Radicali.it - sito ufficiale di Radicali Italiani
Notizie Radicali, il giornale telematico di Radicali Italiani
cerca [dal 1999]


i testi dal 1955 al 1998

  RSS
dom 20 lug. 2025
[ cerca in archivio ] ARCHIVIO STORICO RADICALE
Conferenza droga
Partito Radicale Centro Radicale - 2 luglio 1998
Congrès de la CoRA: intervention de Jean-Pierre Galland

CONGRES DE LA CORA DES 5,6 ET 7 JUIN 1998: LE PROHIBITIONNISME SUR LES DROGUES EST UN CRIME

VENDREDI 5 JUIN (ASSEMBLEE NATIONALE, SALLE VICTOR HUGO)

Jean-Pierre GALLAND (Président du CIRC)

J'aimerais d'abord expliquer la situation du cannabis en France avant de vous expliquer tous les ennuis judiciaires que nous avons parce que si je ne fais que cela, cela risque d'être très triste puisque nous en avons beaucoup. Je voudrais donc quand-même signaler que si jamais le gouvernement appliquait à la lettre l'article de loi qu'il utilise quand bon lui semble pour faire taire la presse ou les associations qui tiennent sur les drogues des discours différents du sien, ce que j'ai à vous dire aujourd'hui devrait en principe valoir un nouveau procès qui devrait être je crois le huitième, parce que je ne les compte plus. En effet, il est dit en France: l'article L.630 de la loi punit d'une peine de prison et d'une amende la présentation sous un jour favorable, l'incitation à l'usage et la provocation à l'usage. Nous y reviendrons. Depuis bientôt 30 ans, depuis 1970 donc, la France mène une guerre sans merci au cannabis. C'est une guerre qui n'a évidemment servi à rien puisque les amateurs se multiplient:

le très officiel rapport de l'Observatoire Français des Drogues, l'OFDT, estime que 7 millions de personnes ont goûté au cannabis en France et que 2 millions l'apprécient avec plus ou moins de régularité. Il y a aussi en France, de plus en plus d'individus qui cultivent, à leurs risques et périls, quelques plants de chanvre indien au fond de leur jardin et c'est dailleurs un des seuls effets pervers agréable de la prohibition. Il y a aussi ceux qui, logique commerciale oblige, se regroupent, achètent quelques centaines de grammes sur la marché clandestin et se le partagent. Ce sont ceux-là que nous retrouvons en prison, plus rarement ceux qui se lancent dans l'importation par tonnes, à moins qu'il sagisse d'une livraison contrôlée par les membres de l'Office Central de Répression du trafic illicite de stupéfiants qui, déguisés en dealer, incitent au trafic, augmentant insidieusement les saisies. En 1997, en France, 89.285.000 personnes ont été interpellées dont 70.091 rien que pour le cannabis. Parmi ces 70.

091, 80 pour cent sont de simples usagers ou ce qu'on appelle des petits dealers. Comment dès lors ne pas penser, dans ces cas-là, à toutes celles et à tous ceux qui, au détour d'une vie qui était somme toute tranquille, ont rencontré la justice. Combien se retrouvent en France en préventive à attendre parfois de très longs mois un procès où ils n'ont d'autre choix que de se taire ou de subir les discours sidérants des fonctionnaires de la justice. Combien de lettres et de témoignages avons-nous reçus au CIRC où, pour quelques grammes de cannabis, les gendarmes déboulent arme au poing devant les enfants, mettent la maison sens dessus dessous, menottent les dangereux drogués désormais montrés du doigt par le voisinage. Ouvrez un bar en province et organisez quelques concerts. Si votre politique culturelle dérange, le cannabis servira de prétexte et votre établissement sera fermé, vous perdrez tout et vous devrez vous exiler. Et cest arrivé à plusieurs reprises. Comment ne pas évoquer aussi le sort de nombreux

étrangers, beaucoup d'anglais et de hollandais, condamnés à de lourdes peines et à des amendes aberrantes de la part des douanes. La guerre à la drogue, le leitmotiv de nos gouvernements, a, comme toute guerre, fait de nombreuses victimes, a gâché, et gâche encore, la vie professionnelle et familiale de milliers de citoyens français et étrangers sans que la classe politique, remarquez-le, ne s'en émeuve. Cela fait maintenant 20 ans que des voix s'élèvent contre le sort réservé au cannabis et à ses consommateurs, mais sans succès. La premier rapport officiel, le rapport Pelletier, datant de 1978 recommandait déjà que soit fixé un seuil délimitant l'usage. On attendait tous du socialisme en 1981 qu'il cesse sa chasse aux consommateurs mais au lieu de cela, en décembre 1992, à quelques mois de la cohabitation, Paul Quilès, ministre de l'Intérieur, nous sort un énième plan contre la drogue où il affirme sans broncher que la vente libre des seringues ne résoudrait rien car une partie des toxicomanes continuent d

