par Jean-Louis DOUBLET LUXEMBOURG, 14 juin (AFP) - L'éventuelle interdiction des filets maillants dérivants pour les navires battant pavillon d'un Etat membre de l'Union européenne risque à nouveau de diviser les ministres de la pêche des Quinze réunis jeudi à Luxembourg.
L'Espagne et la Grèce réclament leur interdiction mais d'autres pays, comme la France, qui exerce jusqu'à la fin juin la présidence semestrielle de l'UE, s'y opposent.
De violents incidents opposent depuis plusieurs années pêcheurs espagnols et français, ces derniers utilisant les filets maillants dérivants (FMD) pour la pêche au thon germon alors que les Espagnols utilisent les lignes traditionnelles.
Pour la campagne de pêche 1995, qui vient de reprendre, la Commission européenne a envoyé un navire avec des inspecteurs communautaires à son bord pour épauler les autorités nationales pour le contrôle de l'utilisation des FMD.
Selon la réglementation actuelle, la longueur de ces filets, souvent qualifiés de "murs de la mort" par les organisations écologistes, est limitée à 2,5 km.
La Commission européenne avait proposé début 1994 d'accorder une dérogation pour l'utilisation de FMD de 5 km de long jusqu'à la fin 1994 pour la pêche au thon germon et de 21 km pour la pêche au saumon dans la Baltique avec une interdiction totale après le 31 décembre 1997.
Mais les ministres ne sont pas parvenus à se mettre d'accord sur cette proposition qui doit maintenant être revue. "La question est toujours bloquée et le principal pour l'instant est d'éviter de nouveaux incidents", souligne un diplomate européen.
Les ministres vont également tenter de se mettre d'accord sur les propositions de la Commission pour un nouveau régime de gestion de l'effort de pêche.
Celui-ci prévoit d'instituer un système de jours de pêche dans les zones situées dans l'Atlantique à l'Ouest d'une ligne passant à la verticale des îles Shetland. Il ne concerne pour l'instant que les espèces démersales (qui se trouvent près du fond) et non les pélagiques (qui évoluent entre deux eaux).
Il constitue l'application pratique de l'accord conclu entre les Etats membres en décembre pour intégrer les flottes portugaise et espagnole à la Politique commune de la pêche (PCP) et doit s'appliquer à compter du 1er janvier 1996 pour tous les navires de plus de 15 mètres.
Ce régime prévoit en particulier que 40 navires espagnols seront autorisés à pêcher dans l'"Irish Box", une zone située au Sud-Ouest des côtes britanniques que Londres voulait continuer d'interdire aux pêcheurs espagnols.
Les Espagnols souhaitent que ces 40 navires aient une entière liberté de mouvement dans la zone alors que les Britanniques voudraient qu'ils soient répartis pour éviter l'épuisement de certains bancs de poisson.
Madrid et Lisbonne désirent également qu'il soit précisé qu'il s'agit de "jours de pêche effectifs" et non de "jours de présence en mer" en raison de leur éloignement des zones concernées.
Les ministres vont aussi discuter de la fixation des contingents tarifaires d'importation de poissons dans l'Union européenne, qui ne couvre pas ses besoins en produits de la pêche.
"Deux thèses s'affrontent: Celle qui favorise les besoins de l'industrie de transformation et celle qui privilégie la protection des pêcheurs communautaires", indique-t-on de source diplomatique.
La Commissaire européenne à la pêche, l'Italienne Emma Bonino présentera l'état des négociations pour la reconduction de l'accord de pêche avec le Maroc, actuellement dansl'impasse. Une prochaine rencontre entre représentants de la Commission et Marocains pourrait avoir lieu le 20 juin, indique-t-on de même source.
La mise en oeuvre de l'accord signé en avril entre le Canada et l'Union européenne sur la pêche au flétan noir (turbot) sur les Grands Bancs de Terre-neuve sera également discutée, notamment la question du contrôle satellitaire des navires et la répartition entre les Etats membres du quota accordé à l'UE.