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Partito Radicale Centro Radicale - 5 luglio 1995
Europe, élargissement

VERS L'EUROPE DES TRENTE

par Jean Durieux

(La Libre Belgique, 04/07/95)

L'Union européenne va doubler le nombre de ses Etats membres dans les dix ans qui viennent, en s'élargissant en une ou deux étapes à l'ensemble des pays européens qui le désirent. Cette évolution est tenue pour inévitable; elle traduit une obligation morale et politique pour les Quinze, qui s'accompagne d'une sorte de droit pour les candidats européens à l'adhésion. Il n'est pas vraisemblable, aujourd'hui, que l'Union puisse se soustraire à la contrainte stratégique de réunifier ainsi le continent européen.

Les douze Etats membres qui négociaient le Traité de Maastricht n'étaient pas conscients de cette véritable mutation quand ils ont décidé qu'une Conférence intergouvernementale (CIG) se tiendrait en 1996. Le grand élargissement confère à la CIG 96 une dimension totalement nouvelle qui oblige les quinze Etats membres actuels à réévaluer les objectifs de cette Conférence et leur ordre de priorité. Les objectifs initialement fixés restent évidemment pertinents, comme simplifier et démocratiser les procédures, ou encore améliorer les mécanismes décisionnels et l'efficacité du dispositif institutionnel dans les domaines où il laisse à désirer: la politique étrangère et de sécurité commune (2e pilier du Traité) et la coopération en matière de justice et d'affaires intérieures (3e pilier).

Mais, de même que la Conférence devra s'attacher aussi à réconcilier les citoyens européens avec l'intégration européenne pour tenir compte de la distanciation qui ne s'est révélée qu'après la signature du Traité, à l'occasion des referenda, elle devra faire du grand élargissement de l'Union la donnée centrale qui l'emporte sur toutes les autres et qui rend incontournables deux questions fondamentales

Peut-on éviter, et comment, qu'un élargissement d'une telle ampleur engendre une paralysie de l'Union ? Les réformes nécessaires et suffisantes à opérer sont-elles compatibles avec la règle de l'unanimité en vigueur dans la CIG et le maintien de l'unicité du système institutionnel, la mise en oeuvre de rythmes d'intégration différenciés et de certaines adaptations institutionnelles pouvant assurer un bon fonctionnement de l'Union à la nouvelle échelle ?

- Ou faut-il, au contraire, dépasser cette orientation et élargir notre réflexion au scénario d'une Europe à deux vitesses, avec un noyau d'Etats qui seraient prêts à assumer les obligations additionnelles qu'entraîne la notion d'approfondissement de l'Union, et seraient disposés à appliquer aux 2e et 3e piliers les principaux éléments de la méthode communautaire qui a fait ses preuves dans le 1 pilier, cela dans le cadre d'un nouveau Traité qui organiserait les relations entre le noyau et le reste de l'Union ?

Il serait sans doute aussi contre-indiqué de s'interdire cetteexploration que d'espérer que le CIG 96 puisse trouver une réponse à cette question centrale étant donné que les conclusions seront prises à l'unanimité et que d'ores et déjà, un chef de gouvernement, John Major, a officiellement annoncé qu'à la Conférence, le Royaume-Uni ferait opposition à tout ce qui pourrait ressembler à un effort d'approfondissement de l'intégration selon la méthode communautaire. Pour autant, un débat en profondeur sur ce thème aussi central que diviseur ne devrait en aucun cas être évité car on en à besoin pour clarifier le débat européen et pour apprécier si un nombre suffisant d'Etats membres entendent approfondir l'Union et seraient disposés à s'engager dans la recherche d'un noyau dur dès lors que celui-ci s'avèrerait être la condition d'un approfondissement de l'Union élargie.

Une réflexion approfondie s'impose pour aborder convenablement cette question complexe et délicate, Il n'est cependant pas trop tôt pour avancer quelques réflexions préliminaires à ce sujet.

