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Conferenza Emma Bonino
Commissione Europea Letizia - 31 luglio 1996
"Le Monde", 31.7.96 - Interview de Emma Bonino, Commissaire européen, chargée de la politique humanitaire

"Il faut qu'Européens, Américains et Africains tiennent un langage unique"

- "Quel jugement portez-vous sur la situation au Burundi ?

- Il y a eu coup d'Etat. Et j'en reste à l'idée qu'il n'y a pas de paix durable sans respecter des règles démocratiques. C'est l'inverse de ce qu'on essaye de faire valoir aujourd'hui en Europe : d'abord la paix, ensuite la démocratie. L'une ne va pas sans l'autre. On en est revenu, au Burundi, à la situation d'avant les élections de juin 1993, qui avaient abouti, pour la première fois, à l'installation d'un président démocratiquement élu.

- Les pays africains paraissent plus réservés que les pays occidentaux à l'égard du major

Buyoya ?

- Je crois que les Africains sont impressionnés par l'exemple de l'Afrique du Sud où une pression internationale cohérente a aidé la minorité blanche à abandonner le monopole du pouvoir, en profitant de la personnalité de Frederik De Klerk, alors que, simultanément, la majorité noire, prenait appui sur la forte personnalité de Mandela pour accéder au pouvoir. Ce cas de figure, les Africains l'ont beaucoup plus en tête que nous. Il manifestent plus de résistance à l'égard du major Buyoya, parce que la success-story sud-africaine leur apparaît être un modèle à suivre.

- Les pays européens se trouvent-ils tous sur la même ligne ?

- Pour d'évidentes raisons historiques, la France et la Belgique ont une position différente de celle des autres Etats membres, qui n'ont jamais été impliqués dans ces conflits. La mission d'Aldo Ajello, nommé envoyé spécial de l'UE dans la région des Grands Lacs en juin, avait pour but de dégager une position commune de l'UE. S'agissant du coup d'Etat, l'attitude des Français et des Belges a été particulièrement soft, ce qui a irrité nos partenaires africains. "Vous les Européens, ne venez plus jamais nous parler d'élections et de démocratie !", s'est exclamé le secrétaire général de l'Organisation de l'unité africaine. Les Etats-Unis, eux, ont au moins condamné le putsch et posé des exigences que le major Buyoya a rejetées.

-Que doit faire la communauté internationale ?

- Il n'y a pas de solution militaire. Depuis longtemps, le secrétaire général de l'ONU nous a prévenus, rapports à l'appui, qu'un petit génocide est en cours et a réclamé une intervention extérieure. On a envisagé, en application de l'article 6 de la charte des Nations unies (maintien de la paix), une intervention des Africains, avec un appui logistique des Occidentaux. Le président burundais avait réclamé cette force multinationale. Celui qui a pris sa place n'en veut pas.

Reste l'article 7 (rétablissement de la paix), qui exige une décision unanime du Conseil de sécurité. Selon le secrétaire général adjoint de l'ONU, aucun pays n'est prêt à intervenir au titre de cet article. Les choses ont-elles changé depuis le coup d'Etat ? Je ne vois pas se dégager d'unanimité au sein du Conseil de sécurité, y compris parmi ses membres européens. Quand je lis la déclaration du Quai d'Orsay, je ne vois pas la France voter en faveur d'une intervention au Burundi ...

Faute d'option militaire, reste l'option diplomatique. Pour l'heure, personne n'a la volonté de faire quoi que ce soit. Ahmedou Ould Abdallah, qui fut le représentant de Boutros Ghali au Burundi, a écrit, dans Le Monde du 27 juillet, une vérité tellement éblouissante qu'on risque de ne pas la voir : il faut que délégués, ambassadeurs, envoyés spéciaux de toute nature, qui sont sur place, se mettent autour d'une table pour adopter une position commune. C'est le préalable indispensable à tout progrès. Il faut qu'Européens, Africains et Américains tiennent un langage unique aux dirigeants burundais."

Propos recueillis par Philippe Lemaître

 
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