'échanger des seringues usagées pour satisfaire ce qu'il est convenu d'appeler un rituel collectif. Concernant la dépénalisation du cannabis, les arguments des ministres socialistes sont tout aussi délirants. Je vous laisse juges... Le cannabis, mais quel type de cannabis? Le haschisch ou la résine concentrée à quarante pour cent qui est encore plus toxique que la cocaïne frelatée. Je ne vois pas très bien ce quil a voulu dire. Paradoxalement, la droite molle, qui est incarnée par Edouard Balladur en premier Ministre et Charles Pasqua en Ministre de l'Intérieur, sont rapporteuses de quelques espoirs vite déçus. En 1993, des associations luttant contre la prohibition sortent de l'ombre. Le mouvement de légalisation contrôlée emmené par Francis Caballero soulève devant les tribunaux les nombreuses contradictions de la loi et le Collectif d'Information et de Recherche Cannabique organise une journée internationale sur le cannabis, à la grande surprise des fonctionnaires de la brigade des stupéfiants qui filmère

nt les débats. Quelques jours plus tard, nous coupant l'herbe sous le pied si j'ose dire, le ministre de l'Intérieur promettait pour la rentrée parlementaire un grand débat, je le cite, sur la dépénalisation des drogues douces. Il n'aura jamais lieu, et, à la place, est nommée une commission dont le but était, comme toute commission, d'enterrer le débat. Mais le professeur Henrion, nommé pour conforter le gouvernement dans sa politique de répression intense, a joué jusqu'au bout son rôle d'expert et par 9 voix contre 8, la commission s'est en effet prononcée pour la dépénalisation du cannabis dans un premier temps et sa légalisation ensuite. Aujourd'hui donc, nos hommes politiques, à moins d'être sourds, aveugles ou de mauvaise foi, savent pertinemment que le plus grand danger du cannabis aujourd'hui, c'est de mener ses consommateurs les plus visibles en prison. Parce qu'on ne peut défendre l'indéfendable, parce que même les expert désavouent sa politique, le pouvoir s'attaque aujourd'hui au symbole. De temp

s en temps, il s'en prend à une affiche représentant une feuille de cannabis ou détruit l'étale de vendeurs proposant des pipes ou des phylums. Plus grave encore, sans doute parce qu'ils sont incapables de répondre aux questions posées par les partisans de la légalisation, les fonctionnaires de l'Etat les empêchent de s'exprimer. L'Eléphant Rose, magazine exclusivement consacré au cannabis, a tenu trois numéros avant que son directeur ne soit condamné à une lourde amende et à une peine de prison avec sursis dont on vous parlera par la suite. Et les Editions du Lézard, spécialisées dans la publication d'ouvrages sur les drogues, sont aujourdhui dans le collimateur de la justice. Donc, le rôle de la brigade des stupéfiants n'est pas seulement d'appréhender les usagers et de poursuivre les trafiquants mais aussi de surveiller les écarts de langage des uns et des autres. Il n'y a pas si longtemps, Act-Up en a d'ailleurs fait les frais. Je vous parlais justement au début de mon exposé de l'article L.630 de la loi

. Avec l'article L.627 qui punit d'un an de prison et d'une amende quiconque consomme en privé du cannabis, ces articles nient deux libertés fondamentales de notre Constitution; la liberté d'expression d'abord, et la liberté individuelle ensuite. Depuis l'arrivée en 1995 de Jacques Chirac au pouvoir, le CIRC, association qui estime que les usagers sont des experts au moins tout aussi qualifiés que des policiers et des médecins, est victime de harcèlement policier et judiciaire. En effet, en tant que président du CIRC, j'ai été condamné en 1995 pour provocation à l'usage à six mois de prison avec sursis et à 30.000 francs d'amende puis à trois mois de prison avec sursis et à 10.000 francs d'amende pour présentation du cannabis sous un jour favorable la même année. Les rassemblements pacifiques et rituels fêtant l'appel du 18 juin ont été interdits en 1995, en 1996 et en 1997. En 1995, malgré un pourvoi en cassation, Fabienne Lopez, alors présidente du CIRC Paris-Ile de France, et moi-même avons été condamnés

