RESUME DU DOCUMENT DU GROUPE PARLEMENTAIRE CDU/CSU
"REFLEXIONS SUR LA POLITIQUE EUROPEENNE"
Bruxelles, le 20 septembre 1994
Le document "réflexions sur la politique européenne" approuvé le 1er septembre 1994 par le groupe parlementaire de la CDU-CSU allemande (chrétiens-démocrates/sociaux-chrétiens) fait tout d'abord le point sur la situation dans laquelle se trouve le processus d'intégration européenne en général, de l'Union européenne en particulier. Le document met en évidence trois problématiques:
1. le risque croissant d'une dilution de l'Union européenne dans une association lâche, limitée à quelques aspects économiques, composée de divers sous-groupes et incapable de mener à bien les tâches énoncées par le Traité de Maastricht, notamment en matière de PESC (politique étrangère et de Sécurité commune);
2. la nécessité d'envisager une intégration croissante des pays d'Europe centrale et orientale dans l'Union européenne pour assurer sécurité et stabilité à toute l'Europe;
3. l'intérêt primordial de l'Allemagne à ce que l'Europe ne subisse pas l'effet des forces centrifuges, la confinant à nouveau dans une position inconfortable de "milieu" entre Est et Ouest, à laquelle elle a répondu par le passé par des politiques hégémonique sans lendemains; depuis la "catastrophe" de 1945, la solution a consisté à intégrer l'Allemagne dans la Communauté/Union: si l'on veut donc éviter des vides dangereux au centre de l'Europe et la création de nouvelles zones "d'influence" - l'Allemagne ayant sûrement la sienne -, il faut continuer le processus d'approfondissement de l'intégration, condition préalable à l'élargissement à Est de l'Union.
Pour atteindre ce double objectif - élargissement et approfondissement - les parlementaires de la CDU/CSU proposent cinq mesures interdépendantes:
a. Renforcement de la capacité d'action de l'Union, en mettant en place un système institutionnel à la fois démocratique et efficace, inspiré du modèle fédéral et fondé sur l'application du principe de subsidiarité, comprenant aussi le transfert de compétences à des niveaux inférieurs; dans ce contexte, la répartition des compétences entre les institutions de l'Union doit être clairement définie dans un document de nature "quasi-constitutionnelle". On devra aussi régler, à l'occasion de la Conférence Intergouvernementale de 1996 et dans le cas d'un amendement au Traité de Maastricht, la question de la procédure de vote à l'unanimité énoncée à l'art. N en la remplacant par une procédure de vote à une majorité à spécifier.
b. Renforcement du noyau dur de l'Union, c'est à dire de la coopération entre les pays qui veulent et peuvent s'intégrer; le noyau dur a pour tache d'opposer un centre consolidé aux forces centrifuges résultant d'un élargissement constant et donc de concilier les objectifs contradictoires d'approfondissement et d'élargissement de l'Union; cette coopération devrait se concentrer sur les domaines ajoutés aux Traités de Rome par le t
Traité de Maastricht (PESC, UEM, justice); elle devrait déboucher sur une politique commune en matière monétaire, fiscale, budgétaire, économique et sociale, et jeter les bases d'une union monétaire au sein du groupe.
Outre la France et l'Allemagne, les pays qui réunissent aujourd'hui les conditions politiques et économiques (monétaires) pour faire partie du noyau dur sont les pays du Benelux, mais d'autres devraient et pourraient être convaincus de prendre les mesures nécessaires pour en faire partie.
c. Intensification qualitative des relations franco-allemandes, dans le cadre de l'Union, notamment dans le cadre de la PESC; la relation franco-allemande étant mise à l'épreuve, on risque à présent un développement d'intérêts divergents. On craint par exemple en France que le processus d'élargissement vers le nord (Autriche notamment) n'aboutisse à un renforcement du pouvoir de l'Allemagne. Il est aussi dans l'intérêt de la France que l'élargissement et l'approfondissement soient étroitement liés.
Cependant la France se montre souvent indécise lorsqu'il s'agit de prendre des mesures concrètes en faveur d'un développement politique et institutionnel de l'Union, toujours convaincue au fond d'elle même qu'il est impossible de renoncer à la souveraineté de l'Etat-nation, alors que, pour les parlementaires allemands, "celle-ci ne constitue plus depuis longtemps qu'une enveloppe vide".
Aujourd'hui, il est aussi nécessaire de surmonter, en vue de l'Union Monétaire, les divergences entre la France et l'Allemagne en matière de politique industrielle, de politique agricole (PAC) et de politique de la concurrence, ainsi que sur les questions concernant la défense européenne (relations avec l'OTAN).
d. Renforcement de la capacité de l'Union à agir en matière de politique étrangère et de sécurité, puisque les Etats membres ne sont plus en mesure d'assurer leur sécurité et puisque l'affaiblissement du soutien de l'opinion publique dépend aussi des échecs récents de la politique européenne en ces domaines; il faut donc fixer les objectifs communs ainsi que les procédures et les moyens politiques et financiers pour les atteindre.
Dans ce contexte, les priorités de la PESC sont:
* politique commune visant à stabiliser l'Europe centrale et de l'Est;
* développement des relations avec la Russie, dans le but d'établir un vaste partenariat;
* politique commune dans l'espace méditérranéen;
* partenariat stratégique avec la Turquie;
* nouvelle orientation des relations avec les Etats-Unis;
La définition d'une défense commune européenne est urgente puisque nous sommes appelés à assumer des responsabilités larges en ce domaine, comme la crise dans l'ex-Yougoslavie le montre clairement. L'OTAN devra progressivement évoluer et se transformer en une alliance ou l'Europe, les Etats-Unis et le Canada sont sur pied d'égalité. Le rôle de l'UEO (Union de l'Europe Occidentale) devra être revu en ce sens à l'occasion de la Conférence intergouvernementale de 1996 (CIG); de même il faudra assurer, par le biais d'une cellule de planification de la PESC, une meilleure coordination dans la prise de décisions en ce domaine.
e. Elargissement de l'Union à l'Est (Hongrie, Pologne, Slovénie, Républiques tchèque et slovaque), qui doit intervenir autour de l'année 2000 et doit se faire par étapes, en intégrant progressivement les pays candidats au niveau économique (accès aux marchés, harmonisation des politiques commerciales, promotion du libre-échange), mais aussi dans les secteurs de la PESC, de la défense, de la politique intérieure et judiciaire.
En effet, la perspective certaine de l'adhésion à l'Union est une contribution importante au développement économique et politique de ces pays. Cela doit s'accompagner d'une politique de partenariat globale entre l'Union et la Russie.
L'opinion publique européenne - concluent les parlementaires de la CDU-CSU -, contrairement à ce que disent certains politiciens et intellectuels, est en général consciente de la nécessité d'une Europe unie. Cependant elle la veut plus démocratique, plus transparente et capable d'obtenir des résultats clairs dans les domaines mentionnés plus haut.