont préféré contre les communistes, l'extrème droite et la majorité du groupe PPE le réexamen du texte, plutôt que son abandon. Chose impensable il y encore quelques années.Un nouveau vote ne devrait pas intervenir avant plusieurs mois.
A Paris, nous pouvons compter sur la venue de délégations provenant d'Italie, du Portugal et de Belgique. Des contacts suivis existent avec nos amis de Grèce, du Royaume-Uni, du Luxembourg, de Hollande et de la Suède. En Suède, comptant un inscrit aujourd'hui à la Cora, un journal à grand tirage nous a récemment honoré d'une large publicité dénoncant "le lobby de la Cora et des antiprohibitionnistes qui pourraient forcer ce pays à légaliser les drogues". Mais la question centrale qui nous préoccupe est de faire venir au congrès un maximum de citoyens français. Une première réunion, ce 21 février, réunisant une trentaine de personnes, a déjà eu lieu à Paris. Le prochain rendez-vous d'organisation est fixé le 21 mars (14h), au siège du PRG 13 rue Duroc Paris VII ème .Ces réunions sont ouvertes à tous et à toutes.
Le Congrès des inscrits et des antiprobhibitionnistes
Ce Congrès des inscrits à la Cora est un moyen de vérifier les timides ouvertures enregistrées dans un des pays les plus prohibitionnistes d'Europe et de vérifier l'adéquation de cet instrument politique "CORA" à vivre comme l'organisation des antiprohibitionnistes en Europe. Nous serons ainsi appelé à réfléchir aux enjeux et à la nécessité toujours plus affirmée d'un instrument adéquat de lutte transnationale.
Non pas sur un "programme d'idées" ou idéologique, mais sur des questions concrètes d'initiatives politiques et nonviolentes, nous te proposons de t'inscrire ou de contribuer à la Cora '98, à t'y associer de la manière que tu jugeras la meilleure. A très bientôt, Michel Hancisse
CALENDRIER D'INITIATIVES :
Samedi 28 mars : manifestation au centre de Londres.
Depuis des mois, The Independant on Sunday orchestre une campagne de presse en faveur de la décriminalisation du cannabis. Nous avons décidé de nous y associer. Des (dizaines ? de) milliers de manifestants sont attendus. Pour toute info : Gwendoline De Sario au ++ 32 (0) 2- 284 28 27 (Bruxelles)
Congrès de la CORA- Paris les 5-6-7 juin 1998 - Assemblée Nationale
Veuillez déjà réserver ces dates. Prière de contacter Thierry Meyssan pour toute collaboration ou Bruxelles.
Inscrivez-vous à la CORA '98 !
-330 ff à verser sur le n( de compte 10067.00101.10320834404 de la Sogenal (agence au PE-Strasbourg)
à l'ordre de la CORA -Coordination Radicale Antiprohibitionniste.
ET ENCORE :
Procès du Circ
Les euro-députés radicaux Gianfranco Dell'Alba et Olivier Dupuis se rendront à Paris
ce 25 mars au procès du Circ (Collectif pour la légalisation du cannabis). A l'instar de centaines de personnalités et citoyens français ayant avoué dans un manifeste une consommation de produits stupéfiants, invités par la défense au tribunal, ils comptent à leur tour s'y auto-dénoncer. Pour rappel, à l'automne dernier, le Circ avait envoyé un joint à tous les députés français.
Liberté d'expression : appel aux députés d'Europe contre les positions de l'ONU
Suite au récent rapport de OICS ( agence des Nations-Unies pour le contrôle des stupéfiants), la Cora a adressé un appel aux députés d'Europe afin que les droits civils et politiques, ainsi que la liberté d'expression ne puissent en aucun cas être violés par des législations d'urgence ou d'exception; que le "délit d'incitation publique à la consommation illicite de drogues" ne doit en aucun cas être invoqué pour empêcher tout débat démocratique; et que stigmatiser le travail des membres des Parlements en faveur de la légalisation des drogues constitue une ingérence contre les règles de la démocratie et une attaque frontale contre les Constitutions des Etats membres. (Texte de l'appel sur demande)
Front National
Dans une "lettre d'informations confidentielles" intitulé Faits et Documents, les services du Front National de Jean-marie Le Pen ont analysé sur une dizaine de pages ce qu'ils qualifient de "Lobby Pro-Drogue". Cette revue destinée à "informer" les cadres du parti d'extrème droite en France (près de 1000 personnes) passe en revue les faits et gestes des responsables et des organisations "favorables à la drogue". Dont la Cora et les radicaux de Marco Pannella qui y occupent une place de choix. Depuis le Congrès du Bruxelles en décembre '96 jusqu'au Congrès de Paris déjà annoncé, nos principales initiatives sont passées en revue. En juin, le front sera chaud !
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