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Pannella Marco, G.U.C.E. - 15 maggio 1990
QUATRIEME CONVENTION ACP-CEE

SOMMAIRE: La politique de l'Europe par rapport aux ACP (groupe de pays en voie de développement, parmi lesquels nombre d'ex-colonies des pays membres de la CE) est déplorable, parce qu'elle ne vise pas à résoudre à la racine les problèmes de ces pays: désertification, sous-développement, absence de démocratie. Au contraire elle tend à les perpétuer, en accordant les aides symboliques aux seules dictatures et en garantissant la suprématie économique européenne sur les populations exterminées par le fléau de la faim (15-2-90).

Pannella (NI). - Monsieur le Président, je comprends trés bien pourquoi nous devons soi-disant adopter tout de suite ce rapport qui est évidemment, au niveau technique, excellent mais qui, au niveau politique, est aberrant.

Je trouve, Monsieur le Président, que c'est seulement dans une situation de distraction, de marginalité du débat qu'on peut adopter cette politique. Car si cette politique était au coeur même de quelque débat politique, elle serait rejetée. Et je ne crois pas que nous puissions, nous le Parlement, dans ce cas, critiquer non seulement la Commission mais même pas le Conseil, car c'est la politique de notre Parlement qui est cause aussi des effets que nous constatons nous tous.Quelle est la situation, Monsieur le Président? La situation est très simple: nous avons une enveloppe qui, au niveau de l'ordre de grandeur, n'est vraiment pas à la hauteur des problèmes que nous prétendons résoudre. Cette enveloppe ne réussit pas ensuite à se traduire dans les faits. Nous ignorons les gros problèmes, les vrais problèmes, le problème, par exemple, qu'est notre attitude, si vous voulez en quelque sorte paternaliste, comme nous dirions nous les Italiens, envers les Etats africains. Un paternalisme de gauche et idéologique

est parfois encore pire que l'autre. Car nos interlocuteurs sont l'expression, dans la plupart des cas, du désastre et de la mise à mort de leurs populations. Il faut bien le dire lorsque nous acceptons, au niveau du cadre même de Lomé, de discuter, de travailler, d'avoir des objectifs sans poser la question de l'impossibilité d'une renaissance de l'Afrique, renaissance économique, sociale, culturelle et politique, dans le cadre des Etats nationaux entre lesquels le Sahel et toute l'Afrique sont morcelés, quand nous n'envisageons même pas que le problème du Sahel était, de toute évidence, celui de reconstruire, de faire refleurir le désert ou pas, comme les Israéliens dans les conditions que nous connaissons ont dans une certaine mesure réussi à le faire, ou bien nous donnons à notre intervention, à Lomé, au Parlement, à la Communauté la conscience également que nous tenons à avoir douze politiques de coopération autonomes pour mieux contrer, à la rigueur, les quelques inputs positifs que nous donnons ici au

niveau idéologique. Lorsque, Monsieur le Président, on nous demande de voter massivement, unanimement pour ce désastre au niveau du concept, au niveau de la théorie, au niveau de la gestion parce que les prémisses elles-mêmes ne permettent pas une gestion différente, je crois que nous sommes un Parlement à la hauteur des parlements des ACP ou de certains faux parlements des ACP.

C'est donc, je dois dire avec joie, et j'espère qu'une fois devienne coutume, que j'ai entendu le collègue Wurtz dire: nous ne devons pas voter et rompre cette sort d'unanimité néfaste de la commission du développement, que j'ai essayé, cinq ou sept ou huit ans durant, de dénoncer inutilement comme un élément d'une mauvaise politique. J'estime en conscience que justement l'excellence du rapport et l'excellence du rapporteur nous donnent la mesure a contrario de ce que nous ne devons pas faire. Comment peut-on dire le contraire, Monsieur le Président, dans une situation dans laquelle la part des importations en provenance des ACP sur le marché européen, au vu des chiffres que nous trouvons, s'est réduite de 8 % en 1975 à 3,8 % en 1987 et a baissé encore plus, lorsque lé budget à l'ajustement structurel pour les ACP représente ce qui a été attribué à la seule Hongrie? Et lorsque nous ignorons encore une fois les problèmes de la budgétisation du FED, de notre réelle autonomie financière qui est liée au montant

des attributions financières qui sont faites? Et lorsqu'on voit aussi le dédain avec lequel les membres du Bureau élargi traitent les représentants de leurs propres groupes politiques aux ACP, je crois que tout y est. Il y a une politique misérable, une politique qu'on ne peut absolument pas rendre noble ou rendre capable. La Commission n'y est pour rien, sauf dans la mesure où elle ne pose pas elle non plus le problème d'une politique de coopération commune, comme nous avons eu une politique agricole commune et on accepte de marginaliser de plus en plus ces contacts, tant et si bien qu'il y a maintenant laruée vers l'or de l'endettement de l'Est européen vu que nous avons assassiné, je dois dire sciemment, après quinze ans, toutes les possibilités de la part de l'Afrique et des ACP d'être un partenaire qui, en quelque sorte, peut invertir la tendance.

Donc, nous ne faisons qu'un commentaire conscient, Monsieur le Président, conscient de la mise à mort par extermination par la faim, la misère, la soif de nos interlocuteurs. Le fait que nous continuons à les respecter, comme le font Mme Daly ou d'autres, alors qu'ils ne sont que les représentants, pour la plupart, des classes dirigeantes qui mettent à mort les droits et la vie de leur pays, je crois que tout cela démontre combien, pour une fois, un vote d'opposition politique peut prétendre être aussi un vote d'opposition morale.

C'est pour cela que je suis fier de vous dire, Monsieur le Président, que je dis non aujourd'hui et d'ailleurs je dirai non aussi dans un an si besoin était.

 
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