Il semble peu vraisemblable, pour ne pas dire plus, que les 15 Etats membres puissent adopte r à l'unanimité les décisions prises pour permettre à l'Union élargie à 25 ou 30 membres non seulement d'éviter l'asphyxie mais d'améliorer son fonctionnement et d'approfondir son intégration. Leurs divergences de vues profondes sur la méthode - communautaire ou intergouvernementale - de la construction européenne suffiraient à les en empêcher. Car le problème de la méthode est au coeur du débat européen et du binôme élargissement-approfondissement. On peut se mettre assez facilement d'accord sur les objectifs, comme on l'a fait à Maastricht s'agissant par exemple de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Mais les objectifs n'ont de sens que par rapport aux moyens retenus pour les atteindre. Vouloir une PESC, à 15 et plus encore à 25, en s'en tenant strictement à la méthode intergouvernementale qui régit le 2e pilier (pas de centre d'analyse et de proposition; décision à l'unanimité), c'est de l'aveugl

ement ou de l'abus de langage. Si l'on veut corriger les carences de la PESC pour reprendre cet exemple, et permettre enfin à l'Union, puissance économique, d'exister politiquement, il faut tant soit peu sortir de l'intergouvernemental et réintroduire dans le jeu les atouts de la Communauté économique européenne. Mais comment le faire si quelques Etats membres s'obstinent à ne pas modifier le Traité sur ce point ? Y a-t-il dans ces conditions une alternative préférable au schéma des deux vitesses ?

Allons un pas -plus loin et bornons-nous au seul domaine communautaire relevant du 1 pilier. Est-il probable que dans ces matières économiques et monétaires, les 15 puissent dégager à l'unanimité les adaptations et modifications susceptibles de faire fonctionner une Union à 25-30 ? En ce domaine, il faudrait généraliser l'emploi du vote majoritaire, rééquilibrer l'influence entre grands et petits Etats, accroître les pouvoirs de gestion de la Commission et les pouvoirs législatifs du Parlement, simplifier les procédures, etc. En supposant même que la Conférence y parvienne, à l'unanimité, est-on certain que cette panoplie de réformes réduirait suffisamment le risque d'impuissance découlant de la diversité d'intérêts, de traditions et de développement d'un aussi vaste ensemble, résultant aussi des minorités de blocage croisées et des pesanteurs de la loi du nombre ? Nul ne peut affirmer cela. Cette Union serait probablement moins performante; elle serait aussi moins solidaire carles politiques qui incarnent l

e plus la solidarité communautaire comme la PAC ne seront pas extensibles aux nouveaux Etats membres, faute de moyens financiers; ou alors elles seront diluées et affaiblies.

Ces réflexions préliminaires conduisent à penser que la CIG - et le groupe de réflexion qui la prépare - ne peuvent pas escamoter des questions aussi fondamentales sous prétexte d'éviter les tensions voire une cassure entre Etats membres. L'ambiguïté doit prendre fin lorsque sont rendues publiques et officiellement revendiquées des divergences de vue fondamentales sur la finalité et la méthode d'achèvement de l'Union. Il s'agira bien entendu d'identifier en premier lieu ce qui peut être engrangé à Quinze, par consensus mais en même temps de vérifier le nombre d'Etats membres qui ne renoncent pas à l'approfondissement de l'Union.

L'Union sera donc confrontée à un grand défi. Ou bien les Quinze se contenteront des maigres résultats auxquels semble condamnée une Conférence comme la CIG 96 et l'Union courra le risque de la dilution et de la régression à travers le grand élargissement. Ou bien un certain nombre d'Etats membres prendront la responsabilité d'aller plus loin en restant fidèles à la méthode communautaire et à la vision politique qui soustend l'intégration européenne depuis le début, et ils provoqueront un choc qui ne peut être que bénéfique et salutaire à long terme.

 
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