respectivement à 10.000 francs d'amende et à 30.000 francs. Pour l'appel du 18 juin de 1996, Fabienne Lopez a été condamnée à 5.000 francs et moi à 10.000 francs et nous sommes actuellement en appel. Mais nous voilà en juin 97, la gauche passe, youpi!! Les Verts et l'ARV, qui est l'alternative rouge et verte, dépose à la préfecture de police la demande de manifestation. ASUD, association d'usagers et ex-usagers de drogues, CHICHE, les jeunes Verts, Techno Plus, qui s'occupe de faire de la prévention dans les rave et, bien entendu, le CIRC les suivent. AIDES et la Ligue des Droits de l'Homme nous soutiennent. Aussi incroyable que cela paraisse, alors que Lionel Jospin a dénoncé le caractère obsolète de la loi de 1970 dans une lettre adressée au président de la Ligue des Droits de l'Homme, le gouvernement interdit à un parti de sa propre majorité d'organiser un rassemblement pacifique demandant l'abrogation du L630, le retrait du cannabis du tableau des stupéfiants et l'ouverture d'un débat au Parlement sur la

place des drogues illicites dans une société moderne. Parce que nous avons, les Verts en tête, passés outre l'interdiction, nous fûmes jugés en mars dernier. Alors que le procureur demandait pour les responsables de l'ARV, d'ASUD, de CHICHE et des Verts 10.000 francs d'amende et pour le CIRC, à l'origine des rassemblements de La Villette, 30.000 francs d'amende et 3 mois de prison avec sursis, nous fûmes tous déclarés coupables mais dispensés de peine. Cette décision, la première qui ne nous condamne pas, démontre, s'il en était encore besoin, que le cannabis est l'otage des politiques et c'est une des raisons qui nous a poussés à enfreindre délibérément et joyeusement la loi en envoyant aux députés, en décembre 1997, une lettre ouverte accompagnée d'un petit pétard d'herbe poussée sous notre doux ciel de France. Mais avant de vous parler de l'opération Chanvre des députés plus en détail, et pour en finir avec les événements autour du 18 juin, sachez que cette année, les amis du cannabis se retrouveront le

18 juin à 18h pour un pique-nique à Paris, mais aussi à Lyon, à Montpellier et ailleurs. Nous espérons d'ailleurs que les membres du Collectif pour l'abrogation de la loi de 1970 soutiendront cette initiative. C'est parce que nous voulions porter la contradiction dans les deux instances qui définissent et organisent la répression, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, que nous avons lancé l'opération Chanvre des députés. Suite à la plainte de onze députés de la droite la plus conservatrice, je tiendrais d'ailleurs à signaler que, parmi ces députés, il y en un qui s'appelle François d'Aubert, qui est un député UDF et qui a été, je crois, le rapporteur de la commission anti-mafia dont nous a parlé monsieur Ramos. C'est quand-même étrange que quelqu'un qui a donc appris le rôle des mafias dans la circulation des drogues soit un ardent prohibitionniste et ose nous attaquer. Ce que je remarquerais aussi, c'est que la machine judiciaire, pour une fois, s'est très vite mise en marche puisque j'ai été jugé l

e 25 mars et que j'ai été condamné à une peine que je ne connaissais pas qui est 250 jours d'amende à 200 francs. Clairement, cela signifie que si je n'ai pas réuni 50.000 francs dans 250 jours, j'irai en prison 125 jours. Nous sommes loin des 18 mois de prison dont 6 mois fermes requis par le procureur mais je suis, bien entendu, incapable de payer une telle somme, d'autant plus que je paie déjà, au nom du L.630, de lourdes amendes. Nous voulions faire de ce procès celui de la loi de 1970 et une douzaine de députés de la gauche plurielle nous avaient promis de venir témoigner le 25 mars. Mais, le jour du procès, un seul s'est présenté à l'heure, d'autres se sont excusés et d'autres se sont défilés. Nous avons donc eu, un député de la gauche, un député socialiste Yann Gallut et deux députés européens qui sont venus nous soutenir et que nous remercions aujourdhui. D'autre part, notre opération Chanvre des députés étant une action collective, approuvée par tous les CIRC en France, nous avons remis au tribunal

43 lettres. Dans ces lettres, des citoyens comme vous et moi expliquent pourquoi ils ont soutenu l'initiative du CIRC et comment ils y ont matériellement participé. Les uns en fournissant du cannabis, les autres en roulant des pétards ou en cachetant les enveloppes contenant l'objet du délit. De cet acte de désobéissance civile, nous avons fait un petit livre qui s'appelle Cannabis. Nous plaidons coupables. Parce que nous sommes consciencieux, que nous voulons, comme l'a déclaré il y a peu Bernard Kouchner, faire évoluer les mentalités à l'Assemblée Nationale, nous avons envoyé notre livre aux députés, cette fois sans pétard. Et que croyez-vous qu'il se passa? Il ne se passa rien. Cela me conforte d'ailleurs dans l'idée que la provocation est un moyen de se faire entendre. A propos de cette peine de 250 jours amende à 200 francs, je ne sais pas encore quelle sera mon attitude. Mais qui sait si je ne choisirai pas d'accomplir ma peine, car si la justice essaie, par de lourdes amendes, de me mettre hors jeu, e

lle évite, par des subterfuges, de m'envoyer en prison. Donc, le moment venu, nous verrons ce que le CIRC choisira, ce que moi-même je choisirai, si j'irai en prison ou pas. Comme l'affirmait il y a peu Isabelle Stengers, la légalisation du cannabis est symboliquement entendue. Ce n'est pas Bernard Kouchner citoyen qui me contredira, lui qui écrivait, il y a quelques années, que le classement du cannabis dans le tableau des stupéfiants était une erreur regrettable et qui, aujourdhui Secrétaire d'Etat, affirme qu'il faut faire évoluer les choses sans toucher à la loi de 1970. Pourtant, la majorité des experts de terrain qu'il a réunis le 11 et 12 décembre pour faire l'état des lieux, une initiative louable, ont tous demandé l'abrogation de la loi de 1970 qui empêche toute avancée notable sur le front de la toxicomanie. Les prohibitionnistes doivent se rendre à l'évidence. Le cannabis, avec sa terrifiante innocuité, sa redoutable absence de dépendance, ses abominables propriétés thérapeutiques, l'intolérable c

ulture de tolérance qu'il suscite dans les médias et la scandaleuse sympathie dont il jouit dans la jeunesse, est de plus en plus pris pour ce qu'il est; une drogue parmi les moins dangereuses et un phénomène de société qu'il est vain d'interdire. Comment alors expliquer une telle résistance de la part de ceux qui sont chargés de mettre en place les lois. Peut-être parce que l'innocent cannabis montre à nu que la consommation de drogues est avant tout une affaire de liberté. Celle d'expérimenter à ses risques et périls tel ou tel produit. Elle montre aussi que la maîtrise de ces produits est l'affaire d'individus responsables et que la gestion des effets induits relève plus de contrôles sociétaux qu'étatiques. Si la prohibition du cannabis est simplement odieuse et grotesque, la prohibition de l'héroïne s'est révélée, quant à elle, criminogène et criminelle. Imaginons que demain, on légalise le cannabis. L'Etat serait contraint de se poser des vraies questions par rapport aux drogues induisant une forte dépe

ndance. Il devrait alors cesser de prendre les citoyens pour des mineurs éternels dont il veut être le père car en voulant protéger les gens d'eux-mêmes et malgré eux, il a multiplié les conduites qu'il voulait voir disparaître et suscité de redoutables effets pervers qui, tous les jours, envoient des gens à l'hôpital, en prison ou à la morgue. Nous avons participé activement à le création du Collectif pour l'abrogation de la loi de 1970 et nous nous félicitons que des partis politiques, des organisations et des associations d'usagers se regroupent enfin pour en finir avec la prohibition. Parce que nous sommes persuadés que le cannabis est le verrou de la prohibition et la question que nous pouvons poser, celle du libre accès au cannabis, les consommateurs de drogues induisant une dépendance, prisonniers du carcan prohibitionniste, couverts de médecins en tout genre ne peuvent se la poser. Et, cette question, l'Etat ne pourra se la poser que le jour où il consentira à changer radicalement sa politique. Et da

ns ce combat pour le libre accès aux drogues, sachez que les amateurs de petite fumette seront toujours en première ligne.

Je vous remercie

 
Argomenti correlati:
stampa questo documento invia questa pagina per mail